x. The Niac

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Athènes, Grèce
Heure locale : 23h20

Neres

J'avale goulûment la vodka qui coule de ma flasque argentée en écoutant les conneries de Maxim.
- Tu sais la différence qu'il y a entre nous les fumeurs et vous les alcoolos?

Je le regarde écraser son mégot sur le sol hideux du sous-sol en ruine. Puis, ses iris verts cognent les miens, plus qu'agacés par la situation.
- Les alcooliques ont la pisse facile, pouffe-t-il.

Idiot un jour, idiot toujours. Je l'apostrophe en rangeant ma flasque à alcool dans l'une des poches de ma veste en cuir.
- Tu ferais mieux de la boucler et de te bouger. On va pas y passer toute la nuit.

Je reprends la route que nous avons égarée quelques minutes plus tôt. Maxim me suit.
- Attends-moi mec! s'élance-t-il, produisant de terribles échos avec sa voix de con.

Je fais volte-face et lui jette un regard assommé de menaces de mort. Puis, je me retourne. La fin du tunnel marque le début d'escaliers lugubres. J'allume la torche de mon portable. Et déjà à la troisième marche, Maxim geint comme une pute.
- Bordel! Une araignée m'a capturé! gesticule-t-il.

Je l'attrape violemment par le col et le plaque contre le mur.
- Un seul mot encore Strachan. Et je te donne à bouffer aux rats.

Il déglutit en me dévisageant. Je le lâche pour poursuivre ma descente. Franchement, qu'est-ce qui m'a pris de l'emmener avec moi? J'aurais dû demander à Gunther de me suivre putain.

Une fois en bas, nous empruntons un couloir. De vielles portes métalliques s'éparpillent de part et d'autre. Je fais signe à Maxim de fouiller à gauche et moi je me chargerais d'inspecter à droite. Mais, les portes sont verrouillées par des cadenas.
- C'est fermé, remarque Maxim.
- Sers-toi de tes méninges, Strachan!

J'arrache de la poche arrière de mon pantalon mon revolver puis je fais péter les cadenas sur les portes par des tirs secs. Maxim m'imite. Nous commençons à fouiller dans les pièces qui semblent être des cellules de prison. De mon côté, rien dans les trois premières.
- T'as trouvé quelque chose? me lance Maxim, l'air essoufflé.
- Si c'était le cas, tu l'saurais, je peste.

À peine je pousse la quatrième porte que le cri déchaîné de Maxim me fait retourner sur mes pas. Je crois bien qu'il l'a trouvé.
- Oh bordel! Fais chier! J'ai envie de gerber! Neres!
- Ferme-la, je lui frappe la nuque.
- Bordel, tu me dis de la fermer alors qu'il y a un squelette effrayant là? se scandalise-t-il.
- La prochaine chose effrayante que tu verras si tu n'obéis pas c'est mon putain de visage qui se réjouit de t'étrangler, j'assène en le poussant de mon chemin.

Ma torche se pose pile-poil sur Norbert Grivas. Apparemment, il a perdu un peu de chaire. Un rictus sadique se dessine sur mes lèvres à cette pensée plus qu'amusante. Des rats se faufilent dans ses restes et une odeur glauque émane de la cellule. Un ancien sac en cuir nage près de son squelette dans la poussière du sol. Et aussi, dans les crottes des petites bêtes qui lui tiennent compagnie.
- Va chercher le sac, je teste le courage de Maxim, histoire de me foutre de sa gueule.
- Mais t–tu sais qu...
- J'ai dit va chercher le sac, j'hausse le ton, faussement énervé.
- C'est pas juste, ronchonne-t-il en s'exécutant.
Il ramène le sac que je me fais un plaisir de déballer. Une boîte cylindrique, fine et en alliage refroidit ma main. Je la sors du sac et l'ouvre. Un parchemin s'en éjecte. Je le déplie et les seuls deux premiers mots suffisent à me faire oublier les deux longues heures de recherche pendant lesquelles je me suis coltiné ce crétin de Strachan.

THE NIAC.

- Parfait! je souffle en le rangeant.
- Alors, c'est bien ça? me questionne mon acolyte.
- À moins que ma gueule de fée ne le montre pas. Allez, on dégage!

Maxim acquiesce puis nous quittons les ruines de cette propriété ayant autrefois connu la vie.

~~~

Archipel de Santorin, Grèce
Heure locale : 01h57

Venus

- Et c'est ainsi que je suis parvenue à fuguer de chez moi à mes quinze ans.

Chanda finit justement de me raconter l'un des moments les plus marquants de sa vie que son portable sonne.
- Hey bébé!
-...
- T'es bien arrivé à Toronto?
- ...
- Oui, j'ai diné, sourit-elle.
-...
- Je suis avec mon amie. On fait une soirée pyjama.
-...
- Allez, va-t-en p'tit coquin.
-...
- Bisous! Bye!

Elle raccroche. Elle est encore souriante. Je ne la lâche pas du regard. Son fiancé la rend si heureuse...

- Dis donc toi, tu ne serais pas tombée sous mon charme? À force de me fixer comme ça, je larguerais presque mon cochon d'inde pour toi.

Elle jette son portable et bondit sur moi. Elle me chatouille. Je la prie d'arrêter.
- À une seule condition! Promets que tu accepteras.
J'hoche la tête et elle m'épargne.
- Avec Alan on s'marie dans trois mois, débute-t-elle. Et je veux trop que tu sois ma témoin de mariage. Les témoins de mariage, ce sont ceux devant qui les futurs mariés prêtent serment, explique-t-elle avant même que je ne lui demande. Ils font aussi de longs discours barbants, mais rassure toi, je t'aiderai à écrire le tien. Et ils aident aussi les fiancés à préparer le jour J. Donc, tu dis oui? affiche-t-elle une petite moue.

J'étudie son visage. Même si je n'ai jamais assisté à un mariage et que tout ça est nouveau pour moi, j'agrée de bon cœur.
- Si tu y tiens tant que ça, d'accord.

Elle saute dans mes bras et m'étouffe presque.
- Ahh!! hurle-t-elle de joie.
- Tu m'étouffes, je souffle.
- Oups! rit-elle en se décollant de moi.
- J'ai accepté parce que tu es une bonne personne, je lui confesse sincèrement.
- Et aussi ta toute première amie, me fait-elle des papouilles dans les cheveux.

Je rigole en l'admirant. Elle est si douce. Et pleine de vie. Je la vois saisir la télécommande sur le divan et défiler les images sur la télévision. Elle met de la musique.
- Allez viens on danse! m'entraîne-t-elle dans sa folie.
- Je ne sais pas danser.
- Je t'apprendrai, prend-t-elle délicatement mes mains.

Je me laisse faire et nous esquissons quelques pas maladroits sous la musique entraînante. Soudain, une violente migraine me saisit. Je ralentis et garde ma tête dans ma paume, comme si elle allait tomber. Inquiète, Chanda stoppe tout mouvement et m'aide à me rasseoir. Elle m'apporte ensuite un verre d'eau que je vide d'une traite.
- Qu'est-ce qui s'est passé Venus? Tu te sens mieux?

J'acquiesce en tirant une grimace. Mon malaise est encore présent.
- Je suis fatiguée, lui dis-je d'une voix fluette.
- Tu peux marcher?

J'hoche la tête et elle me donne un coup de main pour que je me lève.
Elle prend le soin d'éteindre la télévision et m'épaule jusqu'à la chambre. Elle me force à me reposer en s'engouffrant sous ma couverture, juste à côté de moi. N'ayant pas le choix, j'obtempère.

La Belle et le DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant