Chapitre 1

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Quand elle laissa la porte claquer derrière elle, ses poumons se remplirent d'air. Tellement qu'elle en eut le souffle coupé, et qu'elle perdit pied pendant un instant. Tellement que ses yeux commençaient à la piquer.

Il fallait qu'elle marche, qu'elle s'éloigne, maintenant.
Au risque de ne plus pouvoir reprendre pied.

Sa marche fut maladroite, peut-être qu'on l'aurait prise pour un des membres de la Garnison qui avaient toujours un peu plus que de l'eau dans le sang.
Mais quand ses esprits revinrent clairement, sa tête se redressa, et ses pas s'allongèrent.

Hel admirait les pierres qui constituaient les murs du manoir, se remémorant des images qu'elle avait réussi à enfouir au fond de sa mémoire.
Quand elle croisait un membre du Bataillon, celui-ci s'arrêtait toujours dans sa course pour la saluer d'un poing sur le cœur, à moins qu'il soit nouveau et qu'il ne connaissait son visage.
Et dans le cas où les membres la reconnaissaient, elle leur faisait un sourire, demandant de laisser tomber la salutation qu'elle trouvait hypocrite et qu'elle n'avait jamais respectée. C'était l'une des seuls à pouvoir le faire.

Elle ne voulait pas de tout ça. Toute cette reconnaissance pour quoi au final ? Ils ne la connaissaient pas, et les peu de camarades qu'elle avait connus encore vivants ne comprenaient pas son départ soudain. Comme son Major et ses vieux amis.

Sa tête s'abaissait une nouvelle fois sans qu'elle ne s'en aperçoive. Ils pouvaient la considérer de lâche.

Un crissement contre le parquet et une voix la fit se réveiller.

« Oh...Mademoiselle Zackley ! »

Devant elle se trouvait une rousse, beaucoup plus petite qu'elle, des yeux ronds et grands comme des billes, mais qui détenaient toujours autant de détermination.

« Pétra...Je ne t'avais pas reconnue ! S'exclama-t-elle, reprenant son sourire habituel, Combien de fois t'ai-je demandé d'arrêter avec ce signe et de m'appeler par mon prénom ?

-Certainement l'habitude... Répondit l'autre avec un petit sourire

-J'ai appris que tu faisais partie de l'escouade Livaï. Félicitations, ce bonhomme n'est pas facile à satisfaire ! J'ai lu tous les rapports, et je dois dire que tu t'en sors avec brio. Je me souviens encore de quand tu as intégré le Bataillon...Je dois dire que je suis fière de toi.

-Il faut bien que quelqu'un fasse le sale boulot, déjà que nous ne sommes pas aidés... »

Hel perdit son sourire et ses sourcils se froncèrent.

« Oh non je ne dis pas ça pour toi ! Se précipita de dire la plus jeune, Tu as tes raisons, d'être partie. Je me doute que tu n'avais pas eu le choix.

-Et bien va dire ça à tes chefs... »

La phrase murmurée par la nouvelle Caporale fut tellement souffler que son interlocutrice la questionna du regard. Mais la rousse fit mine de ne pas l'apercevoir et détourna le regard.

« Que fais-tu alors ici ? Tu reviens pour de bon ? Demanda enjouée Petra

-Tu le sauras bien assez tôt. »

Hel eut un rire qui fit tiquer l'autre. Puis après des formalités échangées, les deux femmes se séparèrent, reprendre leurs tâches.

Le soleil était encore haut, et le vent restait léger.
Alors Hel se dirigea vers l'extérieur, observant les arbres bouger doucement.

Puis, quand elle mit un pied sur l'herbe, sa tête tourna. Ses yeux se fermèrent brusquement, et l'une de ses mains se posa sur son front. Ses dents grincèrent entre elles, et un vertige lui prit.

Ce qui nous retient (LivaïxOC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant