CHAPITRE 12 - Isadora

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Quelques jours ont passé depuis ma petite « escapade » avec Constance. J'avoue avoir été sensible à ses charmes. Nous avons pu discuter de milliers de choses différentes. De la pluie, du beau temps, de l'université, de ma vie d'avant, et surtout, et c'est ce qui m'a brisé le cœur, de ses sentiments envers son mari. Si, quelques semaines auparavant, je pensais qu'elle ne souhaitait qu'entretenir sa vie de petite bourgeoise, je commence à me dire qu'effectivement, elle l'aime beaucoup plus que ce qu'il n'y paraît. Sa peur de le perdre est si grande que j'en ai eu de la peine. En un sens, je me suis retrouvée dans ses paroles. Et est-ce que je compte oublier John pour autant ?

Jamais.

S'il en venait à s'éloigner de moi comme il le fait avec elle, je crois que je ne pourrais pas le supporter. Il est toute ma vie. Il est à la fois mes battements de cœur et mon oxygène, l'eau qui circule dans mon corps et mon hémoglobine. Je suis coincée. Je ne vois aucune lumière au bout du tunnel, et ce n'est pas faute d'y avoir réfléchi, depuis. L'obscurité m'englobe en son sein, et ce, de plus en plus férocement. D'autant plus que mes doutes sur le métier qu'exerce John ne m'aident en rien.

Et si je couchais avec un mafieux ?

Est-ce que cela changerait quoi que ce soit ?

Quoi qu'il en soit, ce matin, je ne vois, au travers de la fenêtre de ma chambre, que des nuages noirs qui ont envahi le ciel. L'orage gronde au loin. Des éclairs illuminent l'horizon à intervalles réguliers. Le ciel n'est que le reflet de mon humeur, ce matin. Et le reflet de mon dilemme intérieur. Une voie sans issue. Une vie sans espoir. Comment pourrais-je ?

J'ai mal dormi, et je sais déjà que cette journée sera assurément pénible. Des frissons parcourent mon torse lorsque je relève ma lourde couette en duvet, malgré la chaleur estivale qui ne cesse de grimper encore malgré la pluie et les orages. Je reste comme cela, sans bouger, pendant de longues minutes, en toisant le plafond comme s'il y avait quelque chose d'intéressant à y voir. Lorsque je daigne enfin me redresser dans mon lit, il est déjà midi. Je n'ai pas souhaité sortir de ma chambre avant cette heure pour éviter d'affronter cette journée infâme. Ma tête sonne comme si j'avais subi une trépanation pour insérer des carillons dans ma boîte crânienne.

Je sors de mon lit, en culotte. La nuit a été chaude, malgré cette fraîcheur qui me parcourt alors qu'elle n'existe que dans ma tête. Alors, je saisis mon débardeur, sur la table de chevet, et recouvre ma poitrine. Puis, je saisis mon short en jean sur ma chaise de bureau et l'enfile à son tour. Lorsque je me mets enfin debout, j'effectue les quelques pas qui me séparent de mon miroir et observe mon reflet. Mes yeux sont entourés de cernes bleutés, et ma bouche est boursouflée.

Une super nuit !

Une super tête !

— Bon... Force à moi ! M'exclamé-je en serrant les poings le long de mon corps.

Je me dirige vers la porte de ma chambre et l'entrouve, tout en faisant des dizaines de prières. Quelques minutes plus tard, espérant que Dieu m'ait entendue, je descends les escaliers, marche après marche. Celles-ci me rappellent constamment que je m'engouffre dans un désespoir que je n'aurais jamais pu imaginer. J'ai l'impression de descendre toujours plus bas pour rejoindre le portail de l'Enfer. D'un côté, j'aurai une vision du Paradis, le sourire illuminé de John et l'iridescence de son regard. Et d'un autre, le regard désespéré d'une mère, qui fait tout pour me satisfaire, mais qui n'y parviendra jamais. Son amour inconditionnel pour un homme qui en adore une autre. La vision de cette vie de famille déstructurée.

Lorsque je dévale enfin la dernière marche en bois, qui craque sous mon poids, j'entends les murmures de John et de Constance, dans la cuisine. J'approche lentement, les mains liées contre ma poitrine, dans l'espoir que tout le monde m'aura oublié.

DADDY'S GIRL - TOME 2 - The GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant