CHAPITRE 12

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Lundi
21 novembre

    Je traverse l'accueil et emprunte l'escalier de service. Le contenu de mon estomac menace de traverser mes lèvres à tout moment.

    J'ai réfléchi tout le week-end à ce que je devais faire. Au début, ne pas déposer mon manuscrit était une évidence. C'était un moyen de lui tenir tête. Un complexe de fierté. Mais après réflexion, j'ai compris que c'était sûrement une opportunité qui ne se présenterait pas deux fois.

    Si mon patron critique mon manuscrit en toute objectivité, je saurais ce qui est à changer ou non. Après tout, il s'y connaît. Il n'est pas éditeur en chef et directeur d'une maison d'édition pour rien.

    Après avoir monté les trois étages d'un pas lourd, j'arrive dans l'espace de travail. L'étage est vide, ce qui ne m'étonne pas étant donné que je suis partie vingt minutes plus tôt pour être sûre de ne pas croiser Monsieur Dugas. Même le soleil se lève à peine.

    Hésitante, je reste de longues minutes devant la porte sur laquelle est inscrit « Monsieur Dugas Nicolas » en lettres métalliques, avant de me décider à l'ouvrir. Comme d'habitude, l'intérieur est parfaitement rangé. Rien ne dépasse.

    Ça donnerait presque envie de foutre le bordel pour le faire chier!

    Je traverse la pièce et m'arrête devant le grand bureau en verre situé face aux immenses fenêtres pour y déposer mon manuscrit. Celui-ci se compose d'exactement deux cents soixante-trois feuilles, soit cinq cents vingt-six pages à lire. Sûrement mon histoire la plus aboutie. Le résultat de plus de deux ans d'imagination, de recherches, d'écriture, de réécriture, de lecture, relecture, correction, remise en question et j'en passe.

    En y réfléchissant bien, tout ce travail mérite-t-il d'être lu par cet homme? Pour l'instant, personne ne l'a lu. Je n'ai jamais eu le courage de le remettre entre les mains de mes proches. Pour un écrivain -même amateur-, déposer un manuscrit c'est comme déposer une partie de son âme.

    Je m'en mords les doigts. Dois-je vraiment le laisser là?

    Le stress monte. Je tends le bras vers le tas de feuilles, mais n'eut même pas le temps de l'atteindre qu'une main s'aplatît violemment dessus.

— Il n'en est pas question! entends-je derrière moi.

    Je déglutis et pivote sur mes talons. Mes yeux rencontrent deux iris brunes à seulement quelques centimètres de mon visage.

— Vous pouvez y aller! J'ai de le lecture qui m'attend, affirme-t-il, un sourire aux lèvres.

    À l'entendre, je pourrai croire qu'il va prendre un malin plaisir à dévaloriser mon travail, ce qui ne me rassure pas du tout.

    La panique et la tension qui planent dans cette pièce finissent par m'oppresser au point que je la quitte, le cœur au bord des lèvres.

   Mon destin se tient maintenant entre les mains de cet homme.

***

    Dès qu'elle passe la porte, je m'empresse de m'installer pour lire ce fameux manuscrit.

    Je ne comprends toujours pas pourquoi elle ne m'a pas fait du chantage lorsqu'elle en a eut l'occasion. Après tout, elle aurait pu me forcer à éditer son roman en échange de quoi, elle garderait secrètes toutes informations sur moi, comme je lui avais demandé. Elle aurait pu, mais elle n'en avait rien fait.

    Pourquoi?

Je connais plus d'une personne qui ne se seraient pas gênées de le faire.

    Pouvais-je lui faire confiance?

    Je reporte mon attention sur la pile de feuilles qui est plutôt épaisse. Cela va me prendre un certain temps, mais quelque chose me dit que ça en vaut la peine.

    Je tourne la première page sur laquelle est inscrit « Fairlan House » en grosses lettres et me plonge dans le premier chapitre.

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