Chapitre 16 : Tailleurs et séduction (5/5)

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Alors que le Soleil se couchait sur la falaise, les trois femmes montèrent à bord du carrosse pour s'en retourner au manoir. Eldola demanda à Ivan s'il n'avait pas trouvé le temps trop long, mais apparemment Ricky s'était occupé de le distraire, et le charme bourru du jeune Palefrenier n'était pas sans effet sur les Tailleuses... à tel point que la Locale commença à s'inquiéter du nombre de conquêtes de son Palefrenier et des possibles conséquences si ses soupirantes venaient à le découvrir. Ivan allait sans doute devoir apprendre à la dure à dispenser moins libéralement ses ardeurs... Le voyage du retour fut rapide et exceptionnellement silencieux, chacune ayant eu son lot lors de cette journée bien remplie : Eldola n'aurait pas cru savourer autant le contact d'un tissu doux et lisse maintenant qu'elle avait remis sa robe, mais ses muscles réclamaient un peu de réconfort et ce n'était pas la banquette rêche du carrosse qui allait lui en offrir ; Mimi était perdue dans ses pensées mais apaisée si on s'en fiait à son immobilité, tandis que Betsy rêvassait en observant le paysage sans manifester aucune envie de parler. Mimi ne râla même pas à propos du coup monté par les deux complices, alors Eldola n'aborda pas le sujet.

Quand elles arrivèrent au manoir, les domestiques étaient en train de se préparer pour le couvre-feu. Eldola se dit que le moins qu'elle puisse faire pour les jeunes filles étaient de les laisser aller se reposer :

- Merci beaucoup pour votre aide aujourd'hui, à toutes les deux, les remercia Eldola. Si vous le souhaitez, vous pouvez aller directement dans vos appartements, je pense que vous avez bien mérité un peu de repos.

- Mais... et prendre le risque que vous froissiez votre robe en l'enlevant trop précipitamment ! s'offusqua Betsy. Je suis une Chambrière, ma journée n'est pas terminée tant que vous n'êtes pas en chemise de nuit !

- Et puis, nous devons avoir notre conversation du soir..., ajouta Mimi un peu timidement. Entre Betsy et moi. C'est vous qui l'avez exigé...

- Bon, très bien, suivez-moi, capitula Eldola, trop fatiguée pour argumenter. Mais dépêchez-vous alors, sinon Barnabé va m'en vouloir !

Les trois femmes montèrent à l'étage : Mimi tria les papiers de la journée tandis que Betsy déshabilla Eldola ; cette dernière dut avouer que malgré ses gestes un peu brusques et son bavardage incessant, la jeune Chambrière était plutôt efficace, et qu'elle fut prestement en état d'aller se coucher. Elle n'était toujours pas à l'aise avec le contact rapproché d'une autre personne, mais elle pouvait comprendre pourquoi ça avait ses avantages. Eldola congédia Betsy, qui alla retrouver la Secrétaire dans le cabinet de travail pour leur petite discussion nocturne. Eldola fut étonnée que cette habitude persiste : à la base c'était une corvée qu'elle avait improvisée, mais était-il possible que les deux adolescentes y prennent vraiment plaisir désormais ? Ou peut-être qu'elles râlaient dans son dos. Elles pouvaient même comploter contre elle... C'était peu probable, mais la méfiance naturelle d'Eldola reprit le dessus, et elle se retrouva rapidement en train d'écouter discrètement la discussion de ses deux assistantes.

- Je ne pensais pas que vous vouliez encore profiter de ma présence après cette journée entière passée ensemble ! plaisanta Betsy.

- Non, mais... je..., bégaya Mimi. Je me devais de vous remercier.

- Pourquoi donc ? s'étonna Betsy.

- Pour avoir tenu tête à mon père aujourd'hui. Je ne connais pas grand-monde qui ait ce courage-là, et vous avez pris ce risque alors même que vous me détestez...

- Oh, si vous croyez que votre père est difficile à vivre, c'est que vous n'avez jamais rencontré ma mère ! Au moins votre père accepte la confrontation, tandis que ma charmante maman esquive tous les conflits aussi sûrement qu'une anguille... Et il m'a vraiment énervée, à vouloir nous empêcher de faire notre travail, et à répéter qu'accepter de l'aide était pour les faibles ! Quel malotru ! Et... je ne vous déteste pas, Secrétaire Mimi. J'ai certes beaucoup de mal à vous comprendre, mais je pense sincèrement ce que j'ai dit à votre père : vous êtes une jeune fille très intelligente et talentueuse. Ceci n'excuse cependant pas votre terrible sens vestimentaire, mais avec un peu de travail...

Sur la Falaise [en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant