xliii. Encore, ma Venus!

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Jour 2

Heure locale : 08h15

Venus

Une lumière intense frappe mes yeux. Et mon dos me fait affreusement mal. Je sens quelque chose bouger en dessous de ma tête. Doucement, j'ouvre mes paupières. Le soleil m'agresse et je dois plisser les yeux pour ne pas être éblouie. Mon regard chute sur une main sur mon épaule. Elle est bandée. C'est celle de Neres. Je tourne la tête et croise ses pupilles impassibles. Il n'a pas l'air d'avoir beaucoup dormi. Ou pas du tout.
- Tu t'es assoupie dans le canapé hier soir, dit-il d'un ton doucereux.
- Et toi, tu t'es reposé ?
- On doit sortir dans moins d'une demi-heure. Tu ferais mieux d'aller te préparer.

Je ne sais pas pourquoi mais mon cœur s'emballe dans la fusion de nos yeux. Les siens brûlent ma peau autant que le soleil. Honnêtement, beaucoup plus. Une sensation étrange s'immisce dans mon ventre. On dirait presque un pré où voltigent des papillons au gré d'une brise agréable.
- Tu avais prononcé un mot.

Je me redresse. Toute son attention repose sur moi.
- Quel mot ?
- Quand tu disais être désolée.
- Geagte ?
- Oui. Où l'as-tu appris?
- Hier. Chanda et Jodie m'ont enseignée quelques mots dans une des langues locales. En Afrikaans, Geagte est un attribut à une personne importante...Voilà, je termine en baissant les yeux.

Le silence devient dès lors maître des lieux. Je fouille le tapis en fourrure dans l'espérance d'y trouver une entrée où m'enfoncer. J'ai la sensation de consumer. Et j'ai raison. Mon corps chauffe. Le sofa s'allège tout d'un coup. Neres s'en est décollé. Sans jamais détacher mon regard du plancher, je compte ses pas qui se dissipent rapidement. Vide. Je suis vide.

~~~

- Encore, ma Venus !
- Geagte, répète-t-elle, la lèvre inférieure tremblotante.

Quelques heures plus tôt

Venus

- Tada!
- T'es canon dans cette robe, complimente Chanda.
- C'est splendide! j'appuie.
- Mademoiselle, faites attention voyons. Cette tenue m'as pris plus de nuits blanches qu'un hibou.
- C'est bien votre boulot, mon cher Damian.
- Pour un Espagnol, il a plutôt hérité d'une authentique face card. Mais pour quelqu'un qui s'exprime parfaitement en italien, Jodie, je te promets qu'il a déjà le sang qui bout. Donc, fais gaffe à ce putain de joujou.
- Ouais. T'inquiètes.

De mon côté à moi, j'essaie juste de ne pas m'étouffer dans le corset de la robe. Et un essayage de moins.

La voiture de Jodie s'éteint à peine que nous en sortons toutes. Chanda me lance un regard taquin en apercevant celle de Neres, plus vers la droite.
- On dirait bien que notre cher Nene t'a attendue toute la journée.

Compulsivement, elle sourcille et m'ôte un grand soupir.
- Vous venez? nous interpelle Jodie, depuis les marches du perron.
- On arrive!

Je m'empresse de suivre les pas de Chanda. Nous entrons dans la maison où un mélange de voix familières et inconnues submerge.
- Les filles, vous pensez qu'on devrait mettre des rhododendrons et des violettes cornues ici ? Des agapanthes peut-être? Ou plutôt dans le jardin? interroge Chanda, une expression soudainement crispée.
- Si ça s'trouve, on devient fleuristes, lâche mollement Jodie.

La Belle et le DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant