13 - Et enfin...

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Lorsque Nanaka rentra enfin à l'appartement, c'était presque l'aube. Elle abandonna ses affaires dans l'entrée et se dirigea vers la salle de bain d'un pas chancelant. Son client du jour, un chef yakuza avec qui Kōji était en affaires, avait des goûts particuliers. Ses poignets portaient encore la trace des menottes et elle avait plusieurs brûlures de cigarettes dans le cou.

Connard, ça fait mal...

Elle retira son costume de scène, sa perruque et laissa tomber le tout sur le sol de la salle de bain pour aller se doucher sans même se démaquiller. Quand elle plongea dans son bain, elle grimaça.

Putain, il aurait pu y aller doucement...

La scène à laquelle elle avait eu droit plus tôt lui était maintenant familière. Ce qui plaisait à ce type c'était de s'enfermer dans son bureau avec une des danseuses de Kōji tandis que ses hommes attendaient de l'autre côté de la porte. Il faisait cela dans son bureau et non chez lui ou à l'hôtel parce qu'il était marié et qu'il ne voulait pas que sa femme sache. Le plus souvent il s'offrait une danseuse quelconque, mais lorsqu'il arrivait à se payer Angel, il était aux anges. La fille passait ensuite la soirée, menottée à sa chaise de bureau, pendant que ce gros porc faisait son affaire en feignant de la questionner. C'était comme ça qu'il prenait son pied, en s'imaginant faire parler une fille en costume de scène et aux courbes avantageuses.

Sale porc... Grimaça Nanaka.

Elle sortit de son bain sans même prendre la peine de s'enrouler dans une serviette et rejoignit le miroir au-dessus du lavabo. Elle se pencha vers son reflet.

– Tu l'as vu toi ?

La fille dans le miroir avait des yeux fous, fiévreux.

– Non, répondit-elle, je ne l'ai pas vu. Mais il viendra, c'est sûr, tôt ou tard il viendra.

Nanaka se détourna et elle attrapa une sortie de bain. Elle l'enfila et gagna la cuisine pour se faire chauffer des nouilles instantanées. Puis elle alla s'installer dans le salon, devant la télévision. Elle glissa une cassette vidéo dans le magnétoscope avant de s'asseoir au pied du canapé.

– ...Moi, je veux être un super-héros ! Dit la fillette qui apparut à l'écran.

Tu sais que ça n'existe pas ? Intervint une voix bougonne.

Le regard vide, Nanaka plongea ses baguettes dans son bol de nouilles sans quitter l'image des yeux.




Deux jours plus tard, un dimanche, le Yoru No Kuchi faisait salle comble. La nouvelle qu'Angel était de retour avait fait le tour des bas-fonds de la ville et tous se pressaient pour la voir.

Vêtue d'un justaucorps rouge et d'une perruque assortie, Nanaka remonta le couloir menant à la scène en croisant au passage la danseuse qui l'avait précédée.

Salope, lui lâcha cette dernière en la dépassant.

Nanaka étouffa un rire.

La solidarité n'était qu'un mythe dans ce milieu. Si vous réussissiez, cela voulait dire que d'autres avaient échoué et échouer cela signifiait souvent finir sa carrière dans un bordel.

– On verra bientôt qui est la plus salope de nous deux, souffla-t-elle.

La salle était plongée dans l'ombre quand elle arriva sur scène, mais avec l'habitude Nanaka arrivait à distinguer les silhouettes en contrebas. La plupart des hommes était installée les cuisses écartées et les mains sur les genoux. Elle pouvait presque voir les sourires vicieux sur leurs visages. Les serveuses circulaient entre les tables en prenant soin de ne jamais passer entre la clientèle et la scène, elles avaient des consignes strictes. À défaut de pouvoir se payer une des danseuses, nombre de ces hommes repartiraient avec l'une d'entre elles. Le sort de ces filles était le moins enviable de tous, sans talent, sans soutien, elles disparaissaient généralement en quelques semaines pour être remplacées par d'autres tout aussi anonymes.

L'arrivée d'Angel dans un faisceau de lumière fit monter un soupir satisfait de la salle et elle commença son show sur une musique lascive.




Lorsqu'elle regagna la loge, elle vit que quelqu'un l'attendait, appuyé contre le montant de la porte. Ses cheveux roses et les cicatrices qui ornaient les commissures de ses lèvres lui firent d'abord faire un pas en arrière, mais elle se ressaisit et s'avança. Sanzu se redressa en l'apercevant.

– Te voilà ! Dit-il.

Il vint à sa rencontre en deux pas et il alla passer un bras autour de sa taille.

– Je savais que c'était des conneries ! Lui dit-il. Tu pouvais pas être morte !

Nanaka leva les yeux, elle posa la main sur sa joue, effleurant ses cicatrices, et sourit.

– Bien sûr que non, répondit-elle.

Sanzu la serra davantage et il tendit la main vers la poignée de la porte de la loge. Il l'ouvrit et cria :

– Dehors les salopes ! Ici c'est la loge de ma préférée !

Deux femmes à demi-nues étaient en train de se changer. Elles lui jetèrent un regard craintif, rassemblèrent leurs affaires et sortirent en petite tenue. Sanzu ramena Angel vers lui.

– Change-toi, lui souffla-t-il à l'oreille. Tu viens avec moi.

Puis il la lâcha et lui mit une petite claque sur les fesses.

– Allez, dépêche-toi.

La porte se rouvrit et Masaka, le gérant du bar, entra.

– Angel ! Kōkō demande que...

Il vit Sanzu et la fin de sa phrase mourut.

– Casse-toi connard, lui dit Sanzu, elle vient avec nous aujourd'hui.

– Très bien monsieur Sanzu, répondit Masaka. Je vais prévenir monsieur Kōji tout de suite, s'il vous faut autre chose...

– CASSE-TOI J'AI DIT !

L'autre repartit en refermant la porte doucement comme si elle risquait de lui exploser entre les doigts.

Sanzu se tourna vers Nanaka qui avait déjà retiré son justaucorps et se tenait presque nue dos à lui sans faire mine de se cacher.

– Ton connard de patron se fait toujours appeler Kōkō ? Lui demanda-t-il.

Elle le regarda par-dessus son épaule.

– Hmm ? Oui, toujours, dit-elle.

Sanzu rigola.

– Un de ces quatre, le vrai va lui rendre visite, ça va être marrant.

Il s'approcha alors qu'elle était en train de s'habiller et posa les mains sur ses hanches. Il se pencha pour appuyer ses lèvres sur son épaule.

– Putain tu m'as fait peur... Dit-il. Tous ces connards racontaient que t'étais morte, que t'avais fait une overdose ou je sais pas quoi, et moi je leur disais que c'était pas possible...

Nanaka se tourna pour lui faire face.

– Mais tout va bien maintenant, dit-elle, je suis là.

– Ouais, dit-il en se redressant. Tout va bien.

Il s'écarta et reprit.

– Allez, bouge ! Ce soir c'est pas moi, c'est le boss qui te réclame. Alors va pas faire attendre Mikey !

 Alors va pas faire attendre Mikey !

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Bonten's Crimes [Mikey x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant