Satsuriku

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Pdv Externe, Tokyo

Il faisait nuit, là entre le bruit au loin des quelques voitures et l'éclairage diffus des lampadaires sur le pavé, on entendait des essoufflements rapides.
Une fine silhouette progressait d'une démarche hésitante et boiteuse entre les immeubles alignés dans la rue.

Elle s'appuyait sur le revêtement gris mat dans un élan d'agonie, mais sans jamais qu'elle ne tombe pour autant. Comme si une sorte d'énergie du désespoir la guidait et la tirait irrémédiablement vers son but.

Des traces rouges, ici et là, jonchaient son parcours et maintenant les touches du code de l'interphone qu'elle venait d'activer.

Elle monta les marches une à une, regardant parfois par dessus son épaule pour voir si elle n'était pas suivie, même si de toute façon elle le savait bien : dans son état, il aurait été impossible qu'elle échappe à qui que ce soit. Aussi vulnérable qu'un oisillon tombé au sol et condamné à fuir le danger imminent de tout ce qui menaçait de la dévorer d'une minute à l'autre.

Elle finit par s'appuyer lourdement contre la porte, vidée de toute son énergie vitale.

Elle n'avait même plus la force de tambouriner contre celle-ci et ne parvenait qu'à y poser sa main sans arriver à produire le moindre son que le frottement épuisé de sa paume contre le bois.

-K.. Kenzo... murmura-t-elle d'une voix cassée

Le sang lui brouillait la vue et elle distingua à peine la serrure.
Mais comme rien ne venait, elle finit par fouiller sa poche au prix d'un énorme effort, en sortit une clé, et parvint quand même à ouvrir la porte, même à bout de forces.

Les rayons de lune traversaient l'appartement et plongeait les lieux dans une sorte de demi-obscurité. Rien ne bougeait. La jeune fille sentait ses moyens la quitter dangereusement.

Ses genoux défaillirent et elle se retrouva au sol impuissante, à la limite de l'évanouissement, à seulement quelques mètres du salon. Elle jura. Ses bras étaient couverts de blessures et elle appuyait difficilement sur la partie gauche de son T-shirt où une marque rouge tâchait sa main. Elle était là, à quelques mètres à peine de son secours, et elle n'avait même plus la force d'élever la voix pour l'atteindre. Elle se sentait pitoyable.

-Kenzo... J'ai vraiment besoin que tu te réveilles gemit-elle contre le sol, pliée en deux sous la douleur

Elle n'avait plus le choix, sentant de nouveau sa vision se brouiller et ses pensées se faire de plus en plus confuses, elle mit la main à sa cuisse où était sanglé son revolver.

Et tira.

♠️♠️♠️♠️♠️

Quelques heures plus tard, elle rouvrit les yeux avec une impression de douceur. La lumière nimbait ses yeux encore clos dans un halo agréable et elle se prit à penser qu'elle était sûrement morte en ce moment.

Puis elle commença à mieux se réveiller et à intégrer la sensation du toucher. Elle remarqua alors une pression sur son poignet et en ouvrant les yeux elle vit que quelqu'un était assis à côté d'elle. Il prenait son pouls avec sa main et semblait ne pas l'avoir lâché depuis des heures à en juger par la position de son bras contre sa cuisse et l'air inquiet qu'il affichait en regardant par la fenêtre.

Elle sourit.

-Mon ange gardien... conclut-elle en fermant de nouveau les yeux

Le blond en pétard ne prit même pas la peine de se retourner vers elle. Il lâcha une grande inspiration, comme soulagé de la savoir de nouveau bouger après ses heures de pansements, d'angoisse et de surveillance dans la peur que malgré toute son aide, son pouls ne disparaisse sous ses doigts. Elle ne pouvait pas aller à l'hôpital. Ça aurait été signer sa fin : soit elle finirait en prison soit il craignait que ceux qui avaient fait ça iraient lui régler son compte pour de bon.

Une seconde d'hésitation {TERMINÉ}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant