My Water Heart

Chapitre 24 - Caliban

— Les gars, j'ai besoin de votre aide.

Tout en prononçant ces mots, je me plante devant les canapés du clubhouse de la piscine universitaire, sur lesquels plusieurs des Dolphins de ma promotion sont installés : Ernest, Anton, Abigail, Patrizia, Lexie et Flora. Neal est dans un fauteuil près d'eux, partageant son attention entre un magazine de mots croisés et son portable sur lequel il tape des messages régulièrement. Plus loin, des membres plus âgés de l'équipe sont réunis autour d'une table, en pleine partie de tarot ; ils ne m'accordent qu'un regard bref avant de se concentrer de nouveau sur leur levée.

C'est devenu un rituel officieux de manger entre nous, les première année, après notre entraînement du vendredi soir ; et avant de partir à la cafétaria, nous squattons au clubhouse. Nous veillons à resserrer les liens entre nous, comme le coach Cabrera nous y a encouragés.

— « Les gars » ? attaque aussitôt Patrizia. Il faut absolument une paire de couilles pour ce que tu projettes ?

— Euh, non, c'était une façon de parler... je bredouille, confus.

— Laisse-le tranquille, Pat', intervient Ernest. Tu vois bien qu'il n'a pas réfléchi à ce qu'il disait.

— C'est bien le problème, argue-t-elle. Ça commence par-là, le sexisme. Des idées internalisées, dont on n'a même plus conscience.

— OK, on va tous travailler à se déconstruire, affirme Anton, s'efforçant de désamorcer la tension dans l'air. En attendant, Cal' veut nous parler, je crois.

— Salut tout le monde, lance alors Helen, débarquant dans mon dos – pas étonnant qu'elle soit juste derrière moi, étant donné que le coach nous a libérés au même moment, en même temps que le reste des sprinteurs. J'espère que nous n'avez pas trop faim, parce que nos trois amis du papillon ne sont pas prêts d'arriver, au fait : ils n'en étaient qu'à la moitié de leur dernier set au moment où j'ai quitté le bassin.

— On survivra, réagit Lexie. J'espère juste que James évitera de passer dix ans dans les douches cette fois-ci.

— Alors là, tu as de l'espoir... je souffle.

Je réponds au check d'Helen tandis qu'elle s'installe dans les canapés. Son arrivée n'a pas fait oublier à Abigail que je m'apprêtais à me confier ; d'une voix douce, elle me demande :

— Qu'est-ce qui se passe, Caliban ? Tu as besoin de nous ?

Toutes les paires d'yeux se posent de nouveau sur moi. J'inspire profondément avant de révéler :

— Voilà... Il y a cette fille qui me plaît bien, et avec qui j'ai commencé à sortir. Elle voudrait que je la fasse entrer dans mon univers pour notre prochain date, et du coup, j'ai pensé à l'inviter à notre première compétition de la saison, le week-end prochain. Seulement, je veux faire les choses bien, pas juste lui envoyer un message avec le lieu et l'heure, donc je voudrais lui fabriquer un ticket à glisser sous sa porte. Mais je suis plutôt nul pour tout ce qui est projets créatifs, alors je me suis dit que l'un de vous aurait peut-être une brillante idée pour me sauver la mise.

Suite à ma tirade, les six Dolphins me dévisagent en silence, avant qu'Ernest n'éclate de rire et lâche :

— Theo va être tellement dégoûté !

— Pourquoi ? je lui renvoie.

— Depuis que James nous a dit que tu fréquentais quelqu'un, il est persuadé que c'est Amy. Mais si tu veux inviter cette fille à notre compétition, c'est forcément qu'elle n'y participe pas déjà. Au temps pour le « super radar à relations » dont il se vantait.