Laure était rentrée en taxi, tous frais payés par la Maison BARNOY.
Comme elle avait quarante cinq minutes d'avance sur ses horaires habituels, elle trouvait Mimi sa mère, tous cheveux hirsutes, totalement affolée dans le couloir. Celle-ci sortait de la salle de bain clopin-clopant.
‑ Tu m'as fait une peur noire, je me faisais les ongles rouge sang ! Comment ça se fait que tu rentres si tôt, ma chérie ?
La ceinture de son kimono en satin traînait au sol comme un serpent hagard, elle enlevait aussitôt ses mouchoirs d'entre ses doigts de pieds et attendait une explication.
Laurette expliqua ses achats de Noël pour le compte de la joaillerie.
‑ Ah, oui ? Et c'est ton job à toi, de faire ça ? Et s'il t'était arrivé quelque chose dans les rues de Paris?
Laure ne put s'empêcher de s'esclaffer.
‑ Est-ce que je te demande pourquoi tu mets du vernis aux pieds en plein hiver ? Que veux-tu qu'il m'arrive ? Je te dis que je suis rentrée en taxi.
Laurette avait les bras encombrés par son gros panier chargé de chocolats.
Des pères noël, des lapins, des boîtes de chocolats, toutes sortes de sucreries en veux-tu ? en voilà ! Et même des petits Jésus en pâte à sucre.
‑ C'est pour les collègues, cadeau du magasin !
Elle affichait une mine rêveuse, candide et se dressait sur les pointes des pieds, à la limite de l'apesanteur.
Mimi n'y prêta à peine attention, elle se fit rapidement un chignon et craqua une barrette entre ses doigts.
Quelque chose la chiffonnait.
‑ Et pourquoi qu'ils s'y prennent si tard ? D'habitude ce genre d'achat de décoration est programmé avant l'été, nous au Cabaret, c'était en Juin qu'on regardait les sites et hop en Juillet, c'était fait, et pour beaucoup moins cher que les grands boulevards.
‑ C'est différent chez BARNOY, le patron a perdu sa tante, ils ne pouvaient pas allumer les guirlandes comme tout le monde sur la place, ils étaient en deuil.
Mimi restait plantée là, l'air dubitatif. D'un seul coup son regard s'illuminait.
‑ Ta thèse ne tient pas, le BARNOY, il a programmé la mort de sa tante alors ? Tu me dis qu'il n'a rien commandé en juin alors que les autres ont commandé, ceux de la place ?
‑ Oui, c'est ça.
Laure ne sut que répondre. C'est vrai. Pourquoi n'ont-ils pas acheté la décoration comme tout le monde en Juin, identique aux autres années. D'ailleurs, ce sont les prestataires, eux-mêmes, qui se hâtent pour décorer les boutiques de luxe, pas une simple employée.
- Bizarre, effectivement. Je n'y avais pas pensé, c'est donc qu'ils n'avaient peut-être pas l'intention d'arriver jusqu'en novembre. Peut-être même qu'ils pensaient vendre avant. Une faillite, une liquidation totale, la banqueroute de BARNOY?
Mado avait donc raison ?
Elle restait plantée dans le couloir, médusée. BARNOY était au bord de la fermeture sinon comment expliquer ce sursaut de dernière heure ? Ils avaient voulu marquer le coup de Noël pour éviter qu'on ne parle trop d'eux en négatif. Laurette était dépité.
Pourquoi n'avait-elle rien vu venir ?
‑ Ne te torture pas, c'est bien au-dessus de toi tout ça,...
Il y eut un long silence.
‑ Et quoi d'autre de ta journée, ma chérie?
Elle était si désemparée de voir sa fille se morfondre alors que tant de choses lui échappaient.
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De cœur ou de carats
RomanceLaure Minois, tout juste recrutée au sein de "La Maison BARNOY" paraît peu ambitieuse en acceptant une place à l'atelier plutôt qu'au showroom. Pourtant, elle sera vite remarquée par la direction de la joaillerie de la Place des Dômes. Son ascensio...