My Crushing Wave

Chapitre 6 - Neal

Alors, tes premiers cours, Petite Nouille ? Ton semestre s'annonce intéressant ?

Nickel. Aussi passionnant que je l'espérais.

Je range mon téléphone, souriant, après avoir répondu au message que m'avait envoyé Sara. Qui dit nouveau semestre dit nouveaux cours à explorer – et en linguistique, il y a de quoi faire. De l'extérieur, on pourrait s'imaginer que c'est un domaine dont on a rapidement fait le tour, mais c'est faux. Les champs qu'il couvre sont aussi variés que passionnants : sémantique, syntaxe, phonétique, phonologie... Ce qui m'intéresse le plus, c'est d'étudier toutes les manières dont le son peut être relié à un sens. C'est si arbitraire, quand on y pense... et en même temps, pas tout à fait.

Je rentre de mon premier amphi dans une nouvelle matière, la psycholinguistique. Le professeur nous a ouvert encore une nouvelle perspective : il nous exposera ce que la recherche a déjà réussi à déterminer sur la manière dont l'utilisation du langage se traduit en matière de processus cognitifs et d'activité cérébrale. Dans l'introduction qu'il vient de faire, il nous a indiqué que nous évoquerions les pathologies qui affectent les capacités à communiquer, la manière dont les enfants apprennent à parler... J'ai hâte.

Le cours se terminait tôt – à quinze heures seulement –, si bien que j'ai un peu de temps avant mon entraînement de natation de ce soir. En plus, l'année venant tout juste de commencer, je ne suis pas encore assailli sous les travaux à rendre et les révisions en vue des partiels – même si j'ai de la chance de ce point de vue, car je retiens généralement assez vite ce que je lis. Quoi qu'il en soit, j'ai un peu moins d'une heure devant moi avant de devoir partir pour la piscine, à employer comme bon me semble.

Évidemment, si je m'écoutais, j'en profiterais pour me caler une session de mots croisés. Ce ne serait pas raisonnable, cependant. J'ai du travail. Pas pour mon bachelor, mais pour mon job étudiant. Il a le grand avantage de pouvoir être exercé depuis ma chambre – ou d'un peu n'importe où du moment que j'ai mon ordinateur avec moi – et c'est absolument parfait pour gagner quelques centaines de dollars par mois sans y engloutir trop d'énergie. Avec la baignade d'intégration des nouveaux Dolphins que Theo s'est mis en tête d'organiser, je ne pourrai déjà pas compter sur mon après-midi de demain pour faire quoi que ce soit, alors autant que je profite du temps dont je dispose aujourd'hui.

Arrivé à ma résidence, je déverrouille ma porte puis range mes affaires à côté de mon lit. Mon colocataire n'est pas là – encore en cours, probablement. Je ne le connaissais pas avant la semaine dernière : c'est l'administration de l'université qui me l'a attribué. Nous nous sommes croisés pour la première fois il y a quelques jours, au moment de notre emménagement. Il n'a pas l'air d'un grand bavard, lui non plus. Peu de temps m'a suffi à comprendre qu'il ne s'occuperait pas de ma vie, et qu'il ne s'attendait pas à ce que je m'intéresse à la sienne. Il fait partie d'un groupe de jeu de rôle, je crois. En tout cas, je peux déjà supposer que notre cohabitation se passera bien. Nous ne nous causerons mutuellement aucun problème.

À la fin de ma première année, je me suis posé la question d'essayer de me rapprocher d'un autre Dolphin pour que nous partagions une chambre à la rentrée suivante. J'ai vite abandonné l'idée. Anton habite avec Abigail, Ernest vit encore chez ses parents et Theo a son propre studio non loin du campus. Je me disais que peut-être, Caliban choisirait de s'installer avec Arabella, et que James aurait besoin d'un nouveau colocataire. Mais j'ai vite compris qu'ils resteraient ensemble cette année encore. Caliban dit que c'est parce que sa petite amie et lui veulent garder leur indépendance, mais au fond, j'ai conscience que ce n'est pas la raison principale qui le motive. Au semestre dernier, James a traversé une très mauvaise passe après sa blessure au poignet, et nous nous sommes beaucoup inquiétés pour lui ; même moi, qui ne suis pas le plus doué pour décrypter les émotions des gens, je me rendais bien compte qu'il paraissait... éteint. Plusieurs fois, en son absence, nous avons discuté des manières dont nous pouvions le soutenir. Depuis qu'il est avec Selena, et qu'il a commencé à voir une psychologue cet été, il paraît mieux, mais je sais que Caliban ne s'éloignera pas de lui tant qu'il ne sera pas certain qu'il est définitivement remis sur de bons rails.