Chapitre 19

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Joseph ne peut apporter aucun élément nouveau concernant l'homme qu'il avait pourchassé. De dos, il n'y avait aucun moyen de l'identifier comme étant son agresseur. Depuis qu'elle avait découvert son secret, Joseph était devenu plus silencieux, et Fogelberg brûlait d'envie de lui demander des informations supplémentaires. Cependant, elle se retenait, consciente que le danger qui le menaçait, quel qu'il soit, pouvait l'obliger à changer d'identité et à disparaître.

« Tu n'es pas obligé de dire à ton référant que je suis au courant. Je peux garder ce secret pour moi. Tu n'as pas à quitter ton école et tes élèves », lui dit-elle doucement.

« Je ne suis pas inquiet. J'ai confiance, je sais que tu ne diras rien », répondit Joseph.

« Alors pourquoi es-tu si silencieux ? », insista-t-elle.

Joseph prit une courte pause avant de répondre, ses yeux cherchant quelque chose dans le lointain. « Que faisais-tu à l'hôpital ? Je croyais que tu étais une droguée ou une prostituée », déclara-t-il sans détour.

La réaction de Fogelberg ne se fit pas attendre. « QUOI ?! », s'exclama-t-elle, choquée.

« Ta tenue n'avait rien de celle d'un policier. Ton mini short à fleurs, ton top à bretelles, tes vêtements sales. Tu avais des cernes sous les yeux. Tu tremblais, tu avais des traces de piqûre dans le bras. Bref, la vision que tu donnais était celle d'une junkie ramassée dans la rue », expliqua Joseph.

« Merci, ça fait plaisir ! », rétorqua-t-elle sèchement. « Sache que la veille au soir j'avais été victime d'une tentative d'enlèvement. J'enquête sur la mort de la femme trouvée dans le parc en face de chez toi. J'ai fait une déclaration à la presse il y a deux jours. J'ai tenu des propos qui ont dépassé le cadre de cette entrevue. J'ai été mise à pied. Cela aurait pu aller plus loin, mais mon supérieur a pris sur lui et m'a collé deux semaines de congé. Avant-hier soir, j'ai voulu aller chez lui le remercier de ce qu'il avait fait pour moi. J'ai pris un taxi... et il se trouve que celui qui conduisait venait de tuer le chauffeur. J'ai pu m'échapper, mais j'ai fini à l'hôpital. Le lendemain matin, j'ai fait ta rencontre, tu te foutais de ma gueule alors que j'étais encore sous le coup des médicaments et que je ne tenais pas debout, car je venais de m'enfuir de l'hôpital ».

Joseph sourit en réponse. « Quelle aventure ! On ne doit pas s'ennuyer tous les jours avec toi. Alors ? Que faisons-nous ? Tu veux sortir manger un morceau ? Tu veux aller dans un bar à flics ? On écume les rues à la recherche de ton agresseur ?

Fogelberg accepta l'idée de manger quelque chose, mais elle était catégorique concernant le reste. « Je veux bien aller manger quelque chose. Pour le reste, malheureusement, je ne veux pas que tu y sois mêlé », conclut-elle avec fermeté.

Ils se rendirent dans un endroit cosy, aux lumières feutrées, où un ensemble de jazz jouait sur une petite scène au fond de la salle. Fogelberg saisit l'occasion pour sceller son accord de confidentialité en ouvrant son cœur à Joseph, pour la première fois depuis qu'elle avait rencontré le Doc à l'Académie. Le seul au courant de son passé.

Joseph la regarda avec empathie et prit doucement sa main dans la sienne. Il prononça alors les seuls mots qu'elle ne s'attendait pas à entendre, ceux qu'elle refusait et ne supportait pas : « Il faut pardonner. »

À ces mots, elle se crispa immédiatement, mais il garda sa main dans la sienne, la réchauffant d'un contact chaleureux. Pouvait-elle vraiment pardonner ? Pardonner à son père ? À sa famille ? La question la hantait. Dans quelle mesure la colère et la haine faisaient-elles désormais partie d'elle-même ? Elle avait choisi de rejoindre la police pour trouver un certain réconfort dans les lois, les règlements, là où la justice était rendue. D'une certaine manière, c'était aussi une façon d'obtenir justice pour elle-même, par procuration. Son père et sa famille avaient rejeté la culpabilité sur elle. Pour eux, son refus de se conformer aux traditions représentait une trahison envers la famille et jetait le déshonneur sur leur nom. Elle était coupable, coupable d'avoir simplement dit non.

It ends with usOù les histoires vivent. Découvrez maintenant