Chapitre 37 : Vladimir [corrigé]

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Les mains délicates d'Olympe s'agrippent à mon cou. Je sursaute à cause de cette proximité pour le moins inattendue, mais ne tente pas de fuir. Je me contente de l'observer et de la passer au crible pour comprendre sa soudaine envie de contact physique. Mes yeux caressent la peau chocolat au lait de son visage. Ses paupières recouvrent ses iris aussi verts que des émeraudes. La dentelle noire de ses cils projette une douce ombre sur ses joues rebondies de femme enfant. Sa bouche rosée est détendue et affiche un air empli d'une sérénité infinie. Quant à ses sourcils épais, ils sont légèrement froncés, signe évident d'une intense concentration.

Elle est belle...

L'arrondi de mes oreilles chauffe lorsque je me rends compte de la réflexion qui m'a traversé l'esprit pour la première fois. Ça fait pourtant quelque temps maintenant que nous nous fréquentons... C'est étrange. Depuis ma transformation en vampire, je suis insensible aux charmes des femmes. Aucune ne m'attire ou ne trouve grâce à mes yeux, en amour comme en amitié. Je ne vois d'elles que leurs défauts, aussi minimes soient-ils.

Est-ce que tout ce que nous avons vécu ensemble y est pour quelque chose ? Après tout, même si nos souvenirs communs ne sont pas que positifs et heureux, ils nous ont rapprochés, car nous les avons affrontés main dans la main.

Je suis sorti de mes pensées par le corps d'Olympe qui se met à scintiller, s'illuminer, puis briller de mille feux dans le silence méditatif qui règne sur la serre. Je grogne face à cette attaque visuelle et ferme les yeux aussi vite que je le peux pour y échapper.

Mon visage picote à l'endroit où reposent les mains d'Olympe. Je tente de fuir cette sensation qui n'est pas des plus agréables. En vain. Olympe me maintient trop fort et je sens que quelque chose d'important – de très important même – est en train de se produire.

Sa respiration accélère et son cœur s'active dans sa cage thoracique au point que son tempo rappelle le chant d'un tambour de guerre. Son rythme est affolant et son timbre, excitant. J'imagine sans mal la puissance ainsi que la vitesse de son sang dans ses vaisseaux. Je déglutis et, guidé par une soif nouvelle, passe inconsciemment ma langue sur mes lèvres. Il faut que je tienne bon ! J'ouvre à nouveau les yeux et me focalise sur le visage d'Olympe pour éviter de la mordre alors qu'une épreuve se met de nouveau en travers de sa route.

Le rayonnement qui s'échappe d'Olympe s'amenuise et se concentre sur ses mains. Je suis son cheminement et remarque qu'une lueur émeraude persiste sur son corps. Elle palpite au rythme des battements de son cœur et, avant que je ne puisse me pencher sur son origine, mes blessures se ravivent. La douleur est telle que j'ai l'impression de brûler à chaque endroit charcuté. Un grognement m'échappe malgré moi et je ferme les yeux pour me forcer à rester en place. Un sifflement titille mes oreilles tandis que la sensation de feu sur ma peau augmente encore et encore. Je soulève une de mes paupières, observe mes plaies et hoquète alors que les bords de mon épiderme se rapprochent plus vite que d'habite.

Olympe s'éveille au statut de calice. Elle accepte enfin la situation et a décidé de me dédier son pouvoir. Elle m'offre tout ce qui la définit depuis qu'elle est petite en remerciements de ce que j'ai fait pour elle.

Je dévisage Olympe, sonné par ce que je vois et les bribes de pensées que je parviens à capter. J'ai envie de lire ce que j'ai cru comprendre dans son regard vert. Je veux avoir la preuve que je ne me trompe, que je n'interprète pas mal ses ressentis et que ce n'est pas un rêve, un fantasme, un mirage de mon esprit.

Mais non. Tout ce qu'il se passe en ce moment même est la stricte et pure vérité.

Je tente de parler, mais me retrouve privé de toute forme de parole tandis que les yeux d'Olympe s'ouvrent pour se plonger dans son regard. Ma respiration se bloque dans ma poitrine alors qu'avec le plus grand respect, elle pénètre mes pensées. Un raz-de-marée mental emporte toute ma souffrance et ma fatigue pour ne laisser derrière lui que la paix et la sérénité.

— Désolée d'avoir autant tardé, retentit alors une douce voix éthérée. La guérison par la magie est plus compliquée que prévu.

Puis sa conscience se retire et un sentiment de manque me noue les entrailles alors que je me retrouve seul dans sa tête. Sous le coup de la panique, mes mains crochètent le pull que j'ai prêté à Olympe à son arrivée et qu'elle ne quitte plus. Mes phalanges se referment sur les mailles de la laine et entre en contact avec ses omoplates saillantes. Je gémis, l'air pitoyable, tandis que je m'ouvre sur le monde qui nous entoure et que la réalité envahit de nouveau ma vision.

Des doigts fins peignent mes cheveux emmêlés par le combat. Je ronronne de plaisir, car cette sensation agréable m'est inconnue depuis très longtemps. Je balaie les environs du regard et remarque que le visage d'Olympe est bien plus haut que tout à l'heure. Je soupire d'aise et cherche une position plus confortable. Alors que je m'apprêtais à m'endormir dans ses bras, des signaux d'alarme retentissent dans mon cerveau.

J'observe plus attentivement ce sur quoi je me suis installé et sens mes joues bouillonner quand je comprends que j'utilise la poitrine d'Olympe comme oreiller. Je tente de me redresser aussi vite que je le peux, mais la forte poigne d'Olympe m'en empêche et me rapproche d'elle en me collant le visage dans son cou. Les palpitations affolées de son cœur m'indiquent qu'elle est autant gênée que moi de la situation. Je reste donc caché dans le creux de son épaule, muet et attentif aux moindres de ses faits et gestes.

Le silence qui régnait auparavant dans la serre revient au galop, accentuant mon malaise. C'est la première fois que je suis aussi proche d'une femme qui n'est pas de ma famille, dans ma vie de vampire et la période où j'étais encore humain confondues... Mais Olympe ne semble pas prête à se mouvoir pour rompre le contact, alors je me contente de patienter et de fermer les yeux en tentant de penser à autre chose. En vain. L'odeur de sa peau humide de sueur m'attire comme la lumière avec la noctuelle pendant son vol nocturne. Mes crocs s'allongent et viennent titiller mes lèvres. J'essaye de les recouvrir pour qu'Olympe ne les sente pas. Je ne veux plus qu'elle me fuie.

— Mords-moi.

Surpris par la voix rauque d'Olympe, je tente à nouveau de prendre du recul afin de plonger mon regard dans le sien. Mais, encore une fois, elle me retient contre elle, comme si elle désirait que je ne voie pas son visage.

— Je ne peux pas, réponds-je en me laissant faire. Je n'ai pas envie de manger de toute façon.

C'est un énorme mensonge, bien évidemment. Je meurs de faim après la lutte que j'ai menée contre Marius. Mais je crains le pire quand le sang d'Olympe, si douloureusement délicieux, inondera sa bouche.

— Menteur, souffle-t-elle à mon oreille. Je sais que tu crèves la dalle et que tu es apeuré, car tu ne te contrôles plus. Mords-moi et bois tout ton soûl. J'ai guéri toutes les blessures que j'ai pu. Mais pour les autres, seul mon sang peut leur permettre de se refermer. Alors, bois pour reprendre des forces.

Un grognement s'échappe de ma bouche. Mon instinct me hurle qu'elle a raison, que je dois la mordre à la gorge et engloutir des litres et des litres de son essence vitale. Après tout, je dois guérir pour la protéger. Mais ma conscience m'aboie que je ne peux pas planter mes crocs dans la chair d'un être vivant... Que ce n'est pas humain. Que c'est contre nature ! Je lâche une plainte alors qu'un combat intérieur se déroule dans mon esprit. J'ignore quoi faire, qui croire et ce qui est bien ou mal.


Je gémis tandis que les arguments d'Olympe m'arrivent en pleine figure. Mes doigts se referment un peu plus dans son dos. Mes crocs aiguisés viennent titiller sa peau, comme s'ils connaissaient déjà le chemin par cœur, alors que les doutes continuent de m'assaillir, de me déchirer. Olympe inspire à fond et je craque. Je laisse mon côté vampirique et ma faim prendre le dessus. Je lâche les chevaux, la mords jusqu'au sang et me délecte de la saveur métallique de son essence.


Blood & Flowers 1 - Olympe & VladimirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant