La Belle et le Démon

Recap 1.10

22 décembre
Manhattan, New-York, USA
Heure locale : 10h50

Venus

Journée saut en parachute.
La veille, Neres m'avait informée qu'il était temps qu'on reprenne notre petit jeu du loup et de l'agnelle. Techniquement, c'est le sien et jamais, au grand jamais je ne me suis plue à cela. Mais cette fois-ci, il a envisagé les choses différemment. Il m'avait avouée que dernièrement, je lui faisais ressentir tout sauf de la négativité et qu'il se sentait comme sur un petit nuage. Pour ainsi conclure, afin de partager ses sentiments avec moi (qui ne veut vivre qu'une vie paisible), nous allons surfer sur les nuées et peut-être mourir dans les airs dans les bras de l'autre— quoique cela paraisse vachement romantique.
J'ai quelque peu aussi remarqué qu'il a réduit sa consommation de cigarettes pour une quelconque raison qui m'échappe. Tout ce dont je suis réellement convaincue pour le moment, c'est que je ne veux absolument pas sauter de cet avion. Je n'ai pas ce cran. Oubliant presque que je suis déjà scellée à lui tel un bébé kangourou à sa mère, j'ai le tournis quand je jette un coup d'œil en bas. Je vais vomir.
- Ne regarde pas en bas!

Instinctivement, le bras de Geagte recouvre mes yeux si bien que je ne parviens même plus à distinguer une seule trace de lueur blanche. Il sent bon le propre, comme à l'accoutumée avec un léger soupçon de parfum brut et masculin. Sentir son corps près du mien me fait l'effet d'une bombe à retardement. Je crains le fait d'exploser d'un moment à l'autre:
Un papillon s'échappe de mon estomac dès l'instant où il ouvre de nouveau la bouche. Je crois bien qu'il s'adresse à celui qui nous a condamnés avec ces cordes.
- If it's all good, tell me! (Si c'est bon, prévenez-moi! )
- Just one more minute, then u could fly like a bird, sir! ( Encore une petite minute ensuite, vous pourrez voltiger tel un oiseau, monsieur. )

Plus rien ne se fait entendre dans cette langue qui m'est totalement étrangère jusqu'à ce que la voix de Geagte rejaillisse sur moi.
- Dans quelques secondes, ma petite agnelle. J'espère que tu as hâte.

Son ton était égal mais il définissait quand même un arrière plan moqueur.

Youpi. Je vais mourir.

- Est-ce que c'est vraiment nécessaire? je lui demande, peu sûre de moi.
- Aussi longtemps que je le jugerai, oui. J'aurais pu te jeter du haut d'une falaise, tu sais. Remercie-moi plutôt pour ma bienveillance.

Dit celui qui me force à sauter d'un avion contre mon gré.

Il est vrai qu'il aurait pu être plus pénible que ça. Me pousser depuis le toit de l'immeuble dans lequel nous logeons aurait pu faire l'affaire, non? Ou attendez, me ligoter dans une fusée et me relâcher par la suite dans l'espace? Un classique.
- You ready? ( Vous êtes-prêts? )
- Yes, dit Neres. ( Oui. )
- Go!

Avant qu'un hurlement d'épouvante ne me transcende la gorge et que mon corps ne soit propulsé dans le vide, je perçois le murmure de Geagte : "Pas désolé, ma Venus!"

Arrachez-moi le cœur putain!