DOUZE - Choix cruels 1/2

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(corrigé)

Sa nuit fut plus paisible qu'elle ne le prédit. Malgré le lit trop moelleux et la présence du Prince derrière elle, elle arriva à gagner quelques petites heures de sommeil. Dans un sens, elle se pensait loin de toute violence et de toute barbarie. Elle était pourtant dans une ville humaine, dans des pièces qui avaient, pendant un temps, servies à ses supposés ennemis. Mais elle n'y voyait que la chaleur d'un foyer.

  Maven était un dormeur silencieux. Seule chose qu'elle arrivait à lui accorder sans grogner. Il ne bougeait que très peu, un bras couvrait ses yeux tandis que le deuxième soutenait sa tête et, par la grâce de Ficios, aucun son indésirable ne sortait de son nez.

  Elle entendit les pas des Insurgés en dessous, environ une heure après le levé du soleil. Et à en croire la légèreté de ces derniers cela ne pouvait être que Kamryn et Aelis qui marchaient comme si des œufs avaient remplacé le sol.

Lyria n'osait pas bouger, elle avait gardé ses épées serrées contre elle au cas où. Mille scénarios se bousculaient dans sa tête et qui se mélangeaient à ses sentiments contradictoires. Comment pouvait-elle le détester, et lui être reconnaissante en même temps ?

  C'était dans ces moments que Lyria sentait la distance avec son Clan. Elle était avide de leurs conseils, presque égoïste de vouloir leur demander de faire ce choix à sa place. Tamrys lui manquait terriblement et elle donnerait tout pour savoir où il se trouvait. L'ignorance grimpait le long de son corps et ne semblait pas prête à la lâcher.

L'histoire du Spectre des Geôles d'Asquelor avait fait le tour des Royaumes. Aux yeux des siens, elle était une légende pour avoir sauvé un groupe d'elfe à Midjour au prix de sa propre liberté. Elle était celle qui avait dompté l'Arène. Être un Spectre, aussi terrible destin soit-il, était la preuve qu'elle était une survivante. Mais Lyria se doutait qu'elle pouvait supporter ces louanges. Encore moins, lorsqu'une partie d'elle se sentait trahie par la famille que l'Ordre représentait. Ils l'avaient abandonné aux mains ennemies sans regarder derrière eux.

Elle se leva au bout d'un débat intérieur qui parut durer une éternité et enfila les sangles qui attachaient ses épées dans son dos. La chaleur déjà étouffante. Lyria jeta un dernier coup d'œil en direction de Maven qui dormait encore d'un sommeil profond. Sa Labrys reposait contre le mur à côté de son chevet couvert par son manteau noir et son sac était étalé par terre.

La pièce à vivre était bien occupée par Aelis et Kamryn, en plus de Weldon qui était assis d'une nonchalance dont Lyria ne se doutait pas de sa part. Aelis s'attardait devant le four incrusté dans le mur qui faisait l'angle à la droite de la table. Lyria ne pouvait voir ce qu'il était en train de faire à cause des ailes écarlates qui dansaient derrière lui, mais l'odeur lui était étrangement familière. Kamryn jouait avec une boule de lumière entre ses doigts, toujours parfaitement bien assise, son visage impassible.

- Tu as bien dormi ? Weldon s'était levé du fauteuil et s'avança vers elle.

- Ça aurait pu être pire, grommela-t-elle en ne s'attardant pas sur le sujet.

Kamryn sourit.

- Tu pourrais aller réveiller les autres ? Aelis lui fit face avec une mine plus reposée que le jour précédent, ça ne va tarder à être prêt.
  Elle le fixa pendant quelques secondes, ne voulant pas remonter tout de suite. Mais elle se retourna et entreprit de monter les escaliers. Lyria ouvrit la porte de la chambre dans laquelle elle avait dormi, et elle fut soulagée de voir Maven assis sur le bord du lit en train de contempler le sol avec intérêt.

- Si tu cherches à trouver le sens de la vie, ce n'est pas en regardant tes pieds que tu vas y arriver, Lyria lui lança un regard suffisant, lève-toi.

Vitaris- The Lost Gods (complet)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant