HARMFUL T.1/T.2

CHAPITRE 13

Faith

Aujourd'hui, c'est le grand jour, le jour où nous allons rendre visite à mon père avec Leila et Jordan. Je ne sais pas pourquoi, mais j'appréhende. Non pas que cela me dérange que mes amis le voient dans cet état, mais plutôt parce que j'ai peur de ne pas avoir la force de faire comme si tout allait bien devant eux. Surtout devant lui. Même si j'ai l'habitude de le voir comme ça, il est évident que les choses ont changé et que c'est pire qu'au début.

Jordan est venu nous chercher pour que l'on parte ensemble dans l'après-midi, et j'ai décidé de les piéger à leurs propres jeux. Je sais qu'entre ces deux-là, il s'est passé quelque chose de plus qu'amicale et je me dois de leur faire cracher le morceau. De plus, j'ai besoin d'explications ! Pourquoi me cacher ce qui se passe entre eux ? Mais je sais au fond de moi que la raison pour laquelle Leila ne me l'a pas dit, c'est qu'elle ne voulait pas admettre que j'avais raison au sujet de toutes ces années passées. Après tout ce temps à la pousser à bout, elle a finalement cédé à la tentation.

Lorsque Jordan arrive, Leila se précipite du côté passager, me laissant seule à l'arrière. Cela ne me dérange pas du tout ; au contraire, c'est la meilleure façon de les confronter et d'observer leurs réactions face à moi. Alors que la discussion devient de plus en plus animée, je vois la parfaite opportunité pour mon guet-apens.

— Donc comme ça, vous couchez ensemble ? je lance.

Jordan se tait immédiatement. À son expression que je distingue à travers le rétroviseur intérieur, il écarquille les yeux face à la route. Quant à Leila, elle est sur le point d'exploser de rire.

— Tu lui as dit ? s'exprime Jordan.

— Aha ! Donc c'est vrai ! j'interviens avant que Leila ne nie les accusations.

— Ok... Oui, mais on a une explication, me coupe Leila.

Jordan lui lance un regard noir lui demandant sûrement quelle aurait pu être cette explication.

— Et puis ça n'est arrivé qu'une fois et nous n'avons pas vraiment couché ensemble, il ajoute.

Peu m'importent-s'ils n'ont franchi uniquement le cap des préliminaires, la chose étant qu'ils avaient eu un rapport consenti. Non pas que je veuille en avoir les détails, mais ma meilleure amie aurait pu au moins me tenir au courant, c'était la moindre des choses. Elle s'empresse de me demander si Aiden et moi avons franchi le pas, alors qu'elle ne m'informe même pas de ce qui la concerne.

Nous arrivons chez mes parents l'heure qui suit. Après une longue heure de trajet à débattre de leur relation des plus secrète, il est temps pour nous d'arborer nos plus beaux sourires.

— Elles sont magnifiques merci Leila, la remercie ma mère.

Leila a apporté des pivoines — ses préférés — que ma mère place aussitôt dans un vase. Jordan, lui, a apporté des pâtisseries que mon père adore d'une boulangerie de Manhattan.

À l'instant où il a franchi la porte, Shawn l'a immédiatement entraîné dans le jardin, un ballon de foot à la main, impatient de faire quelques passes. Mon petit frère est très proche de Jordan, bien plus que Leila. En tout cas, c'est ce que Jordan ne cesse de dire, il est persuadé que mon frère le préfère à Leila. Et de toute façon, la guerre entre Leila et Shawn ne cesse jamais ; on se demande vraiment qui des deux est l'enfant.

— Regarde-le, préférer un joueur de foot à sa presque demi-sœur. Je l'ai vu venir au monde bordel ! s'exclame celle-ci.

Nous éclatons de rire à l'unisson, et mon père, ravi de nous voir tous réunis, arbore un sourire qui réchauffe le cœur. Cela me fait du bien, à nous tous. Pourtant, une pensée troublante me serre la gorge : je redoute le jour où il ne pourra plus vivre de tels moments. Mes yeux s'embuent, mais je me précipite dans la cuisine pour ravaler mes larmes.