L'hiver était tombé dans la ville de Londinium comme tous les autres. Le froid mordant de l'air marin avait glacé les gouttières et recouvrait la ville d'une pellicule de givre. Les personnes sortaient peu de chez eux et bien que le soleil filtrât parfois la brume qui venait du port, il était difficile de ne pas se sentir totalement isolé sur cette immense île. Sire Neven pourtant avait toujours aimé y vivre, peu importe les saisons, Londinium était un paradis pour l'explorateur qu'il était. En tout cas, qu'il avait été.
Le port reliait les plus grandes cités du continent, au Nord comme au Sud et lui permettait même de s'aventurer dans les terres inconnues, de l'autre côté de la carte du monde connu. Des terres encore empli de magie, aussi ancestrale que celle de la forêt des Quatre Cent Dieux, des marécages de Pandore ou encore de la Ceinture d'Os. Des terres que les hommes n'avaient jamais foulées, tout comme la contré du Lac d'Urenal.
Avant de connaître sa femme, cela avait été son objectif ultime, répertorié l'autre côté du Monde. Cependant elle était tombée malade, un hiver comme celui-ci l'avait emporté alors que sa fille était encore bébé. Il avait abandonné les voyages, non sans peine mais il n'avait aucun regret. Sa fille était ce qui comptait le plus à ses yeux, elle était devenue son seul et unique objectif.
Les années passant, il avait trouvé un autre intérêt à ses années d'exploration, il alimentait les ouvrages, les bibliothèques du Monde entier en retranscrivant tout ce qu'il avait trouvé, exploré. Les contes et légende, la géographie, les créatures et plus particulièrement sur l'histoire. Celle qui le fascinait plus que n'importe quelle autre, l'histoire de la famille de Vagari.
Ses origines, leur sensibilité spirituelle et le lien qu'elle avait avec des forces aussi anciennes que les mages du Geai Bleu. Il y avait tant de livre sur les cinq protecteurs de la forêt des Quatre Cent Dieux mais si peu sur la famille de Vagari avant l'Empereur Eivor.
Le lieu même où elle avait vu le jour était inconnu, car tous savaient qu'Agora était la terre des Bang, Vulci était une Capitale crée après avoir laissé Mirin aux Seigneurs historiques de la région. Et Haendel n'avait jamais été que les terres des Sørensen dont Fenrir était le dernier représentant connu.
Pour Sire Neven, il n'y avait aucun doute, les Vagari venait d'un autre territoire, certainement caché ou détruit depuis des siècles. Peut-être même qu'ils ne restaient jamais à un seul endroit, comme des pirates ou les nomades d'Insomia, il avait navigué des décennies avant de décider de poser pieds à terre et de devenir les conquérants du Monde.
Ses recherches le menaient à passer des heures dans son bureau, parfois il partait jusqu'à l'école d'Oxen qui détenait de très anciens ouvrages de tous lieux. Il trouvait des indices, des témoignages en langues anciennes qu'il mettait du temps à déchiffrer mais qui le ravissait dès qu'il entendait parler d'un membre présumé du peuple qui avait vu naître les premiers Vagari. Des hommes à la peau clair et les cheveux noirs, aussi fins que des fils d'araignées et qui avait apporté les premiers signes de magie utilisée par des hommes sur le Continent.
Jusqu'à trouvé le premier nom, le tout premier Vagari.
Shinrei Vagari.
Ce soir d'hiver, alors qu'il lisait le nom de l'homme qu'on décrivait comme un conquérant, qui faisait renaître les plantes mortes et ramenait la pluie dans le désert. Les premiers signes de magie sur des terres hostiles, aux peuples éparses et solitaires. Shinrei Vagari était arrivé comme un dieu, avec sa science et ses sortilèges, jusqu'aux portes de la terre des Quatre Cent Dieux.
Sire Neven avait du mal à respirer alors qu'il voyait le dessin griffonner sur le parchemin, le dessin de cinq hommes encapuchonnés devant la tête couronnée de Shinrei, élu par les peuples qu'il avait rallié à sa cause pour passer le pacte. Le tout premier. Celui qui allait lier les cinq mages avec sa lignée. Chaque silhouette avait un dessin bleu sur le corps, correspondant à leur identité et la couronne sur la tête de Shinrei était en tracé au trait d'or.
« Incroyable », il ne peut retenir en passant le doigts sur le trait de fusain.
Soudainement un bruit dehors l'alerta. Il referma son livre, regardant par-dessus ses lunettes la porte de son bureau. Le bruit se répéta mais il venait de l'extérieur, dans la cour. Il se redressa, attrapant la couverture qu'il avait posé sur son siège ainsi que la bougie sur le coin de la table, puis s'enroulait dans la laine, il vint jusqu'au petit couloir qui menait à la porte des cuisines. Cette dernière était entrouverte et laissait passer le froid. Il referma lentement le loquet, ce dernier était chancelant, arraché. Il l'observa des longues secondes quand de nouveaux bruits retentirent dans la pièce. Il se retourna vivement, tirant sur la dague qu'il cachait dans sa ceinture et la pointa dans un recoin de la pièce, frôlant la peau d'un cou taché qui se révélait à la lueur de la petite bougie qu'il tenait dans son autre main.
« Qu'est-ce que... »
Un enfant. La petite poitrine soulever par le sifflement de sa respiration saccadée, le regard effrayé et déterminé à la fois. Crasseux, maigrichon et téméraire. Il se mordait les lèvres craquelées par le froid et sa salive. Ses joues étaient creuses et noircies. Et ses cheveux. Bien qu'ils soient sales, il n'avait aucun doute, ils étaient bleus. Un bleu qu'il avait déjà vu lors de ses voyages, un bleu qu'on condamnait au Nord et qu'on craignait au Sud.
L'enfant profita de sa surprise pour s'extirper de sa prise, il le poussa, renversa une chaise au passage et couru jusqu'à la porte pour s'enfuir mais alors qu'il tira sur la porte, une jeune fille apparu derrière, tenant un sceau de lait qui manqua de se reverser alors que le garçon tombait sur le sol, retenant un cri douloureux.
« Oh. Attention ! Oula...J'ai failli reverser tout mon lait, souffla la jeune fille. Mais qui es-tu, toi ? Pourquoi t'es dans ma maison ? Papa ! Qui c'est ? »
Son père était perplexe, il avait presque la même tête ahurie que le petit garçon qui ne savait même plus s'il devait s'enfuir ou juste se transformer en statue en espérant qu'on oublie sa présence.
« Eileen, ma chérie, je suppose que tu allais te faire un lait chaud, tu veux bien en faire un autre pour notre ami ? »
La petite regarda à nouveau le petit garçon puis tira sur son sceau, jusqu'à rejoindre le four à bois qui crépitait et réchauffait la pièce. Elle sortait une grosse casserole tandis que Neven s'approchait de l'enfant. Il recula maladroitement, se cognant au pieds du banc, effrayé et prêt à mordre, en juger par son air renfrogné. Neven ne put que sourire devant sa méfiance.
« Je suis Neven. Et elle, c'est ma fille Eileen. On te fera aucun mal. »
Le petit garçon regardait sa main, hésitant, puis la petite qui faisait chauffer le lait dont l'odeur commençait à se rependre dans la pièce et faire gargouiller son ventre.
« Du lait chaud avec un peu de miel, quand il fait froid, il n'y a rien de mieux. » Sourit Sire Neven.
Et son sourire suffit à détendre l'animal craintif, laissant alors sa petite main se glisser dans la sienne.
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LE GEAI BLEU [Skz Fanfic/TERMINEE]
Fiksi Penggemar⟪ On raconte que le Geai Bleu était un groupe de Mages particulièrement redoutables, originaires de la forêt des Quatre Cent Dieux. Une forêt enchantée, maudite pour certains, où vivent créatures légendaires, monstres mythiques où seuls des hommes à...