Je me réveille, les yeux dans le vague. Je suis sur un matelas mou, mais confortable. Je me redresse, perdue. Où suis-je?
Tout me reviens progressivement: quand j'ai bu la boisson, les adieux d'Anna, ma dispute avec les filles...
A ces souvenirs, je me rappelle que je dois être dans Lyon. Je bondis de mon lit et me précipite à une fenêtre: on voit la Saône et quelques arbres. Il n'y a aucun bruit, à part celui des oiseaux qui chantent. Je me demande quelle heure il peut bien être. Est-ce que je passe à la télévision en ce moment même?
Je prends ma tablette. Il est 9h56 du matin. J'ai du dormir extrêmement longtemps, il est tard. J'examine mon appartement: il est assez classique, à part le fait qu'il y a une grande télévision. Je visite la salle de bain: elle est munie d'une petite baignoire, située en face d'un lavabo. Je constate également qu'il n'y a pas de toilettes dans le salle de bain: ils se trouvent dans une autre petite pièce, qui fait environ le quart de la salle de bain.
Le salon, quant à lui, est composé d'un canapé avec ce qui semble être une petite table. Des fleurs sont même posées dessus.
La cuisine, qui se trouve en face de ma chambre, comporte un frigidaire, des plaques de cuisson qui sont plutôt modernes—elles semblent ne pas produire de feu pour chauffer les aliments—, des placards où sont entreposés des conserves, et un meuble étrange que je ne connais pas.
Ma chambre est petite, avec un bureau, un placard, une bibliothèque où sont placés des livres anciens tels que Harry Potter, les Seigneur des anneaux, les Misérables, Germinal... Une lampe pend également au plafond.
Assise dans le salon, je consulte ma tablette: il n'y a qu'un seul candidat qui a abandonné Nathan. Je ne l'ai vu que quelquefois, et il tremblait come une feuille en jetant des regards angoissés tout autour de lui. En somme, ce n'est pas étonnant qu'il ait abandonné.
Je consulte les profils de Maya, Sasha puis Déva. Aucune d'elles n'a abandonné. Je me demande ce qu'elles sont en train de faire. Explorent elles Lyon? Restent elles dans leur appartement? Cherchent elles de la nourriture, ou quelqu'un? Peut être qu'elles passent à la télévision en ce moment. Je n'en ai aucune idée.
Je décide de sortir de cet appartement: je commence à le trouver étouffant, oppressant. Je m'apprête à me lever pour préparer mes affaires, mais la télé s'allume, et le noir laisse place à Simon Lotte:
— Chers participants. Vous voilà enfin à Lyon! J'espère que tout se passe bien pour vous en ce moment, que vous avez trouvé vos marques. Je tiens à vous rappeler que vous ne devez pas resté cloîtré dans un appartement pendant toute la durée de la compétition en espérant gagner, car vous pourrez compter sur nous pour vous envoyer quelques... complications. De plus, comme vous le savez sans doute, nos techniciens responsables de la ville choisie se chargent de rajouter des petites surprises. Cette année ne fera pas exception. Vous ne tarderez pas à découvrir cette surprise, d'ailleurs, puisqu'elle arrive demain! Sachez que nous en sommes très fiers! Cela fait plus de cinq ans que nous la préparons, elle sera grandiose! N'oubliez pas de rester dans un bâtiment fermé la nuit! Ah, et j'oubliais: quand on voit Lyon depuis Fourvière, c'est magnifique! dit Simon Lotte en faisant un clin d'œil à la caméra. Sur ce, je vous souhaite une bonne journée!
La télé s'éteint, et je vois mon reflet, bouche bée. Je ne savais pas qu'il y avait des annonces! Ils doivent couper les caméras pendant ce temps. Quant à la surprise qui s'annonce, je ne sais quoi penser. Dois-je me rendre à Fourvière? Sûrement pas. Je pense que c'est un piège pour qu'on se batte. Je laisserais les autres y aller, merci bien.
Prise au dépourvu, je mets dix minutes à me convaincre de sortir: et si quelque chose m'attendait dehors? Oh, et puis tant pis: je n'ait pas intérêt à rester à l'intérieur, de toute façon.
Je fouille les meubles pour trouver des objets qui pourraient m'intéresser. Je tombe sur une carte de Lyon, des jumelles et une lampe de poche. J'y ajoute quelques fruits et mes affaires, fourre le tout dans mon sac et part. Quand je met main sur la poignée, celle ci est glacée. Je doute: et si c'était une mauvaise idée, de sortir? Après tout, Simon Lotte n'a pas précisé combien de temps il fallait rester à l'intérieur pour s'attirer des ennuis... Et puis, où je vais aller?
Une voix lointaine et aventureuse me souffle d'aller à Fourvière. Je la balaye sans hésitation, avant de me demander si ce ne serait pas mieux. Après tout j'aurais une meilleure vue de Lyon en haut. Je regarde par la fenêtre si par hasard on la voit, mais rien. En face, il y a juste des bâtiments de plus en plus en hauteur à cause d'une sorte de colline. Une colline! La cathédrale de Fourvière est en hauteur! Motivée, je sors de l'appartement et dévale les marches. De dehors, je vois que mon appartement est un bâtiment Haussmannien. C'est beau. Je cherche la rue: mercière. Je me repère sur la carte, et remarque que je ne suis pas loin du pont Alphonse Juin. C'est parfait. Grâce au plan, j'emprunte la rue du petit David pour débarquer sur les quais. Je n'avais pas vu que la Saône était aussi large! Je reste quelques minutes figée devant ce spectacle, avant de me ressaisir et de prendre à droite vers le pont.
Je pose d'abord un pied sur le pont. Il semble solide, mais je ne suis pas rassurée. Je souffle un bon coup, puis pose le deuxième pied sur le pont. Rien ne se passe. Je ris de ma propre bêtise. Comment ai-je pu croire que le pont ne me tiendrais pas? Je fais à peine 45kg, un poids plume pour mon âge, à cause du manque de nourriture.
A fur et à mesure de mon avancée, je me décrispe. Je m'arrête même un instant pour profiter de la vue qui s'offre à moi. Je suis émerveillée qu'il y ait autant autant de végétation. Dans ma ville, ce n'est que du bêton. Partout. Ici, les oiseaux chantent. Chez moi, on ne les entend pas.
Je soupire de soulagement lorsque je descends du pont. J'ai eu beau être rassurée, je préfère quand même la terre ferme. Je tourne à gauche, pour prendre la direction du palais de justice.
Ce dernier est impressionnant. Il me toise de haut avec ses immenses colonnes. Selon mes connaissances, on s'y rendait pour juger les criminels. Je tente d'y entrer, mais la porte est fermée.
A gauche de la cathédrale, j'oblique dans la rue de la bombarde. La carte m'indique que je suis à présent dans le "vieux Lyon". Effectivement, les bâtiments sont plus anciens que ceux que j'ai vus jusque là. Il y a de nombreuses boutiques, toutes fermées. Au bout de la rue de la bombarde, je vois un chemin qui monte: c'est la montée du chemin neuf. Dans mon sac, je sens la tablette vibrer. Quelqu'un a abandonné? Malheureusement non, mais ma tablette me "félicite d'aller à Fourvière, c'est un très bon choix!". Je frissonne. Elle a deviné où je comptais aller? En consultant un instant ma tablette pour regarder ma position exacte, je me rends compte du silence qui m'entoure. Pendant quelques instants, j'imagine la foule de touristes passer autour de moi en riant, discutant, mangeant... Et je me sens seule.
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Citygames
Bilim KurguImaginez vivre dans une société où tout est organisé hiérarchiquement. Imaginez vivre tout en bas de l'échelle de cette société. Imaginez que le gouvernement vous propose tout les ans un jeu pour vous sortir de la pauvreté si vous gagnez. Que ferez...