Chapitre 40

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Ashton

Ma clope entre mes lèvres et mon sac jeté sur mon épaule, je sors du bâtiment. Instinctivement, comme partout où je vais et où j'ai pu traîner, je scanne les environs. Les deux chiens de gardes postés près du portail m'épient et j'allume ma cigarette. Zéro pression. Je vois pas pourquoi je changerai mes habitudes. De toute façon, avec ce que je fais dernièrement, je suis déjà grillé puissance dix mille. Autant rester sur la lancée.

C'est le grand jour. Le bus des Hater's est revenu tôt ce matin. Ce qui veut dire qu'il est temps de chopper Tyler. Cet enfoiré a intérêt à parler. Je saurai être convaincant.

Selon Pitt, deux options s'offrent à moi si je veux le coincer assez discrètement. Soit ça se jouera sur le terrain en fin de journée, quand il s'y rend pour courir, soit à la pause de midi lorsqu'il retourne dans sa piaule. J'ai pas encore fait mon choix. Je suis un putain d'indécis. Ça a toujours été. L'une des solutions implique que j'attende la fin de la journée. Ce qui me fait chier, parce que je suis pas patient. L'autre que j'attende que le type qui partage la chambre de ce fils de pute mette les voiles. Il faut qu'il y soit seul.

Je verrai bien selon mon humeur.

Pour l'heure, je dois rejoindre ma Diablesse dans le parc. Ça me ferait presque oublier le reste. Presque, parce que même si jusqu'à il n'y a encore pas très longtemps ma mission était pas mal relayée au second plan, aujourd'hui, c'est différent. Le fait qu'elle soit en danger ne me quitte pas une seconde. Même quand je tente de profiter du moment, c'est toujours dans un coin de ma tête.

Je devrais pas être pressé de choper le malade qui menace sa famille. Parce qu'au moment où ce sera fait, je devrai me casser d'ici. Le truc, c'est que s'il lui arrive quoi que ce soit parce que j'aurai pas bougé mon cul assez vite, je m'en voudrai à mort. C'est un putain de cercle vicieux. Chaque décision que je prends me conduira à ce que je redoute. Du coup, si ça doit arriver, autant qu'au passage, je règle le problème.

J'avance tranquillement sous le regard des étudiants. Certains n'ont pas changé. D'autres, sont devenus méfiants à cause des rumeurs. Puis, il y a ceux qui sont du côté de l'équipe. Ceux-là me regardent avec mépris. S'ils savaient à quel point je les emmerde.

À mesure que je m'approche, la silhouette d'Ellyn se dessine. Assise sur l'herbe à l'ombre d'un arbre, écouteurs aux oreilles, elle ne m'a pas encore remarqué. Ses billes sombres fixent l'horizon, ses mèches s'agitent parfois avec le vent qui se lève. J'esquisse ce sourire d'abruti qui semble ne plus vouloir me quitter et continue de progresser. Comme à chaque fois que je la vois et à l'idée de la prendre dans mes bras, mon cœur s'emballe. C'est bizarre comme mon corps réagit de différentes façons. Que ce soit en sa présence, ou quand je sais que je vais être près d'elle, je me sens plus léger. Tout ce que j'ai pu être s'envole. J'ai l'impression d'être normal. De ne pas sortir de mon ghetto, de ne jamais avoir été ce délinquant, ni d'être celui que je lui cache.

Pourtant, je passe mon temps à me demander quand tout ça va exploser. À quel moment, je vais tout perdre. Parce que je le sais, je suis pas destiné à ce genre de bonheur. Je l'ai jamais été. Je fais partie de ces gamins qui naissent, en chient et crèvent dans la rue. Pourquoi je serais l'exception ?

Arrivé à sa hauteur, je m'assois et c'est seulement à cet instant qu'elle me remarque. Elle semblait complètement ailleurs.

Elle tire sur ses écouteurs, me sourit et mon palpitant sprint comme jamais il ne le faisait avant elle. Pas même lorsque je devais courir aussi vite que je pouvais pour échapper aux gars des gangs rivaux.

Je lui vole un baiser qui semble trop rapide à son goût puisqu'elle saisit mon t-shirt et m'attire à elle pour poser ses lèvres plus longuement sur les miennes. Ça me va, je prends. J'ai jamais été avec une nana de cette façon, je sais pas trop comment ça marche, mais si c'est ce dont elle a envie, je valide. J'ai de toute façon l'impression d'être capable de n'importe quoi du moment qu'elle se sent bien.

Rᴜʟᴇ Nᴜᴍʙᴇʀ Fᴏᴜʀ [Tᴏᴍᴇ 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant