Chapitre 24 : Olympe [corrigé]

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Je n'en peux plus de cette attente ! Je pourrais m'évanouir d'un instant à l'autre si je n'étais pas en plein face à face avec la mort. Même Zacharo me paraît être un enfant de chœur à côté de Marius... Pourtant, il m'en a fait voir des vertes et des pas mûres.

J'ai voulu m'enfuir quand Marius avait le dos tourné, mais mon instinct m'a hurlé que je serai trop lente. Alors je me suis cachée dans mon armoire, le seul endroit que je trouvais sécurisant sur le moment. Dès qu'il s'est aperçu de ma disparition, il a filé dans le corridor. J'en ai profité pour sortir du placard, mais il est revenu bien plus vite que ce que j'avais prévu et je n'ai pas eu d'autres choix que de me planquer à nouveau. Il s'est éloigné encore une fois et j'ai visualisé le couloir d'où il venait. La suite de Vladimir se trouve tout au bout. Mais le chemin pour l'atteindre était long et sans cachette. En plus, Vladimir doit sans doute être encore dans la cuisine et je me serais heurtée à une porte verrouillée. Marius m'aurait repérée quand il serait revenu sur le seuil de ma chambre.

Mais, à présent, je suis bloquée dans mon armoire avec Marius qui s'amuse très clairement de la situation et ne cesse d'aller et venir devant ma planque.

J'aurais bien voulu prévenir mes hôtes, mais je sais qu'au moindre son j'alerterais aussi Marius. Je déglutis sans bruit alors que ce dernier claque ses semelles contre le parquet. Il s'arrête une nouvelle fois en face de moi et je ferme les yeux, comme si cela suffisait à ce que je disparaisse. Une goutte de sueur glacée dévale sur mon échine et un long frisson fait se dresser tous mes poils. J'arrive à deviner le regard perçant du vampire se poser encore et encore sur le placard, sa main se faufiler vers la porte et ses doigts entourer la poignée. Marius s'approche du meuble en bois massif et s'immobilise à quelques centimètres. Je sursaute quand un léger bruit me parvient et je plaque ma paume plus fort contre ma bouche.

— Mademoiselle, souffle sa voix, je sais que vous êtes dans cette armoire. J'ai une proposition à vous faire. Sortez, que nous puissions discuter calmement de la situation.

Je reste muette face au ton mielleux et à l'incroyable politesse dont il fait soudain preuve. Je suis perdue. Vladimir m'a expliqué et montré le caractère de son frère via l'hypnose. Rien que d'y repenser me terrifie. Pourtant, je suis enfermée dans la même pièce que cet homme et il me faut prendre une décision. Une décision qui influera sur la manière dont se déroulera la suite de notre altercation... J'inspire un grand coup et lève le regard vers le plafond de mon armoire. Quoi que je choisisse, je ne serai pas libre de mes mouvements, mais si je sors de moi-même, Marius sera peut-être moins brutal avec moi. Qui sait ce qu'il serait capable de me faire si je refuse de lui obéir ?

Fébrile, je pousse la porte et me faufile prudemment dans l'interstice. Je suis sur mes gardes au point que mes gestes semblent décomposés... Lorsque je fais face à Marius, un sourire se dessine sur son visage. Je contrôle la peur qui pulse dans mes veines tant bien que mal et observe mon bourreau pour tenter de deviner ce qui se trame dans sa tête. Il fait un pas dans ma direction. Je m'éloigne d'autant pour garder une distance de sécurité entre nous.

— Bien, déclare-t-il en comprenant qu'il ne pourra pas plus s'approcher de moi. J'ai découvert ce qui intéresse mon frère chez toi.

Je ne pipe mot et me contente de ne pas briser notre contact visuel. Il a jeté sa politesse aux oubliettes et mon petit doigt me dit que ce n'est pas bon signe. Il brandit sous mon nez mon livre sur les plantes qu'il a sans doute récupéré lors de son tour dans la pièce.

— Tu sembles avoir de grandes connaissances en botanique et en médecine sans même avoir étudié ces disciplines. Tu sais des choses que ce livre ne mentionne pas. Alors, tu l'as complété, et cela malgré tes lacunes en écriture.

Comme je ne réagis toujours pas, Marius s'élance vers moi et me plaque contre le mur. J'écarquille les yeux, affolée par la tournure de la situation, et me débats. J'ai conscience que c'est inutile. Il est bien plus fort que moi. Il ne bouge pas d'un seul centimètre et se contente de ricaner en me regardant faire.

— Les dieux t'ont offert un don, mulâtresse. Un don de guérison que tu ne mérites pas au vu de ton statut et de ton rang social.

Mes mâchoires se crispent à l'entente des injures qu'il me crache une nouvelle fois en plein visage. Mais, comme depuis le début de notre altercation, je ne dis rien. Après tout, le silence est le plus grand de tous les mépris et, de ce que j'ai cru comprendre, Marius déteste qu'on l'ignore.

— Je pense que tu sais à quel point je suis avide. Oui, oui, enchaîne-t-il dans un ricanement en voyant mes yeux s'écarquiller, je connais mon frère. Et je me doute qu'il serait prêt à tout, même à la trahison, pour garder à ses côtés une pièce maîtresse comme que toi.

— De quoi parlez-vous ? craqué-je finalement alors que les mystères ne cessent de s'accumuler.

— Pour notre race, le don de guérison correspond au fantasme d'immortalité chez les hommes. Nous voulons être plus puissants et, pour cela, nous devons être invincibles. Alors, avant de se munir d'une bonne force de frappe, il est essentiel de se soigner sans restriction. Et tes connaissances me seraient tellement bénéfiques, mulâtresse. Je pourrais être au sommet de la hiérarchie vampirique si tu t'alliais à moi...

— C'est non, le coupé-je d'un ton sec, empli de haine.

Ce n'est sans doute pas la meilleure chose à dire à l'homme, le vampire qui me menace depuis tout à l'heure, mais il est hors de question que je plie à ses demandes. Son regard s'assombrit et je comprends que ma vie ne tient plus qu'à un fil. Il s'approche de moi et, alors que je m'apprêtais à hurler, il plaque sa grande main sur ma bouche. Mon cri meurt dans ma gorge et je me contorsionne pour échapper à sa prise. Mais rien n'y fait. J'essaie de lui mordre les doigts, mais il darde ses iris tempête sur moi et je me fige, paralysée par la colère qui y danse. Un sourire satisfait s'épanouit sur son visage en voyant que je me calme et il accentue la pression de sa paume sur mes lèvres. L'air se raréfie dans mes poumons et la panique qui fait tambouriner mon cœur contre ma poitrine augmente d'un cran.

Je tente à nouveau d'appeler à l'aider, mais rien à faire. Des larmes d'impuissance perlent aux coins de mes yeux. Je maudis la force surhumaine de ce vampire millénaire, de cette ordure qui ne va pas tarder à m'ôter la vie sans le moindre regret. Il va me tuer pour m'arracher mon don de guérison, la seule chose qui m'appartienne encore entièrement... Ce qui est à la fois ma fierté et qui a causé ma déchéance.

Marius sourit à nouveau, un air victorieux imprimé sur son visage taillé à la serpe, et me dévoile par la même occasion ses canines aiguisées. Je couine et rue de plus belle alors que l'espace entre nous se réduit toujours. Je tente le tout pour le tout en lui envoyant un coup de pied dans le tibia. La force du désespoir et l'effet de surprise me permettent de lui asséner un second coup. Au niveau de l'entrejambe cette fois-ci.

Il grogne et tombe à genoux sur le parquet. Je m'échappe de son emprise et me précipite vers la porte. J'abaisse la poignée, mais le verrou refuse de céder.

— Putain... Putain ! paniqué-je alors que je l'entends se relever dans mon dos.

Je fais demi-tour et accours vers la fenêtre. C'est la dernière issue. Malgré la hauteur, je ne pense pas me blesser gravement grâce à l'épaisse couche de neige. Alors que je passe ma première jambe par l'encadrement, Marius rugit. Je sursaute et me dépêche de faire de même avec la seconde, mais, au moment où je m'apprêtais à me laisser tomber, ses doigts crochètent ma taille et me ramènent dans ma chambre. Je suis propulsée en l'air comme si je n'étais qu'un simple fétu de paille. J'atterris sur le lit et Marius me rejoint aussi vite qu'il le peut. Je hurle tandis que des flashs brouillent ma vision. Son corps est au-dessus de moi. Il m'épingle contre le matelas de ses mains puissantes. Et sa voix murmure des choses que je ne parviens pas à comprendre.

Mais qui est face à moi ? Qui me force une nouvelle fois à faire ce que je ne veux pas ?

Marius ? Ou... Zacharo ?

Blood & Flowers 1 - Olympe & VladimirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant