CHAPITRE 39

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    Je tente de la suivre, mais le personnel soignant m'en empêche. Je ne peux qu'observer le brancard disparaître derrière les portes du bloc opératoire.

Inconsciente, Joyce ne bouge toujours pas et se retrouve maintenant reliée à un masque à oxygène. Derrière elle, les roues du brancard étalent une traînée de sang sur le sol blanc.

    Mes oreilles bourdonnent depuis que j'ai entendu les médecins prononcer des mots tels que « séquelles au cerveau » et « hémorragie interne » qui ne me rassure en rien.

    J'ai l'impression que mon monde s'écroule sous mes yeux. Je ne peux pas la perdre! Je ne me sens pas capable de revivre ça une seconde fois. Je ne pourrai jamais combler un vide aussi immense que la simple chaleur de son sourire. Avant de la rencontrer, je ne vivais que pour Alice. À présent, je me réveille chaque matin en étant impatient d'aller au travail, rien que pour passer du temps avec Joyce. Le simple fait de la voir me fait me sentir plus léger et à ma place.

    Alors elle doit vivre! Elle ne peux pas me laisser! J'ai trop de projets pour nous!


    Après être resté plusieurs minutes immobile face aux portes du bloc, je pars m'installer sur une chaise dans le couloir d'en face et dépose Alice sur mes genoux.

Je dois m'asseoir. Mes jambes me portent à peine. J'ai la tête qui tourne. Tous mon corps tremble.

    Le regard dans le vide, je fixe mes mains rouges de sang séché.

    Son sang. À elle.

    Je ferme les yeux face à cette vue insupportable, et ne peux m'empêcher de me rappeler que tout ceci est de ma faute.

    Et si j'avais engagé plus de gardes du corps?

    Et si je l'avais tenue à l'écart de cette histoire?

    Et si j'avais été dans ce parc à sa place?

    Et si...

    Les yeux toujours clos, je balance ma tête en arrière jusqu'à ce qu'elle heurte le mur.

    Oui. Tout est de ma faute! Joyce n'aurait jamais dû avoir à faire bouclier de son corps pour protéger ma fille! C'était mon rôle à moi! Pas le sien! C'est à moi de les protéger!

    Un soupir m'échappe, lorsqu'une petite main posée sur mon épaule me sort de mes regrets. J'ouvre les yeux sur Alice, le visage inquiet.

— Joyce va revenir? Hein?

— Oui, lui réponds-je sans grande conviction.

    Je ne trouve même pas la force de la rassurer. Il y'a quelques heures j'étais persuadé de rentrer chez moi avec Joyce à mon bras, pour lui ôter sa robe et lui montrer à quel point je l'aime.

    À présent, je me retrouve assis, face à un bloc opératoire. Joyce n'est pas à mon bras, mais entre la vie et la mort.

— Alors pourquoi tu pleures papa?

    Je cligne des yeux à plusieurs reprises et sens des larmes couler.

Je pleure? Depuis quand n'ai-je pas pleuré?

    Je veux instinctivement porter mes mains à mes joues, mais me ravise en voyant l'état de celles-ci, et laisse retomber mes bras en soupirant.

— Papa? m'appelle Alice d'une voix inquiète.

    J'ai la gorge nouée. Aucun mot ne sort. Je me contente donc de l'enlacer pour tenter de la réconforter du mieux que je le peux.

    Nous restons ainsi, silencieux, durant ce qui me semble être une éternité, jusqu'à ce qu'Alice se redresse pour me demander:

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