It ends with us

Chapitre 32

« Voilà comment un Romain et un Juif devinrent amis en l'espace d'une nuit... et cela explique peut-être pourquoi je suis encore ici, deux mille ans plus tard. Je suis devenu une ombre qui ne fait que passer, tandis que lui est devenu un symbole, emblème d'un monde tourmenté par les fanatiques religieux, où chacun n'a de cesse de prononcer Son nom, jour et nuit. Mais si aujourd'hui Il s'asseyait à leurs côtés dans un bus, dans le métro ou au restaurant, beaucoup changeraient de place, remplis de mépris et de peur, prisonniers de leur obscurantisme. Physiquement, Il ne correspond pas à l'image occidentalisée dont on nous abreuve depuis plusieurs siècles. Si, par quelque miracle, Il revenait aujourd'hui, Il serait sans doute victime d'une "erreur" judiciaire résultant du profilage racial, quel que soit l'endroit où Il se trouverait sur Terre. Peut-être même serait-Il injustement jugé pour un crime qu'Il n'aurait pas commis, devenant ainsi la cible du système judiciaire et de la vindicte populaire, alimentée par les médias sociaux. Ces mêmes réseaux sociaux l'utiliseraient alors comme un martyr. Ce ne serait qu'un recommencement. »

Fogelberg était atterrée. Assis en face d'elle se trouvait un homme qui avait côtoyé le fils de Dieu, le Messie que son Peuple attend depuis des siècles. Elle essayait tant bien que mal d'assimiler cette révélation.

« Joseph ? Est-ce que... Si Jésus n'était pas le Messie, est-ce que... je veux dire, toi, tu... l'es ? » demande-t-elle, se sentant soudainement connectée à ses racines.

« Je ne pense pas, Sarah », répondit-il après un moment de réflexion, d'une voix posée. « Si je le suis, j'aurais perdu deux mille ans à attendre une réponse alors que je serais cette réponse, ce serait décourageant, et franchement déprimant », ajouta-t-il en souriant. « Non, Sarah, je ne crois pas être le Messie que ton peuple attend. Tu remarqueras que j'ai dit "je ne crois pas", car en fait je le suis peut-être. Comment le saurais-je ? J'ai réfléchi à cette question à maintes reprises. Le Messie, le Machiah, est celui qui libérera le peuple juif, possiblement un descendant du roi David. Je ne suis pas juif, mais Romain. Ça me disqualifie, non ? »

Fogelberg réfléchit un instant. « Mais Jésus ne disait-il pas descendre de David ? Ne l'a-t-on pas crucifié pour cela ? »

« En effet, c'était l'un des chefs d'accusation présentés par le Sanhédrin », confirma-t-il.

Elle continue sur sa lancée. « Toi-même, quelque part, tu as été créé par Jésus... donc cela ne fait-il pas de toi un genre de descendant de David ? »

Il sourit, reconnaissant le raisonnement de Fogelberg. « C'est un peu tiré par les cheveux. J'ai conscience que pour ton peuple, le Messie est important. Mais je ne suis pas lui. Tu cherches à voir en moi quelque chose que je ne suis probablement pas », expliqua-t-il avec sincérité.

Fogelberg lui sourit, déterminée à revenir à la charge avec d'autres arguments, espérant le convaincre qu'il est peut-être le Messie tant attendu. Cependant, elle ne pouvait s'empêcher de se perdre dans une profusion de questions sur les implications d'une telle révélation. La libération d'Israël, le destin de Jérusalem et de la Judée, tout cela semblait si lourd de sens.

« Pourquoi te cacher ? Tu pourrais apporter tellement à l'Humanité ! » demanda-t-elle, consciente que cela l'amènerait à prendre conscience de son statut de Sauveur.

« Il est impossible de révéler mon existence, » répondit-il d'un ton sans appel.

« Pourquoi ? Grâce à toi, des scientifiques pourraient, je ne sais pas, analyser ton sang pour en découvrir les particularités et en extraire un gène pour guérir des maladies comme le SIDA, le cancer, les maladies dégénératives telles que la maladie à corps de Lewy... » tenta-t-elle avec insistance.