lxxi. Des vagictivités

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Highland, Écosse
Heure locale : 08h00

Le matin.
Ah! Pour cette kermesse qui s'annonce colorée de retournements, il fallait que nos hôtesses soient plus matinales que jamais.
Huit heures pile. Les servantes écartent les ventaux des boudoirs respectifs de nos chères demoiselles, encore sous l'emprise des duvets soporifiques de Morphée. Des rideaux qui se fendent.

Des étirements saupoudrés de bâillements.
- Votre bain est prêt, mademoiselle Venus.

Des railleries pour certaines.
- Just five minutes more and I'm up, baille Chanda. ( Juste cinq minutes encore et je me lève. )

De l'excitation chez d'autres.
- This dress on you, holy shit! (Cette robe sur toi, punaise! )
- I do like your skirt, twin! (J'adore ta jupe. )
- You all, my ladies are gorgeous. ( Vous êtes toutes deux resplendissantes, mesdemoiselles. )
- Thanks! ( Merci! )

Il en fallait bien plus pour ne pas faire de cette journée ce à quoi elle a toujours été destinée. À la réception des convives, en soi. Nombreux prétendent que les événements mondains de ce genre n'attirent que plus d'ennuis à la noble société qu'elle n'en a besoin. Et apprêtez-vous, les ragots iraient jusqu'à raconter que moult jeunes demoiselles perdraient leurs fleurs au cours de ces trois jours. Il est bon de savoir que les ragots se propagent tels de petits bonbons de Saint-Patrick et nuls autres ne les alimenterait plus que les grandes bouches, celles qui définissent la vie de tous lorsqu'elles s'avèrent affamées et désœuvrées.

Mais, un fait reste intact, sel de toutes les mémoires ayant connu ne serait-ce une fois ces festivités. Il s'agit du Muret des secrets. Chaque année, de nouveaux dossiers font étalage sur les pierres grisâtres de cette façade, à l'arrière du château MacCrimmon. Quelques uns croiraient que cette œuvre n'est rien d'autre que celle d'une femme. Alors que les femmes se pointent à tour de rôle du doigt, incertaines de leurs confidentes aussi frêles qu'elles soient, de leurs filles et je rajoute même, de leurs génitrices.

Ceci dit, nos délicieuses hôtesses sont prêtes à recevoir les invités venus des quatre coins du monde, parées de leurs plus beaux vêtements. Une robe rouge pour Venus. Un complet jupette et veste à carreaux pour Chanda qui éventuellement s'est légèrement surpassée avec son fascinateur vert bouteille. Quant aux deux jumelles, l'une à l'opposée de l'autre ménagent chacune un corsage soit par dessus une chemise soit sur une jupe.

Elles offrent à chaque convive une jonquille afin de leur souhaiter la bienvenue. Et pas que. Leurs langues roulent de petites scies qui ne perdent guère leur magie malgré l'épuisement de leur originalité à force de la rengainer : "Spring's light, conquered souls!" — "Lumière de printemps, âmes conquises.". Il n'en faut pas longtemps pour vider les premiers paniers de fleurs et d'en entamer d'autres. La propriété commence à se remplir progressivement et non seulement des carrosses se défilaient, surtout encore des anciens modèles de voitures très prisés de la haute société. Jusqu'ici, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes.
- Princess Kanade, tire la révérence Shelagh.
- Spring's light, conquered souls! adresse Chanda son plus beau sourire à un parfait inconnu.

L'homme, un descendant d'une lignée de barons, ainsi nommé Alistair Hambro, avoisine la quarantaine. Un célibataire endurci et grandement courtisé autant par les hommes que les dames dans sa contrée. Yeux d'un bleu océan, des cheveux aussi fauves que dorés, un visage taillé à la serpe. Brave. Loyal. Diligent. Tout ce dont une demoiselle peut rêver. Sans écarter non moins les femmes coquettes et mariées. Il rend à miss Chanda son sourire avant de retrouver son chemin.
- Welcome, mi lady!

La Belle et le DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant