Chapitre 17 : Dur retour à la réalité

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Éli :

Ce que je viens de vivre est la deuxième chose la plus horrible que j'ai vécu de toute ma vie. La première étant la mort de mon père devant mes yeux. Le rejet, la honte et l'humiliation font tellement mal. Je roule, mais je n'ai pas la force de rentrer directement chez mon grand-père. Je sais d'avance ce que va me dire Scott avec son air supérieur : "on t'avait prévenu !" Je n'ai pas le courage de l'entendre dire la vérité. Pourquoi je n'en fais qu'à ma tête tout le temps ? Franchement, je ne peux pas écouter les adultes, une fois de temps en temps ? Je fonce avec la Jeep, sans savoir où je vais. En tout cas, je me dirige vers Beacon Hills, mais ça ne sera pas ma destination. Pas tout de suite. Je tourne encore et encore dans toutes les villes des alentours. Je conduis sans faire attention à rien : ni les passants, ni les feux de signalisation, ni les panneaux. Je sais que c'est dangereux, mais je suis complètement dans ma bulle à repenser à cette soirée, à ma vie auprès de mon père, à ce que j'ai vécu. J'ouvre les fenêtres pour que le vent fasse voler mes cheveux dans les airs comme pour me rafraîchir les idées ou bien pour me vider la tête. En vain, rien ne fonctionne pour enlever cette douleur cuisante de ma poitrine. Je vais m'adonner à une autre idée.

Je me dirige vers la forêt de Beacon Hills. Pas n'importe où, plutôt le chemin qui se trouve à l'entrée de la ville pour éviter que Scott renifle mon odeur. J'espère qu'avec cette distance ça ira. Après une vingtaine de minutes, je me gare sur le bas-côté. Je descends, ferme la voiture et je compte me dépenser comme je le faisais autrefois avec mon père. Je ne sais pas si c'est la meilleure idée puisque la dernière fois j'ai complètement explosé. Cet endroit contient tellement de souvenirs avec lui. Je secoue la tête pour ne plus penser à ça. Je me mets à courir comme avant. Un pas devant l'autre, mes jambes accélèrent toujours plus. Je foule la terre à une vitesse que je n'avais encore jamais atteint. Les feuilles s'envolent derrière moi dans des petits nuages de poussière. Je me défoule voire même me défonce à la tâche. Cependant, ce n'est pas pour autant que cette histoire s'évapore de mes pensées. Je ressens à nouveau cette angoisse qui broyait mes intestins juste avant d'agir. Je retrouve ce courage qui m'a fait déployer mes ailes et qui m'a poussé à frapper à sa porte. À la porte de Stiles. La porte de mon deuxième père ou bien devrais-je dire de ma mère ? Je ne sais pas pourquoi je me pose la question puisqu'en fait, il n'est rien pour moi ! C'est juste le mec qui m'a porté dans son ventre et m'a fait naître. Point barre. Il m'énerve tellement celui-là ! Je fronce les sourcils et accélère la cadence. J'ai besoin d'oublier tout ça, que mon cerveau se mette sur pause. Pourquoi ça me prends autant la tête alors que ce n'est pas censé être important puisque je ne le connais pas ? C'est un parfait inconnu à mes yeux. J'essaie de penser à autre chose et pourtant, j'entends à nouveau sa voix. Cette voix qui m'a complètement chamboulé, même avant de le voir. Elle me rassurait avant qu'il prenne son intonation glaciale et qu'il me détruise comme jamais personne n'a pu le faire auparavant. Je serre la mâchoire ainsi que les poings. La rage que je contiens en moi me pousse à dépasser mes limites un peu plus. Je revois ce regard qui prouvait qu'il me connaissait. C'était une vraie évidence. Ce lien que je pensais inexistant était finalement présent entre lui et moi. C'est peut-être pour ça que j'ai si mal. Cette fois la souffrance me pousse à me transformer. Mes poils poussent d'un coups, me gratouillant le visage. Mes crocs et mes griffes sortent sans ménagement. Je me surprends à courir comme un animal sauvage. Je suis à quatre pattes, le ventre frôlant le sol. Je zigzague entre les arbres, me faisant fouetter par les branches sur mon passage. Je redescends dans les fins fonds des enfers lorsque je l'entends à nouveau dire que je n'étais qu'une erreur. Un pincement au cœur me saisit de nouveau. Les larmes débordent de plus belle sans me prévenir. J'ai cette boule dans la gorge qui m'empêche d'avaler correctement. Ça me serre et j'ai envie de craquer une nouvelle fois. Cette déception dévastatrice m'a littéralement mis six pieds sous terre, m'a tué comme ce n'était pas permis. Et cet enfant. L'enfant qu'il a alors que moi, il m'a abandonné sans scrupule. L'animosité m'envahit en une fraction de seconde. Je griffe le sol à chaque fois que mes pieds ou mes mains touchent la terre. Je le hais tellement ! Sans oublier ce flingue pointé sur moi. Il a osé me menacer avec une arme à feu. Je crois que c'est ça qui fait le plus mal. Il doit réellement me détester. Comment peut-il me haïr de la sorte, alors qu'il ne me connaît même pas ? C'est incompréhensible. J'ai cette rage en moi qui me donne l'impression que je vais faire un carnage. Je ne peux plus me retenir de hurler comme un animal agonisant.

Le destin d'ÉliOù les histoires vivent. Découvrez maintenant