Lundi
7 novembreJ'ai passé le week-end enfermée chez moi, à ranger les derniers cartons, écrire et faire du sport. Il fallait que je m'occupe l'esprit au maximum pour éviter de penser à mon mauvais karma. Le sort s'acharnait sur moi depuis quelques temps. Qu'avais-je fais dans ma vie antérieure pour mériter ça? Découpé des chatons? Brûlé un village? Ou pire, brûlé des livres?
Je monte les dernières marches menantes au troisième étage tout en redoutant de croiser Satan en personne.
Il faut croire que je n'ai pas découpé assez de chatons, car le Seigneur m'offre la possibilité de me rendre jusqu'à mon bureau en paix. Cela me donne presque envie d'aller à la messe ce dimanche pour le remercier. Cependant, je change rapidement d'avis en apercevant Monsieur Dugas s'approcher.
— Dans mon bureau! siffle-t-il froidement.
Je crois que l'univers a vraiment une dent contre moi. Céline, que je n'ai même pas eu le temps de saluer, a l'air navrée, mais sûrement pas autant que moi...
Je prends juste le temps de déposer mon sac avant de le suivre jusqu'à son bureau, la boule au ventre. J'ai comme l'impression que me torturer est devenu la nouvelle passion de mon patron. Pas un jour ne passe sans qu'il ne me convoque pour me rabaisser ou critiquer mon travail. S'il fait ça avec tous les nouveaux employés, cela ne m'étonne pas que des postes restes vacants.
***
J'ai passé mon week-end enfermé à attendre que Mademoiselle Muller sorte de chez elle pour pouvoir lui parler. Je préférais ne pas aller directement chez elle pour ne pas donner l'impression d'empiéter sur sa vie privée. Mais, étant restée cloîtrée chez elle, j'ai attendus son arrivée au bureau avec impatience pour me mettre au clair avec elle.
— Bonjour!
Face à moi, Mademoiselle Muller paraît surprise.
Quoi? Elle me croit incapable d'être poli?
— Bonjour, se contente-t-elle de répondre en retour.
— Asseyez-vous je vous prie!
Je m'assoie à mon tour et entre directement dans le vif du sujet.
— Vous vous doutez sûrement de la raison pour laquelle je vous ai fait venir.
— À vrai dire...non, avoue-t-elle.
— J'aimerai qu'on se mette d'accord par rapport à ce qu'il s'est passé samedi.
Je crois percevoir un voile de panique sur son visage avant qu'elle ne demande:
— Qu'attendez-vous de moi exactement?
— Que vous n'ébruitiez pas certaines informations. À commencer par mon adresse!
Était-ce mon imagination ou a-t-elle un sourire au coin des lèvres?
— C'est tout?
— Je veux aussi que vous taisiez toutes infos personnelles. L'existence de ma fille en fait partie.
Je préfère garder mon autorité, et l'image du père célibataire n'est pas compatible avec.
— D'accord!
D'accord? C'est tout ce qu'elle a à dire?
Je trouve ça louche. L'expérience m'a prouvé que les femmes sont vicieuses. Qu'elles ont toujours une idée derrière la tête. Or, Mademoiselle Muller n'essaie même pas de me faire du chantage, de me soutirer de l'argent, de demander une augmentation ou quoi que ce soit.
— Vous acceptez bien facilement je trouve.
Elle me répond du tac au tac:
— Eh bien, j'ai beau ne pas comprendre votre raisonnement, je le respecte. C'est votre vie privée, pas la mienne. Je ne suis pas là pour lancer des rumeurs et, sans vouloir vous vexer, je pense que le fait que vous soyez le père d'une petite fille n'intéresse absolument personne ici.
J'hausse les sourcils. Est-ce vraiment la même personne qui est partie en pleurant vendredi?
Je ne peux m'empêcher de sourire face à son audace et d'ajouter:
— Vous avez plus parlé en trente secondes qu'en une semaine!
Elle me fusille du regard. Apparemment, elle n'a pas apprécié la remarque et c'est tant mieux.
— Si vous le permettez, je vais me mettre au travail, dit-elle.
C'était plus fort que moi, je veux la taquiner:
— Je vous en prie! Il serait dommage que vous preniez encore plus de retard.
Et elle n'a jamais eu l'air aussi furieuse qu'à l'instant où elle quitta la pièce.
***
Je rejoins mon bureau et lâche un long soupire en m'asseyant. La semaine commence tout juste et je suis déjà exténuée.
Lorsque Monsieur Dugas avait affirmé qu'on devait se mettre d'accord, j'ai d'abord cru qu'il allait me forcer à déménager, ce qui aurait été un total abus de pouvoir de sa part. Je n'y suis pour rien si on se retrouve dans cette situation. D'ailleurs, je me demande même ce qu'il fout dans un appart pareil? Ce mec est millionnaire! Il peut se payer une villa aux pieds de la Tour Eiffel avec tout le pognon qu'il a!
Et quand il m'a demandé de ne pas dévoiler son adresse, ce fût plus fort que moi. J'ai repensé à Céline qui s'était gentiment proposée de brûler son domicile. Sauf que je n'ai aucune envie qu'elle brûle le mien au passage. En plus, si c'était à faire, je préférerais m'en charger moi-même!
En parlant de Céline, celle-ci arriva pour la pêche aux infos.
— Qu'est-ce qu'il te voulait cette fois?
— Il m'a ordonné de...
Je m'apprête à tout déballer, mais me retiens de justesse.
— ... me mettre à jour rapidement.
— Pfff! Je ne sais pas ce qu'il a contre toi, mais depuis que tu es arrivée, tu es devenue son nouveau bouc émissaire.
— Et c'était qui avant moi?
— Celle que tu remplaces. À croire qu'il a une dent contre les responsables marketings.
— Si j'avais su, j'aurais demandé à être affectée à un autre poste.
— Et moi alors? se plaint Céline en faisant semblant de pleurer. Tu m'abandonnerai sans aucune pitié?
— Non! Je t'embarque avec moi loin de cet enfer.
Nous rions avant de reprendre notre sérieux. Avec les fêtes de fin d'année qui approchent, nous avons du pain sur la planche! J'ai pour mission de trouver le meilleur moyen de mettre en avant les livres, contacter le service de presse et bien d'autres choses encore. Quant à Céline, elle doit présenter au mieux les nouveautés sur les réseaux et sur le site internet. Noël représente le chiffre d'affaires le plus important. Nous avons plutôt intérêt à ne pas nous louper!
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My Red
RomanceÀ vingt-six ans, Joyce décide de déménager à Paris afin de vivre de sa passion pour les livres. Mais lorsqu'elle arrive à la maison d'édition Dugas dans laquelle elle est censée travailler, Joyce reçoit un accueil glacial de la part du chef éditoria...