A Fleur de peau et de sang

33. Tu tomberas

Je me déteste pour ce que j'ai fait.

C'est la première pensée qui me vient à l'esprit alors que je me réveille dans les draps, où il me semble me rappeler que Red m'y a allongé. Ils sont chauds, doux et son odeur plane. Cela ne m'aide pas à oublier les événements de la veille. Je me suis donnée sans résistance, je l'ai suppliée. Mon comportement est inadmissible. Tous les feux de l'enfer pourront me brûler, je l'aurais mérité.

Je ne devais pas ressentir quoi que ce soit pour cet homme, ce démon, ce monstre. C'est l'enfer qui règne en moi.

Un sentiment étrange s'instaure quand je remarque la déception de ne pas trouver Red près de moi. Je m'assois dans le lit. Je n'essaye pas de mettre de l'ordre dans mon esprit, rien ne changera. Je suis aussi instable que l'instabilité elle-même. Il va falloir que je fasse avec. Les souvenirs de la veille hantent ma peau. Je ne regrette rien et c'est là tout le problème.

Il faut que je me débarrasse de lui. Je suis déjà allée trop loin, j'ai franchi toutes les limites.

Je me lève dans le but de déguerpir de cet endroit au plus vite. J'ouvre les rideaux de la chambre, découvrant qu'il fait bien jour. J'ai cours aujourd'hui. Si j'y vais, mon esprit sera occupé. Je porte un t-shirt à Red, il me l'a prêté après... Bref, il est préférable que je ne me remémore pas les faits. Une des portes de la chambre à Red mène à une salle de bain. J'y fonce.

Je demeure un long moment sous l'eau chaude, en sachant que ça ne lavera aucun de mes péchés. J'en ressors trempée et enroulée dans une serviette. J'ai besoin de ma robe pour rentrer chez moi, je devine qu'elle est restée là où... En passant par la chambre de Red, stupéfaite, je constate un petit tas d'habits pliés sur le lit. Ils m'attendent. Je devine aisément que Red me les a acheté et déposé ici pour que je les mette. Je ne compte pas refuser ou m'offusquer pour ce geste. Au contraire, mon cœur s'affole et mes larmes menacent de rouler sur mes joues. Pourquoi fait-il ça ? Chacun a son rôle et il doit être le méchant.

Le cœur chargé d'émotion, j'enfile mes nouveaux habits. Il a choisi un baggy taille basse et un haut dos nu à bretelle. Mon cœur s'emballe. Ses lèvres et ses mains contre mon dos... Je chasse cette pensée. Pour y mettre fin, je quitte la chambre.

Le penthouse me parait moins effrayant. Je tombe rapidement nez à nez avec un corps imposant qui ne m'a pas encore révélé tous ses mystères, mais je le connais par cœur. Red se dresse devant moi dans le salon.

- Bonjour, Cerise.

Sa voix éveille chacune de mes cellules, elles convergent vers lui. Mes yeux se dirigent d'elles-mêmes comme des coupables aux lèvres de Red. C'est la seule part de lui qu'il ne m'a pas donné et qu'il n'a pas prise chez moi. Ce détail a tout l'effet inverse que j'espérais, il attise le feu.

Red porte son costume habituelle, cette fois, teinté de noir, même sa chemise. L'heure est sombre. Son visage est pâle, il n'a pas dormi. Il a l'air tourmenté. Ces paroles d'hier soir me font encore trembler.

Je veux tout lui prendre et lui arracher.

A cette pensée, je comprends l'urgence que je m'éloigne de cette tentation. La détresse que j'éprouve commence à se manifester. Red vient à mon secours d'une manière inattendue.

- Nous ne sommes pas obligés de parler. Si tu le souhaites, tu peux mettre tes chaussures et vite filer. Je te promets de ne pas te rattraper.

Il fait cette proposition pour moi, il me donne un échappatoire. Je lis pourtant dans son regard qu'il voudrait que je reste et que je ne le quitte jamais.

- Pourquoi ? arrivé-je à articuler.

- Pour que tu reviennes.

N'est-ce pas philosophique ? Me laisser partir pour que je revienne. C'est beau et je pourrais être charmé. Je le suis à contre-coeur.