Chapitre 32

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Trigger warning: scène de combat assez violente

Je me réveille, courbaturée. Je déplie mon corps avec difficulté, chaque mouvement effectué me faisant pousser un petit cri de douleur. Puis, enfin debout, après de nombreux efforts, j'empoigne mon sac, mon couteau à la main, et ouvre la porte. 

Il fait toujours sombre dans la cave, mais, cette fois, je n'ai qu'à me diriger vers la lumière pour sortir. 

Une fois le pied posé sur la dernière, marche, je lève les yeux, pour les refermer presque aussitôt. La lumière du soleil m'aveugle, m'agresse. Après une nuit passée dans un sous-sol complètement dénuée de toute forme de lumière, cette dernière me paraît cent fois plus puissante que ce qu'elle est réellement. 

Une fois habituée au soleil, je monte les marches de l'escalier qui mène à mon appartement. Que Cassiopée, j'en suis sûre maintenant, a fermé délibérément, pour que je reste coincée dehors. Je ne vois pas d'autre solution, sinon l'acte volontaire. Mais, je suis toujours là, et, à présent, je vais me venger. J'entends déjà ma mère me sermonner, me dire que le ressentiment nourrit juste les émotions négatives, et pas celles qui font de nous des êtres bons. Mais, j'en décide autrement. Cette colère sera assouvie quand Cassiopée aura récolté ce qu'elle mérite. 

Un brouillard tempétueux dans la tête, près à combattre, je frappe contre la porte. 

Une Cassiopée hébétée, les cheveux emmêlés et les yeux à peine entrouverts m'ouvre. Une expression de surprise se peint sur son visage lorsqu'elle se rend compte que je suis toujours là. Visiblement, elle ne doutait pas de la réussite de son plan. je ricane, méprisante:

— Alors, Cassiopée, tu ne t'attendais pas à me voir, hein? Tu pensais que je serai éliminée, n'est ce pas? Eh bien, tu t'es trompée! Tu ne connais donc pas la gratitude? Je t'ai sauvée, tu t'en souviens? fait je froidement, ne laissant filtrer aucune émotion, sinon du dédain, de la haine et du sarcasme. 

— Je... Comment tu as fait? réplique la traîtresse. Elle ne conteste même pas les faits, preuve irrévocable de sa culpabilité. 

— Eh bien, si tu veux tout savoir, je me suis enfermée dans un autre appartement quelques secondes avant 19h00! 

Décontenancée, Cassiopée ne réponds pas tout de suite.

— Mais... l'horloge indiquait 19h02 quand tu as arrêté de cogner contre la porte!

— Normal, j'ai avancé l'heure pour que j'aie plusieurs coups d'avance sur le temps, et que je soie plus prudente! expliquai je, un sourire moqueur aux lèvres. Et, maintenant, tu vas payer.

Tremblante, Cassiopée tente de refermer la porte, mais je retiens celle ci et l'ouvre brusquement, bousculant la jeune fille. 

Je l'attaque avec un coup de poing dans la figure, mais mon ennemie résiste. Je vois du coin de l'oeil la caméra installée dans un coin se tourner vers nous. Aujourd'hui, les gens auront du spectacle. C

Je crois avoir assommé mon adversaire, mais c'est sous estimer celle ci. Elle se frotte le visage, puis, une expression meurtrière sur le visage, se jette sur moi en hurlant, et m'agrippe les cheveux. Sous le poids de mon adversaire, je tombe par terre, et ma tête rencontre brutalement le sol. Cassiopée assise sur moi, je la frappe, mais elle évite ma main, l'agrippe et la tord. Elle n'a rien de la fille posée que je côtoyais, mais semble s'être transformée en un démon incontrôlable. 

Je sens qu'elle a le dessus, et, visiblement, elle aussi, puisqu'elle affiche un sourire victorieux. Sa confiance s'est totalement rétablie. Quant à moi, des touffes de cheveux manquent à l'appel, ma tête me lance, mais, dans l'énergie du désespoir, je tente la technique de combat la plus simple du monde; je relâche mes muscles, comme si j'abandonne. Mon ennemie le sent: 

— Alors, on fait moins la maligne, hein? Méfie toi plus, avant d'attaquer quel..

Je la coupe en me redressant d'un coup, pour lui attraper la tête et la coller contre mon ventre. Je sens Cassiopée suffoquer. Puis, quand je constate qu'elle ne m'oppose plus aucune résistance, je me relève, toujours dans la même position, la lâche, et, dans un élan de haine, la gifle violemment. Je la laisse étalée sur le sol, reprend mon couteau que j'avais laissé tombé, et entre dans l'appartement. J'entends la jeune fille vaincue souffler, mais elle ne bouge pas. 

Tentant de résister à mes migraines terribles dues à ma chute, j'enfouis des vêtements au hasard dans mon sac, ainsi que de la nourriture, et quitte cet appartement. Sur le sol, j'enjambe le corps inerte de Cassiopée. 

Je lui souris méchamment, puis, sans un regard en arrière, dévale les marches. Il est plus que temps de trouver une nouvelle habitation. 

Quelques minutes après être sortie, j'entends une explosion, puis, en me retournant, vois la fumée bleue d'une fusée de détresse s'échapper par les fenêtres ouvertes. Un hélicoptère arrive peu après, pour récupérer la candidate déchue.

Je marche sans m'arrêter jusqu'au soir, où je pénètre au hasard dans un bâtiment gris triste, recouvert de graffitis insultants, et d'affiches publicitaires déchirées et effacées par le temps. C'est d'ailleurs étonnant qu'elles aient tenu jusque là. Peut être qu'elles ont été rajoutées pour le jeu. Je m'engouffre dans le premier appartement que je vois, un appartement confortable, recouvert de tableaux représentant toujours les mêmes choses: des fleurs, des fruits, des décors de campagne, où encore des chiens. Le mobilier est plutôt ancien pour la mode de l'époque. Il y a beaucoup de mobilier en bois foncé, recouvert de nappes fines jaunies et recouvertes de poussière. 

J'installe mes affaires dans la chambre, un pièce décorée par un papier peint jauni à motifs floraux et une moquette rose pâle. Le lit, un deux places en chêne avec des draps tout aussi ridicules que les murs pourrait se trouver dans un musée sur le moyen âge. 

Je fouille sans ménagement les placards, trouvant seulement des légumes périmés et des gâteaux verdâtres, que je juge immangeables. Tant pis, mes provisions suffiront. J'étire ma jambe de chair fourbue sur une chaise, l'autre à ses côtés, insensible. Je souffle sur la table, provoquant un  nuage de poussière, qui me fait tousser. 

Je consulte ma tablette, remarquant avec satisfaction le profil de Cassiopée, qui affiche désormais la mention éliminée. 

Je passe le reste de la soirée à regarder le soleil se coucher, drapant le ciel de milles couleurs. Je contemple son déclin, le voit disparaître petit à petit pour aller éclairer une autre partie de la planète, et laisser Lyon dans le noir. Heureusement, ce soir, je suis dans un appartement, et pas coincée dans un sous-sol obscur parce que mon "alliée" a cherché à m'éliminer. Je pourrais presque m'amuser de ce qui m'est arrivé, si la rage ne me tordait pas encore les entrailles, jouant avec tel un enfant manipulant une poupée. 

Assoiffée, je me rends alors dans la cuisine, remplit ma gourde, et, alors que l'eau s'apprête à couler dans mon gosier, je me rappelle de cette nuit. De l'acide. Il y a du putain d'acide dans certains d'appartements, Perle. Et toi, comme la première des imbéciles, tu le savais mais tu n'a pas vérifié l'eau.

J'éloigne d'un coup brusque la bouteille de moi, puis, tout doucement, jette un coup d'oeil à l'intérieur, comme si l'acide allait jaillir pour me tuer. Et, à la lumière artificielle d'une ampoule du salon, je vois la couleur: jaune. J'ai soif, mais je ne peux pas boire. Un liquide coule dans le robinet, mais mon organisme ne le supporte pas. Un véritable supplice de Tantale. Rattrapée par cette longue journée, je me prostre dans un coin, les larmes menaçant de couler. 

Mon corps m'envoie des signaux de détresse, mais je ne peux y répondre. Je suis prise au piège, tourmentée par ma propre personne. 

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