Chapitre 35

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Un bruit me réveille dans ma quiétude. Je me redresse, le cœur battant la chamade, affolée. Le cerveau embrumé de sommeil, je me lève, chancelante, pour aller vérifier l'origine de ce bruit. Je ne peux m'empêcher de m'inquiéter, même si je sais que l'appartement est fermé à double tour. Cela fait plusieurs jours que rien ne m'est arrivé, et que le froid ne part toujours pas.

Discrète, je m'avance sur la pointe des pieds jusqu'à la salle à manger. La pièce est plongée dans le noir, excepté la table, sur laquelle se déverse la lumière de la lune, qui confère à la pièce une atmosphère étrange. Comme si l'on était hors du temps, dans une dimension à part. 

Remettant mes cheveux derrière mes oreilles, j'attrape un verre posé sur la petite table, et m'agrippe à lui comme on s'accroche désespérément à un billet dans les Bas Fonds. Je tends l'oreille, tente d'entendre une respiration, mais rien. Pas le moindre bruit, pas le moindre signe de vie, à part mon souffle saccadé. Je me dirige vers la cuisine. Avant d'entrer, j'y jette un oeil et brandit mon arme de fortune, prête à assommer l'intrus. Rien de plus là-dedans.

Puis, sur le sol, j'aperçois un couteau, posé là, sur le carrelage blanc. Une onde de terreur me parcourt, et, ni une ni deux, je rebrousse chemin en courant. Je referme à toute vitesse ma porte. Heureusement, celle ci possède un verrou, que je ferme précipitamment. Je me laisse tomber contre le mur, certaine d'être passée à deux doigts d'une mort certaine. 

Tremblante, je prends ma tablette, que j'allume. Avant de voir la liste de mes concurrents, j'ai le temps d'apercevoir mon reflet fatigué sur l'écran noir. Les cheveux en bataille, les paupières tombantes, des boutons sur le visage, je ressemble maintenant aux drogués de mon quartier, qui errent dans les rues des Bas Fonds, se nourrissant exclusivement d'héroïne et de vin fort. 

Nous ne sommes plus que quinze. Cette constatation s'abat sur moi comme une sentence, une peine de mort. Je plane sur un nuage, et, en même temps, sent que ce nuage se charge de pluie, petit à petit, et qu'un jour il explosera, créant un orage. J'ai une épée de Damoclès au dessus de la tête, menaçante. L'autre partie de moi, heureuse, euphorique, a envie de bondir de joie dans la pièce sombre. Au lieu de danse, je fais des mouvements de mains victorieux, tout en me trémoussant. J'articule des mots, sans les prononcer, puis ris de moi. Si quelqu'un me voyait, il froncerait automatiquement les sourcils, en se demandant qui pouvait bien être cette fille, qui dansait dans sa chambre à quatre heures du matin. 

Puis, la fatigue s'abat sur moi comme une chappe de plomb. Je me traîne jusqu'à mon lit, et m'endors aussitôt que ma tête touche l'oreiller.


Je rêve. Je le sais tout de suite. Une impression, peut être. Mes mains possèdent six doigts. Cela m'effraie, mais je ne m'en formalise pas, et lève les yeux pour observer le paysage. 

Une colline me fait face, imposante. En haut, est installée une petite maison, entourée d'arbres fruitiers. Un vent me souffle doucement dans le dos, comme pour m'encourager à monter la colline. C'est ce que je fais. L'ascension est compliqué, la pente est raide, mais je parviens en haut, essoufflée. 

Devant la maison se tient Matthias, le regard sombre, perdu au loin. Je le rejoins, et, quand il me voit, un grand sourire illumine son visage. Il me prend dans ses bras, et m'embrasse tendrement. D'abord surprise, j'écarquille les yeux, mais à ma grande colère, je ne me dérobe pas. Je reste. Je suis furieuse de ma lâcheté, et, en même temps, au fond de moi, dans un coin reculé de mon esprit, ça me plait. 

Je me détache de Matthias, puis observe le paysage. Ce sont des collines à perte de vue, de l'herbe, des arbres, et quelques animaux. Mon envie de voyager, qui revient me harceler même en rêve. Puissante, cette vision m'enchante, me donne envie de courir, de voir chaque morceau de terre, chaque racine, chaque poussière de ce monde dont je ne connais que les contours.

Je baille, puis me retourne, me blottissant un peu plus dans ma couverture. La lumière du jour passe entre les volets électriques, me dépitant. Je grogne, puis pose mes pieds par terre, assise sur les draps, le temps de me stabiliser. 

Enfin prête, je sors de ma chambre, et, la première chose que je constate quand je rentre dans le salon, c'est que le soleil brille, et la neige a fondu, et forme désormais des flaques d'eau dégoulinant sur le balcon. Intriguée, je m'approche. Ce que je remarque tout de suite, c'est que ma peau est réchauffée par l'astre du jour. Je fronce les sourcils, car cela ne peux signifier qu'une seule chose: dehors, il fait chaud. 

Chaleur. Chaud. Ces mots, je ne les espérait plus. Depuis des jours, ma vie se résumait à me lever, manger, m'habiller chaudement, sortir deux heures, me réchauffer, manger (beaucoup), prendre une douche, manger, dormir. Une routine qui faisait que j'avais pris du poids, et perdu mon endurance. Je me sentais chenille, engourdie. Mais aujourd'hui, la chenille se transforme en papillon.

Ragaillardie, je prends rapidement mon petit déjeuner, mets des habits courts et sort, mon sac sur le dos, dehors. 

Un soleil de printemps brille dans le ciel, réchauffant tout mon corps, faisant chanter les oiseaux. Les plantes sortent de leur hibernation, exhibent leurs belles feuille vertes. Je déambule dans les rues, un sourire aux lèvres. Néanmoins, je garde mon couteau volé serré dans mon poing. Je n'étais pas à l'abri d'une attaque. 

Je sens qu'on m'épie. Depuis quelques minutes, ce sentiment ne me quitte plus. C'est comme un sixième sens, qui m'ordonne de tout de suite me cacher. Je l'obéis, et, l'air de rien, gardant mon pas joyeux pour ne pas alerter mon suiveur, ouvre la porte d'un immeuble et me faufile à toute vitesse dans un appartement. Fébrile, je cherche le verrou de celui ci, et, ne le trouvant pas, me réfugie dans une pièce au hasard. 

Je ferme la porte derrière moi, et déplace un meuble, que je mets devant l'entrée pour la bloquer. Je tente de calmer ma respiration, me fais toute petite et guette le moindre bruit.

Au début, rien. Puis, de plus en plus fort,  à peine audible au début, des bruits de pas. Qui se rapprochent, inexorablement. Je ferme les yeux, et déglutit difficilement. La terreur m'empêche de respirer correctement, et se loge dans ma jambe valide, me paralysant. 

L'attente est longue, véritable torture. J'en viens même à espérer que mon concurrent arrive bientôt, pour que tout se finisse. 

Comme entendant mes pensées, mon poursuivant se rapproche. Ses pas lourds sont chargés de haine, ils font trembler la pièce. 

Puis il enfonce la porte.


Heyy!!! Vous allez bien?  Ce chapitre est pour little-snake-girl 

Parce qu'elle me harcelait pour avoir une scène d'amour, donc voilà je l'ai mise XD. J'espère que tu es contente parce que c'était EXTREMEMENT gênant à écrire TT. 

On a dépassé les 700 vues, je suis troooooop contente!!! Jamais je pensais y arriver, et pourtant on y est!! Merci beaucoup, ça me fait super plaisir!!

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