xxi. La princesse Raiponce

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Venus

Nous sommes trois dans la pièce. Mais, malgré le silence ambiant, j'entends encore le bruit des balles. Des corps qui échouent. Le souvenir des hommes au teint livide qui, inanimés se plaisent dans des mares de sang. Tous ces objets de destruction. Ma mère qui n'est jamais venue me voir. Toutes ces idées défilent en boucle dans ma tête jusqu'à ce qu'une sonnerie secoue l'atmosphère électrique. C'est le téléphone de Neres. Il sort de la pièce. Je joue toujours avec mes doigts. L'impression que je suis observée se confirme lorsque mes yeux croisent ceux de la dame aux cheveux gris. Elle porte des lunettes carrées et a de grands yeux verts. Son sourire est chaleureux et n'a rien de méchant. Elle me demande :
- Tu t'appelles comment, ma jolie?

L'absence de Neres m'enlève un lourd poids de la conscience et le sentiment de sécurité que me procure la vieille femme m'amène à lui adresser la parole.
- Venus.
- Oh! Beau prénom! sourit-elle. Et la belle Venus m'accorderait-elle l'honneur d'échanger quelques minutes avec son humble personne?

Je croise lentement ses iris qui ressemblent à l'océan et détourne rapidement le regard. C'est avec une grande gêne que j'acquiesce.
- Tu as grandi en Italie, j'imagine?

J'hoche timidement la tête.
- Tu y vivais avec tes parents?
- Seulement ma mère, je réponds tout bas.
- Tu aimes ta maman?

Sans hésiter, j'agite activement la tête.
- Alors, fais-lui plaisir et sens toi à l'aise avec moi. D'accord?

J'acquiesce à nouveau.
- Apparemment, tu es peu loquace.
- Vous connaissez ma mère?
- Elle était une vieille amie à moi. Dina, avance-t-elle.
- C'est son prénom, je confirme.
- Tu vois. Tu n'as rien à craindre avec moi.
- Oui...Vous savez pourquoi elle n'est pas venue me voir jusqu'à présent?
- Je pense que ta maman doit avoir énormément de choses à faire, ma petite. Tu verras, dès qu'elle aura un peu de temps, elle viendra. Crois-moi! me rassure-t-elle.

Je bois sans mot dire ses paroles.
- Tu peux m'appeler Margaret.
- D'accord!
- Et dis-moi, pour quelle raison tu te retrouves sur cette magnifique île ?
- Je...euh...

Mes jambes remuent nerveusement et mon regard se tourne vers la moquette jaune de l'endroit. Un noeud se forme dans ma gorge et l'incapacité de parler me submerge.
- Ne te sens pas obligée, voyons! Je ne te forcerai jamais à rien, ma petite.

Je détache mes yeux du tapis et observe Margaret gribouiller dans son calepin. Une fois fini, elle reprend :
- C'est quoi ton fruit préféré? Tu aimes les dessins animés? Parle moi un peu de toi, enfin si tu n'y vois pas d'inconvénient.

J'étudie son visage rayonnant. Cette femme a un sourire radieux. Et sa voix est tellement attendrissante.
- J'aime la mangue.
- Bien! Tout comme ma fille. J'avoue que c'est un fruit plutôt agréable et très exotique, rit doucement Margaret.

Je souris légèrement puis me rappelle soudain que je n'étais pas venue seule. Je regarde la porte derrière laquelle Neres avait disparu des instants plus tôt et j'angoisse au fait qu'il resurgisse à n'importe quel moment.
- Il ne reviendra pas, m'affermit Margaret. Sacré Neres! Il doit être parti en ce moment même où toi et moi discutons.

Ses mots résonnent dans ma tête. Mon cerveau me ramène brusquement à cette scène atroce. Il était incontrôlable. Effrayant. Sans pitié. Un frisson de peur galope dans ma colonne vertébrale. J'en frémis.
- C'est qui ta princesse Disney préférée?

La Belle et le DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant