Chapitre 17 : Vladimir [corrigé]

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Les sanglots d'Hibiscus me parviennent alors que j'arrive à proximité de sa chambre. Sans m'en rendre compte, je ralentis le pas, comme si j'avais peur de l'état dans lequel je vais la trouver une fois la porte franchie. Je pose mon front contre le battant de bois, ferme les paupières et soupire.

Comment vais-je bien pouvoir lui expliquer tout ça ? La transformation de Thomas sous ses yeux, la nature d'Andreas et... la mienne.

Les « créatures de la nuit » ne sont pas seulement des fêtards, contrairement à ce qu'Hibiscus a sous-entendu vis-à-vis d'Andreas tout à l'heure. Elles ne sont pas non plus que le fruit du fantasme des plus rêveurs. Ou des plus peureux. Je souffle un grand coup pour me donner du courage, puis enclenche la poignée de la porte qui me sépare de ma protégée.

De quelle manière me regardera-t-elle une fois qu'elle sera au courant ? Est-ce qu'elle voudra bien rester ici quand je lui aurai tout dévoilé ?

J'imagine notre discussion et les paroles que nous allons échanger. J'ai beau faire mille et un scénarios, cela se termine toujours de la même manière. Elle en sanglots, déçue de ce que je suis et de qui je suis. Elle me tournera le dos et je la perdrai à jamais.

Rien que d'y penser, j'ai déjà le cœur en lambeaux. Certes, je l'ai sauvée depuis seulement deux petites semaines, mais comme je passe mes journées à ses côtés, je me suis attaché à ce bout de femme. Elle me permet d'entrevoir une facette plus réjouissante de la vie. Et, pour cela, je lui dois toutes ces explications. Surtout après ce qu'elle a subi et tout ce qu'elle m'a apporté au cours de ces dernières semaines.

La poignée s'abaisse sous le poids de ma main. Le panneau de bois s'entrouvre en grinçant et je pénètre dans l'arène.

— Hibiscus ? l'appelé-je en balayant la pièce du regard. Où es-tu ?

Seuls des sanglots étouffés retentissent près de la fenêtre. Là où se trouve le tapis qu'elle a adopté comme couche. Je m'approche à pas feutrés pour éviter de l'effrayer plus qu'elle ne doit déjà l'être. Je hoquète, sous le choc, quand elle apparaît dans mon champ de vision. Elle est allongée en chien de fusil sur la descente de lit. Ses joues sont mouillées par des torrents de larmes et ses yeux, rougis d'avoir trop pleuré, fixent le vide. Je m'abaisse pour être à sa hauteur et lui montrer que je la considère comme mon égale. Elle sursaute en s'apercevant que je suis à ses côtés et m'adresse un regard plus noir encore qu'une nuit sans lune. Je déglutis face à toutes les accusations muettes que j'y lis.

— Pourquoi...

Pourquoi quoi, Hibiscus ? Pourquoi Thomas a tué ton ami ou pourquoi c'est possible que ce soit un métamorphe ?

— Les hommes qui se transforment en loup, ça n'existe pas..., dit-elle à la place.

— Dans le monde de monsieur et madame Tout-le-Monde, non, en effet, soupiré-je en m'asseyant en tailleur. Mais pour les autres, ceux qui connaissent l'existence des créatures de la nuit, si.

— Non...

Je ferme les yeux et relève la tête vers le plafond face à son entêtement. Mais je me reprends : j'ai été comme elle a une époque... Est-ce que je dois lui montrer ce que j'ai vécu et le pourquoi du comment le surnaturel est né ? Ou... juste lui expliquer ?

Je suis tellement lâche...

— Hibiscus, murmuré-je en essuyant mes mains moites sur mon pantalon. Raconte-moi la légende de la création de Shuarachas.

Elle hausse l'un de ses sourcils, dubitative quant à l'utilité de la démarche, mais finit par abdiquer en s'apercevant que je suis on ne peut plus sérieux. Elle rompt notre contact visuel et commence son récit, le regard dans le vague.

Blood & Flowers 1 - Olympe & VladimirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant