CHAPITRE 18 - Isadora

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Je suis épuisée, et surtout, à bout de nerfs. Le téléphone sonne, encore et encore, et au moment où j'allais raccrocher en pensant qu'elle ne me répondrait pas, trop occupée à se faire faire sa permanente ou ses brushings déjantés chez le coiffeur ou à se faire chouchouter dans un centre de cure thermale, elle décroche.

Youpi !

C'est pas trop tôt !

— Allo ?! Déclare sa voix sucrée.

— Ouais, Constance, t'es où ? L'agressé-je directement, sachant bien que cette femme mérite en rien ma sympathie aujourd'hui, pour m'avoir laissée dans la merde.

Je suis assez remontée. J'ai passé une première journée éreintante. Je n'ai fait que courir dans les différents couloirs des milliers de bâtiments dans lesquels j'avais cours. J'ai passé des heures entières, en profitant simplement d'une pause de trente minutes à midi, à écrire encore et encore en écoutant les paroles de mes différents professeurs – certains intéressantes, d'autres sans queue ni tête. Entre chaque cours, le temps de changer de salle et de bâtiment, j'ai dû subir les plaintes et les railleries des centaines d'étudiants de notre cursus. J'ai, pour ainsi dire, les jambes en compote et le crâne en feu. Sans compter que je suis psychologiquement épuisée par les récents évènements. Et cette femme, en qui j'ai encore daigné faire confiance, m'a posé un lapin.

Il fallait s'y attendre...

Où avais-je la tête ?

On parle de Constance, là.

Comme j'entends cette dernière souffler dans le combiné et me mettre davantage les nerfs en boule, je continue mon discours. L'envie de l'insulter me démange, mais on ne m'a pas élevée ainsi.

— Tu étais censée venir me chercher, ce soir ! Pesté-je, comme si j'étais devenue la petite princesse à laquelle je refusais de ressembler un jour.

— Ohhhhh, pardon, ma chérie... S'excuse-t-elle, tandis que je sens un sous-ton ironique dans son timbre de voix. Je suis tellement désolée, je suis occupée... J'ai... J'ai oublié de te prévenir... Vraiment désolée, Isadora...

— Bien sûr.

— Je suis surbookée, tu sais... Continue-t-elle, comme si j'allais la plaindre.

Quelle naïveté.

— Surbookée ?! Répété-je. Tu bosses, peut-être ?

— Oh, ma chérie, voyons... Tu sais bien que j'enchaîne les rendez-vous...

— C'est ça.

Nous marquons une pause, chacune à un bout du combiné. Je ne cesse de passer en revue le nombre de fois où ma mère s'est rendue chez les coiffeurs, les esthéticiennes, les professionnels de la beauté, pour ressembler à une poupée Barbie, comme toutes ces stars de pacotille qui n'ont rien dans la tête. Décidément, elle ne vaut pas mieux que tout ce « beau monde ».

— Bon, écoute. Dans tous les cas, je n'ai pas la possibilité de venir te chercher avec un taxi, m'annonce tout à coup ma mère. Et le temps que j'appelle...

— C'est bon, j'ai pigé, conclus-je. Je me démerde.

— Que comptes-tu faire ?

— Je vais appeler John.

— Non ! S'offusque-t-elle sans attendre.

Je ne sais plus quoi lui répondre sur l'instant. Sa réaction est étrange, mais elle l'est tout de même beaucoup moins lorsqu'on sait que Constance est jalouse, possessive, et paranoïaque.

DADDY'S GIRL - TOME 2 - The GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant