CHAPITRE 24 - Constance

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Florine et moi attendons patiemment que John et Isadora arrivent. Assises sur des chaises en bois massif sur la terrasse de ce restaurant de luxe dans lequel John nous a invitées, nous profitons des quelques rayons de soleil restants qui se reflètent dans le ciel car, bientôt, nous serons plongées dans la pénombre la plus pure et la plus intense. Mon amie en profite pour admirer le derrière bombé de bon nombre d'hommes bien habillés, qui inspirent un luxe qu'elle n'a jamais eu et auquel elle n'accèdera certainement jamais.

Nous sommes si différentes...

— Putain, alors celui-là, je croquerais bien dedans ! M'annonce-t-elle.

— Hein ?!

— Le mec, là ! Développe-t-elle en tendant le menton vers l'inconnu en question. Il a un morceau de cul !

— Parle encore plus fort, je t'en voudrais pas... Ironisé-je, en laissant la pointe de mon pied droit frapper contre le sol à force de patienter. Sérieusement...

— PUTAIN, ALORS C...

Sans hésiter une seconde, je me tourne dans sa direction et attrape sa bouche, que je camoufle sous ma paume. De ma main libre, je retiens sa nuque.

— La. Ferme. Merde.

Mon amie ne se bat pas. Elle se tait et, lorsque je la relâche, sort son portable pour pianoter quelques textos à d'autres amies que nous avons en commun. Elle est calme, détendue, apte à rire de tout et de rien.

Me concernant...

L'angoisse me consume, ce soir. Je redoute cet instant comme mon premier rendez-vous avec John, à l'époque. Je m'en souviens encore : je portais une jolie robe à fronces nude, ainsi que des escarpins rouges aux pieds pour contracter avec la simplicité de ma tenue. Comme sac à main, j'avais acheté un Guess pour l'occasion. Il était simple, mais efficace. John m'avait trouvé resplendissante. Les yeux dans le vide, j'ai presque l'impression d'entendre à nouveau les violons sur l'estrade du restaurant, et la voix suave du serveur qui nous proposait une coupelle de champagne. Je revois, sous l'écran de mes paupières humides, le regard de John sur moi, empli de bonheur et d'envie. Ce soir-là, nous avons couché ensemble pour ne plus jamais nous quitter. Et je pensais naïvement que notre amour allait durer pour l'éternité.

Je vais la tuer, cette petite conne qui m'a volé mon mari...

Et quand j'y pense, elle ne m'a pas pris que mon mari. Non, elle a fait bien pire : elle a pris ma maison, mon argent, mes activités... Elle a tout emporté avec elle. Elle me rendra tout, d'une manière ou d'une autre.

Je me répète, encore et encore, que ces deux-là cesseront leur relation lorsque j'aurais foutu mon grain de sable entre eux, et que celui-ci aura provoqué un immense cratère dans leur coeur.

— Constance ! M'interpelle Florine.

Soudain, je relève la tête et je perçois les mugissements du moteur de la Berline approcher. Je la reconnaîtrais entre mille. L'instant suivant, le véhicule débarque effectivement dans le minuscule parking et ralentit. Je ferme les yeux un instant pour tenter de me détendre, mais rien n'y fait. Je rouvre les paupières dès l'instant où le moteur se coupe. C'est alors que j'aperçois John qui, de son bras puissant, saisit le sommet de la portière du côté passager pour se hisser hors de son véhicule. Telle une princesse, Isadora patiente sur le siège passager. Ses longs cheveux clairs ruissèlent sur ses épaules comme une cascade légère, et j'aurais bien envie de les lui arracher un par un. Un regard furtif dans ma direction, puis elle le pose à nouveau sur John, qui tire la portière à lui et lui tend sa main libre pour l'accompagner.

Tu verras s'il te traitera comme une princesse longtemps !

Je connais John et ses pulsions, ma belle.

DADDY'S GIRL - TOME 2 - The GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant