En attendant que Gwendoline finisse sa douche, je me suis affalée dans le canapé, et fait une courte sieste. Je sens que je ne vais pas réussir à dormir cette nuit. La présence d'une étrangère — concurrente qui plus est! — dans mon appartement m'angoisse au lieu de me rassurer. J'ai peur qu'elle ne m'attaque dans mon sommeil. Mais je tente tout de même de me rassurer: Kate n'est pas là, c'est le principal. Et au vu de son caractère, je ne la pense pas capable de sournoiserie.
La principale concernée arrive enfin. Quand elle ouvre la porte, de la fumée sort de la salle de bains, et Gwendoline apparaît, le visage rouge, ses beaux cheveux sombres mouillés, ramenés en un chignon négligé sur son crane. Elle m'offre un sourire, puis vient s'asseoir juste à côté de moi. Même si cela me démange, je me retiens de me décaler, par peur de la blesser.
Nous restons un moment assises, nos coudes se frôlant. La gêne est palpable, et je suis presque sûre d'être rouge de honte. En attendant que le temps passe, je fixe obstinément une mouche qui se promène sur l'écran plat qui me fait face.
Je finis par m'assoupir, le menton posé contre la poitrine. C'est Gwendoline qui me réveille, me secouant violemment l'épaule.
— Eh, réveille toi, la télé s'est allumée!
Ces mots me font l'effet d'un coup de fusil. J'ouvre les yeux, et découvre la télé allumée, montrant Simon Lotte, allongé sur le côté, sur le coude, sirotant une étrange substance rose qui pétille. Il porte des lunettes de soleil, et est allongé sur une serviette. Le sol et étrange. Je n'en avait jamais vu comme ça: ce sont des cailloux. Jaunes. Des petits grains, qui forment des petites collines, et des creux. On ne voit pas le ciel, mais j'imagine qu'il est bleu, vu la façon dont le soleil chauffe la peau de Simon Lotte. Celui ci est déjà rouge. Un constant bruit de fond me dérange, je n'ai jamais entendu ce bruit. Il est répétitif, apaisant.
— Chers candidats, chères candidates. Il fait chaud, n'est ce pas? J'irai bien me baigner dans un lac.. mais pas d'eau. De l'or, peut être? Vous pensez que l'or est froid? (Il hausse les épaules) Je pense que ça vaut le coup de tenter. Quel sentiment de richesse doit on ressentir, lorsqu'on nage dans de l'or! Oh, et, vous êtes vous déjà baigné dans un lac? Si vous saviez... comme les souvenirs d'enfance remontent quand je pense à un lac... Nous avions un petit lac, dans notre jardin, mes parents et moi, qui contenait un îlot. Nous l'appelions îlot du Souvenir, car mes parents m'y racontaient toujours des anecdotes amusantes...
Il s'arrête de parler, et la caméra bouge, révélant un paysage subjuguant. De l'eau, à perte de vue. Un ciel bleu comme jamais auparavant. Des oiseaux fendant les airs, poussant des cris aigus. Au bord, de l'eau revient et part, comme si elle espérait s'arracher à sa famille, cette immensité bleue. C'est ce mouvement qui provoque le bruit étrange que j'avais entendu au début.
Je tourne la tête vers Gwendoline, aussi béate que moi. Nous nous regardons quelques instants, ne sachant quoi dire, nous interrogeant du regard.
— Elle servait à quoi, son intervention? Il ne nous à rien dit de nouveau! râlai je, quand la tension est retombée.
Gwendoline acquiesce, semblant réfléchir en même temps, se massant les temps de ses doigts.
— Il y a forcement une solution... Un indice caché... Il faut juste chercher...marmonne t elle, concentrée.
— Quoi? Qu'est ce que tu cherches?
— Un indice qu'il a pu glisser dans sa vidéo... Elle a obligatoirement un but, sinon il ne nous l'aurait pas montrée...
— Je suis d'accord, mais on ne peut pas revoir l'enregistrement, et puis ça serait quoi? On l'a juste aperçu dans un endroit qu'on connaît pas, qu'est ce que tu veux en tirer!
Gwendoline acquiesce, mais je vois bien que les rouages de son cerveau tournent, qu'elle n'a pas abandonné.
— Bon, je sais pas toi mais moi j'ai un peu faim donc je te propose qu'on aille manger ok? On verra ça après! dis je en me levant. Ma camarade me suit, toujours distraite, les sourcils froncés. Elle reste comme ça pendant que je prépare le repas, assise sur une chaise, se triturant les doigts.
Nous mangeons en silence, le bruit des couverts brisant celui ci de temps en temps. La lampe nous éclaire faiblement, et des moustiques nous tournent autour. Je les écrase, mais Gwendoline ne tente même pas de les repousser. Préoccupée, je lui demande si tout va bien, mais elle me répond à peine, préférant picorer dans son assiette, les cheveux lâchés faisant une barrière entre elle et moi. Quelques fois, elle marmonne des choses inintelligibles, que je lui demande de répéter. Gwendoline ne répondant pas, j'ai arrêté.
Je débarrasse mon assiette et la nettoie dans l'évier quand ma concurrente daigne enfin parler:
— J'ai trouvé! Je sais où on doit aller! crie t elle tout en sautant dans le salon.
Je me retourne, lâchant l'assiette que je tenais, qui retombe dans l'évier avec un fracas.
— Quoi? Y avait un indice?
— Oui! Tu vois le moment où il parle du lac d'or?
— Oui, c'était un peu bizarre mais soit... concédai je, perplexe, ne voyant pas où Gwendoline veut en venir.
— Eh ben ça désigne un endroit! Regarde, fait elle en me montrant une carte de Lyon. Elle y pointe un endroit vert, avec ce qui semble être une étendue d'eau. Je fronce les sourcils, ne comprenant toujours pas.
— Tu ne vois pas où je veux en venir?
Je hoche négativement la tête.
— Alors... En fait, la petite île que tu vois au centre du lac, c'est l'île du Souvenir! Je pense qu'on doit aller là. Et, le lac est au parc de la tête d'or! Ca explique pourquoi Simon a parlé de se baigner dans de l'or!
— Tu es sûre? C'est loin, quand même...
Même si cette solution me semble tordue, plus j'y réfléchi, plus cela devient logique.
— Oui! Il y aura peut être de la nourriture, ou des trucs pour se préparer aux prochaines difficultés. Je sens qu'on doit y aller, m'affirme Gwendoline, catégorique.
— Ca marche, capitulai je, en soupirant. On part quand?
— Il est quelle heure?
— 13h00, répondis je, regardant ma tablette.
— On a encore le temps de sortir. Mais d'abord, on doit se préparer. Trouve des couteaux et des outils je vais nous prendre des vêtements.
Je me plie à ses ordres, et fouille les tiroirs tandis qu'elle disparaît dans ma chambre chercher des habits.
Je trouve deux couteaux de cuisine, un canif et un couteau suisse. Les armes en main, je vais chercher mes affaires.
Gwendoline réapparaît alors que je fourre ma tablette dans mon sac. Elle porte une pile de vêtements, qu'elle pose sur la table.
— J'ai pris des trucs pour la pluie, des chauds et des froids.
— Attends, mais ça va jamais tenir!
— Ne t'inquiète pas, je connais une technique pour qu'ils prennent le moins de place possibles.
Et, aussitôt dit, aussitôt fait, ma camarade prend un short noir, qu'elle plie de façon à ce qu'il devienne aussi plat et petit qu'un livre de poche. Elle fait comme ça avec tous les vêtements. Au final, tout rentre dans nos deux sacs. Il reste même de la place pour de la nourriture. Gwendoline prend deux gourdes, qu'elle remplit à ras- bord avant de les enfourrer dans nos sacs. Nous prenons ensuite des fruits et des boîtes de conserve. A la fin, nos sacs sont sur le point d'exploser, mais nous sommes prêtes.
Nous avons toutes les deux un couteau caché sous nos habits, et des chaussures de randonnée. Nos cheveux sont retenus par une couette serrée, et notre regard est déterminé. Gwendoline nous a choisi des habits confortables, pratiques pour la marche.
Puis, enfin, celle que je considère désormais comme mon alliée me fait signe. J'ouvre la porte, et nous partons à la recherche de cette île du Souvenir.
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Citygames
Science FictionImaginez vivre dans une société où tout est organisé hiérarchiquement. Imaginez vivre tout en bas de l'échelle de cette société. Imaginez que le gouvernement vous propose tout les ans un jeu pour vous sortir de la pauvreté si vous gagnez. Que ferez...