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Plus tard dans la semaine, Théodora eut à nouveau l'occasion de passer du temps avec Rosalie. Elles s'étaient installées à l'extérieur, derrière la maison de Théodora, sur une petite table de jardin en bois usé par le temps, qui donnait une vue imprenable sur la forêt environnante. Aujourd'hui, à Forks, le ciel était d'un bleu pâle, un spectacle rare dans cette région habituellement enveloppée de nuages et de pluie. Un rayon de soleil timide perçait à travers les branches des arbres, éclairant les feuilles encore humides de la rosée matinale, tandis qu'un léger vent frais caressait les joues de Théodora, la faisant frissonner.

L'air avait cette odeur caractéristique de terre et de pin, mélangée à l'humidité persistante de la forêt. Les oiseaux chantaient timidement, profitant eux aussi de cette trêve lumineuse. Quelques feuilles, déjà mordues par l'automne, tourbillonnaient lentement avant de retomber sur le sol.

Théodora resserra un peu son veste autour d'elle, appréciant la chaleur qu'elle lui procurait. Malgré la fine lumière du soleil, il faisait encore un peu froid, mais la présence de Rosalie à ses côtés semblait la réchauffer, d'une manière étrange mais réconfortante.

Théodora aimait ces moments de calme avec Rosalie, qui lui permettaient de mieux comprendre la femme complexe qu'elle était. Elles jouaient aux cartes, un jeu que Rosalie semblait connaître par cœur. Les cartes étaient étalées entre elles, et Théodora venait de piocher une Dame de cœur.

"J'ai l'impression que Jasper change," dit Théodora, rompant le silence, tout en posant la carte délicatement sur la table improvisée. "Il n'est plus aussi distant qu'avant."

Rosalie regarda la Dame de cœur, puis leva les yeux vers Théodora avec un sourire. "C'est vrai. Tu lui apportes quelque chose que nous ne pouvions pas lui offrir. Un espoir, une raison de croire qu'il peut être plus que ses erreurs."

Théodora haussa les épaules, un peu gênée, et piocha à nouveau, tirant un Roi de trèfle. "Je ne sais pas comment," avoua-t-elle, jouant nerveusement avec la carte entre ses doigts. "Je ne fais que... être moi."

"C'est justement pour ça que c'est si puissant," répondit Rosalie, observant la carte du Roi que Théodora tenait. "Tu n'as pas essayé de le changer. Tu l'acceptes tel qu'il est, et ça, c'est ce dont il avait le plus besoin."

Valet de pique. Théodora le posa sur la pile, réfléchissant. "Rosalie," commença-t-elle doucement, hésitant à partager ce qu'elle ressentait. "Parfois, je me demande... s'il m'aimerait toujours si je restais humaine. Si, en vieillissant, je devenais... tu sais, vieille et moche."

Rosalie laissa échapper un petit rire, un éclat inattendu dans ses yeux dorés. "Vieille et moche, vraiment ?"

"Oui, vraiment," insista Théodora, souriant timidement. "Je veux dire, regarde-moi, je ne serai pas éternellement comme ça. Toi, vous... les Cullen, vous resterez toujours aussi parfaits. Moi, en revanche, je finirai par ressembler à une vieille prune toute ridée."

Rosalie étouffa un éclat de rire et posa une main sur celle de Théodora. "Tu as tort, tu sais. La beauté d'un humain ne réside pas dans son apparence extérieure, mais dans ce qu'il dégage. C'est ce que Jasper voit en toi. Ce que nous voyons tous en toi."

Dame de pique. Théodora la regarda un instant avant de la poser, un léger sourire aux lèvres. "Peut-être que tu as raison. Mais j'ai du mal à l'imaginer... aimer quelqu'un d'aussi éphémère."

"Nous sommes tous éphémères à notre façon," répondit Rosalie doucement. "Même nous, les vampires. Nous ne sommes pas éternels, malgré ce que l'on pourrait croire."

Théodora fronça les sourcils. "Mais vous ne vieillissez pas, vous ne tombez pas malades. Vous êtes... parfaits."

Rosalie soupira, ses yeux se perdant dans les feuilles des arbres qui s'agitaient sous la brise. "C'est une illusion, Théodora. Nous sommes figés, coincés dans le temps, incapables d'évoluer. Parfois, je me demande si ce n'est pas une sorte de prison."

Roi de cœur. Théodora laissa ses doigts glisser sur le papier, réfléchissant à ce que Rosalie venait de dire. "Et toi ? Tu as déjà regretté d'avoir été transformée ?" demanda-t-elle doucement.

Rosalie sourit tristement, les yeux perdus dans le passé. "Oui, chaque jour. J'aurais voulu vieillir, avoir des enfants, connaître le véritable amour. Ce sont des choses que je ne pourrai jamais vivre. Alors quand je te vois, toi, avec toutes ces possibilités devant toi... je t'envie un peu."

"Tu m'envies ?" s'étonna Théodora, incapable de croire que quelqu'un comme Rosalie pouvait être jalouse de sa vie.

"Oui," admit-elle en jouant avec une carte qu'elle tenait. Valet de trèfle. "Tu as le choix, Théodora. Le choix de devenir ce que tu veux, d'aimer qui tu veux, de vieillir, d'apprendre. Moi, je n'ai pas eu ce choix. Alors, oui, je t'envie."

Théodora resta silencieuse un moment, pesant les mots de Rosalie. "Tu penses que Jasper... m'aimerait toujours si je restais humaine ?" demanda-t-elle finalement, la voix tremblante.

Rosalie posa la Dame de carreau sur la table et fixa Théodora. "Je pense que Jasper t'aime déjà pour qui tu es maintenant. Peu importe ce que tu décideras, ce que tu deviendras. L'amour véritable ne se base pas sur l'apparence ou la durée de la vie. Il est plus fort que tout ça."

"Mais est-ce que je serais assez forte pour l'accepter ?" murmura Théodora, les larmes lui montant aux yeux. "Pour accepter de vieillir à ses côtés alors qu'il restera toujours le même ?"

Roi de pique. Rosalie attrapa la carte et la regarda longuement. "La vraie question, Théodora, est de savoir si tu veux vraiment changer pour lui ou si tu veux rester toi-même. Parce que, quoi que tu choisisses, tu dois le faire pour toi. Pas pour lui."

Un silence s'installa entre elles, seulement troublé par le bruissement des feuilles. Théodora sentit une lourdeur dans sa poitrine, un mélange de peur et de désir, de doute et d'espoir. "Je veux rester moi," dit-elle finalement. "Mais je veux aussi rester avec lui."

Rosalie hocha la tête, un sourire bienveillant se dessinant sur ses lèvres. "Alors reste toi-même, et aime-le de toutes tes forces. Parce que c'est ça qui compte, Théodora. C'est ce que rend l'amour vrai, beau et éternel."

Théodora se sentit envahie d'une vague d'émotion, un flot de gratitude envers Rosalie pour ses paroles. Dame de trèfle. Elle la posa sur la table, se demandant si elle pourrait un jour être à la hauteur de ce que Jasper voyait en elle.

"Tu sais," dit Rosalie en ramassant les cartes, "dans ce jeu, il n'y a ni gagnant ni perdant. Il n'y a que des choix. Et tu viens de faire le tien."

"Et c'est un bon choix ?" demanda Théodora, l'espoir brillant dans ses yeux.

"C'est le meilleur," affirma Rosalie avec un sourire. "Parce qu'il est vrai."

"Est-ce que tu penses qu'un jour... Jasper pourra vraiment être heureux ?"

Rosalie la regarda avec une douceur inattendue. "Je pense que, s'il continue de te laisser entrer dans sa vie, il en aura au moins la possibilité."

Théodora resta silencieuse un moment, contemplant les rayons du soleil filtrant à travers les arbres. Elle sentit une chaleur réconfortante se répandre en elle, mais aussi une pointe de peur.

 "J'aimerais tellement qu'il soit heureux," murmura-t-elle presque pour elle-même. Elles continuèrent à jouer, mais Théodora savait qu'elle venait de recevoir bien plus qu'une simple leçon de cartes. Elle avait découvert une vérité sur elle-même, sur la vie qu'elle souhaitait mener, et sur l'amour qu'elle était prête à donner.

❝ 𝐋𝐔𝐌𝐈𝐍𝐄𝐒𝐂𝐄𝐍𝐂𝐄 ❞ ʲᵃˢᵖᵉʳ ʰᵃˡᵉ ( FR )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant