Chapitre 11 : Un saut dans le passé

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Éli : 

Depuis ma découverte surprenante où je suis d'abord resté sur le cul, assit sur le matelas, je n'arrivais finalement plus à tenir en place. Je tournais en rond comme un lion en cage, ne sachant plus raisonner convenablement. Dans ma tête, c'est un véritable champ de bataille. Tout se mélange, se désintègre. J'ai cette sensation d'avoir été piégé toute ma vie, qu'elle n'a été que mensonge. Qui suis-je vraiment ? Une erreur de la nature ? Un monstre ? Un dysfonctionnement biologique ? Quinze ans où j'ai cru bêtement avoir été mis au monde naturellement. Quinze ans où j'ai cru bêtement que j'avais une mère quelque part sur cette terre et finalement, c'est un deuxième père. Un homme. J'essaie d'être lucide, mais comment l'être ? Je réfléchis afin de trouver des explication logique à cette histoire surnaturelle, mais... Surnaturel ! C'est ça. Ça a un rapport avec ça. Je vais finir par devenir dingue. 

Le bruit des roues couinant sur le bitume, me fait revenir violemment dans le monde réel. Je l'entends, Noah parle sur la radio de son véhicule avec un correspondant du poste. Mon ouïe : c'est bien la seule chose que j'arrive de mieux en mieux à contrôler chez moi. Néanmoins sa voix résonne dans ma tête et déclenche cette vague de chaleur dans tout mon corps. Ma mâchoire se serre, mes muscles se tendent et voilà qu'une nouvelle transformation peu maîtriser surgit de nulle part. Non, en fait, ça vient de la rage qui est en moi. Mon pelage. Mes canines. Mes oreilles. Tout apparaît dans des douleurs qui deviennent de plus en plus supportables ou du moins, une douleur dont je m'habitue. La porte s'ouvre. Je me dirige rapidement vers l'entrée en dévalant l'escalier.

- Éli, je suis rentrée. C'est... C'est quoi ce bazar... 

Je l'attrape par la gorge et le claque violemment contre un mur avant qu'il ne finisse sa phrase. 

- Pourquoi tu m'as caché ça ? 

- Éli calme-toi !

- Pourquoi tu m'as caché que... 

Et là, une évidence me fout une gifle monumentale. 

- Que tu étais mon grand-père ? demandé-je dans un chuchotement peu maitriser. 

Je prends les deux photos que j'avais rapidement mise dans la poche arrière de mon jean et lui plaque devant les yeux. Il ne pourra plus nier et sera obligé de m'expliquer.

- Ok ! D'abord lâche-moi car ce n'est pas comme ça que tu auras des réponses.

Je prends un temps de réflexion avant de desserrer ma poigne sur son cou et de me reculer. Des points de sang font leur apparition. Je reporte mon regard sur mes mains en laissant tomber les photos et je remarque que mes griffes sont légèrement imbibées de ce liquide rougeâtre. Je regarde une nouvelle fois son cou où les points rouges sont devenus des traits dégoulinants vers son épaule. Je baisse la tête. J'ai honte de m'en être pris physiquement à lui, à mon grand-père, mais comment faire pour ne pas sortir de ses gongs ? Franchement ! Je craque une fois de plus. Tout en revenant à mon apparence de jeune ado parfaitement humain, je me laisse glisser contre le mur afin d'atterrir assis par terre. Je maintiens mon visage dans mes mains sali par les traces de sang de mon grand-père. 

Deux bras costauds viennent m'entourer. J'ouvre les yeux et aperçois Noah agenouillé face à moi et son geste montre qu'il ne m'en veut pas. Il me caresse les cheveux comme lorsque j'étais petit. Il enroule ses doigts dans mes mèches tel des bigoudis avant de les défaire et de recommencer. Ça me détend réellement, alors j'enroule mes bras autour de son corps, afin de me rapprocher de lui, me connecter à mon grand-père. J'ai besoin d'être proche de lui. J'adore cette sensation de protection infaillible, comme si rien ne pouvait m'arriver. 

- Je crois qu'il est temps qu'on parle, chuchote Noah avant de m'embrasser le front.

Il se lève et me tend la main que je prends sans hésiter. Il m'emmène dans le salon en me gardant la main prisonnière de la sienne. Je m'installe sur le canapé encore perturbé par la nouvelle. Noah me ramène un verre d'eau que je bois immédiatement. Il s'assoit à mes côtés, mais reste silencieux. J'imagine qu'il a besoin de temps pour me parler du passé. Ses bras sont posés sur ses genoux et il triture ses mains entre elles. Il se perd dans ses pensées. Son air grave en dit long sur le courage qu'il a de vouloir m'expliquer cette partie de notre vie. 

Le destin d'ÉliOù les histoires vivent. Découvrez maintenant