Chapitre 52

23 1 0
                                    

Ian : 

Ça fait des heures que Finn est parti, et pourtant, je n'arrive pas à fermer l'œil. Je me retourne encore et encore dans mon lit, incapable de disperser mes pensées. Maintenant que je vais vraiment essayer de me soigner, j'ai l'impression que je dois me pencher sur toutes les autres interrogations laissées en suspens. En fait, je m'en veux, c'est à cause de moi si ça n'avance pas plus vite. Dans deux semaines, nous serons en vacances, et Finn ne cesse de me dire qu'on agira vraiment à ce moment-là. Pourtant, je n'arrive pas à attendre, et depuis que j'ai pris ce rendez-vous, c'est comme si tous mes autres problèmes avaient enflé. Nous sommes tombés sur Élias, et entendre sa voix à réveiller quelque chose, mais je ne sais pas vraiment quoi. Des questions ? Le mystère, l'impatience de le résoudre ? Et bien sûr, l'incompréhension qui va avec. Qui est cet homme pour mon père ? Dans quoi sont-ils impliqués pour que Sarah ait disparu ? Pourquoi ne me contacte-t-elle pas après ces mois d'absence ? Je ne crois pas à cette histoire de mutation, il s'est passé quelque chose. La culpabilité revient à l'assaut, je me sens égoïste de ne pas l'avoir cherché activement au lieu de pleurer sur mon sort. Un stress post-traumatique ? Ce n'est pas une excuse pour avoir abandonné la gendarme, la seule femme qui m'a témoigné un véritable amour maternelle. Plus j'y pense, plus elle me manque. C'est un cercle vicieux, qui ne fait qu'alimenter mon angoisse. J'ai de plus en plus peur que ce soit quelque chose de plus grave qu'on n'essaie de me cacher. Après tout, je n'ai plus jamais eu de nouvelle de ce poste de police, ni de la gendarmerie, et le commissaire qui m'a annoncé la nouvelle a toujours été injoignable. Seul dans la pénombre de ma chambre, je me fais mille scénario sur la situation de Sarah, je m'imagine des centaines de scènes. Mon état d'esprit d'hier soir, entièrement consacré à l'amour, me paraît risible. Comment puis-je m'autoriser le bonheur alors que Sarah agonise peut-être quelque part ? Et pourtant le souvenir de la veille réveille mes désirs. Le contraste que mon esprit et mon corps m'imposent me déchire. Je sais déjà que je ne vais pas beaucoup dormir cette nuit. 

J'ai rejoint Finn dans la cour ce matin, l'esprit embrumé par la fatigue. Le voir m'a fait plaisir, mais je n'arrive pas à me défaire de cette morosité pesante. De plus, j'avais oublié les regards et les réflexions qui nous suivent constamment. Heureusement que ce n'est qu'une matinée rallongée. Lorsqu'enfin nous passons tous les trois le portail vers 13h30, j'ai l'impression d'avoir vécu plusieurs millénaire. J'écoute à peine la discussion que tiennent Finn et Anna, jusqu'à ce que le mot psy ressorte. 

- " Ah bon ? C'est super, j'espère que ça se passera bien pour la petite alors. 

- Oui, et puis, Ian va aussi la consulter. 

- Ouah, c'est un cap de passé, alors ?! s'exclame-t-elle à mon intention. 

- Euh... oui. Mais... 

- Qu'est-ce qu'il y a ? "

J'hésite. J'en ai marre de marcher sur des œufs avec Anna alors que je commence à la considérer comme ma meilleure amie. Est-ce que, comme Finn me l'a recommandé, je devrais tout lui raconter, à elle comme à Laurie ? 

- " Je dirais qu'un cap de passé veux dire 10 autres interrogations de retrouvées, finis-je par répondre.

- Qu'est-ce qui te tracasse autant ? Si un mec t'emmerde, je vais lui foutre un coup dans les couilles et on en parle plus. "

Je souris devant la témérité feinte d'Anna. 

- " Tu ferais la même avec une fille ? " s'empresse Finn de la taquiner. 

Je vois bien qu'il essais de changer de sujet pour m'aider à m'échapper de la situation. Mais d'un autre côté, je refuse de fuir. Alors que la jeune fille s'attaque à mon copain à grand cri de "tu veux essayer pour voir ?" et autres menaces, je l'observe un instant. Anna est honnête, derrière son sourire se cache des cicatrices à peine refermées que j'ai vite deviné dans le regard de Laurie. Elles ont toutes les deux vécu, elles comprendront. Mais est-ce que ce n'est pas trop tôt ? Malgré mon esprit qui me cri de reculer, de me taire, de rester isoler pour me protéger, mon cœur me hurle d'aller vers elles. Brusquement, le hurlement prend le dessus sur le cri, et je lance sans vraiment réfléchir : 

Un Océan Dans Les YeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant