☇ 𝟲𝟵

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Les jours qui suivirent furent marqués par une lutte silencieuse pour Théodora. Au lycée, elle essayait de sourire, de plaisanter avec ses amis, mais tout lui semblait flou, comme si elle vivait derrière un voile de brume. Chaque instant était empreint d'une étrangeté familière, presque irréelle. L'air était saturé d'humidité, le ciel, perpétuellement gris, semblait peser sur ses épaules, et pourtant, c'était son propre esprit qui la tourmentait le plus. Une agitation intérieure qu'elle ne parvenait pas à apaiser.

Ses sens, désormais plus aiguisés, captaient tout avec une intensité nouvelle. Le moindre bruit, le plus léger frôlement du vent dans les feuilles, devenaient presque assourdissants à ses oreilles. Les gouttes de pluie sur le toit résonnaient comme des tambours lointains. Même le simple contact de ses vêtements contre sa peau devenait parfois insupportable, trop présent, trop vif. L'humidité de l'air collait à sa peau, rendant chaque sensation plus tangible, plus intense.

Un soir, alors que le ciel s'assombrissait, la pluie s'abattit sur Forks avec une constance apaisante, transformant la forêt environnante en un océan de vert humide et vibrant. Les arbres massifs, recouverts de mousse, semblaient s'incliner sous le poids de cette pluie incessante, leurs branches alourdies gouttant en rythme, comme si la forêt elle-même pleurait avec elle. L'odeur de la terre mouillée, de la sève et du bois détrempé emplissait l'air, se glissant à travers les fenêtres entrouvertes.

Dans sa chambre, Théodora se tenait assise, le regard perdu à travers les vitres, observant les gouttes de pluie tracer des chemins sinueux le long du verre. Le paysage de Forks, baigné par cette lumière diffuse, semblait figé dans le temps, immobile sous ce rideau d'eau. Mais à l'intérieur d'elle-même, tout était en mouvement, une tempête qu'elle ne pouvait calmer.

La pluie tambourinait doucement contre les fenêtres, chaque goutte résonnant comme un écho à l'agitation de son esprit. Puis, dans la pénombre de sa chambre, une ombre familière apparut. Jasper. Il se glissa à l'intérieur avec la fluidité d'une brise nocturne. Son allure, à la fois élégante et sereine, contrastait avec le chaos intérieur de Théodora. Il portait une chemise en lin crème, légèrement déboutonnée, qui flottait doucement sur sa peau pâle. Un pantalon sombre complétait sa silhouette élancée, se fondant presque dans les ombres de la pièce.

Théodora, quant à elle, portait un simple pyjama – une chemise ample et un short. Mais c'était son regard qui trahissait le plus son tourment. Ses yeux, lourds de fatigue, étaient marqués par l'angoisse d'une journée qu'elle n'avait pas su apaiser. La lumière tamisée de la lampe de chevet créait des ombres sous ses cils, accentuant la tension qui se lisait sur ses traits.

Jasper s'arrêta un instant à l'entrée de la pièce, son visage s'assombrissant légèrement en la voyant ainsi. Il lisait la fatigue, la lutte intérieure qui pesait sur elle. Le poids qu'elle portait semblait insurmontable, et chaque détail – ses mains crispées sur le tissu de sa chemise, son regard fixe sur la fenêtre – lui révélait à quel point cela devenait trop lourd à porter.

La pluie continuait de tomber, drapant la forêt dans une couverture humide et mystérieuse, tandis que l'obscurité envahissait doucement la chambre. La présence de Jasper, bien que silencieuse, avait toujours un effet apaisant. Il avança vers elle, ses mouvements aussi fluides que l'eau qui ruisselait à l'extérieur, et s'assit à ses côtés, laissant l'instant s'imprégner d'une sérénité silencieuse.

"Tu n'as pas l'air d'avoir beaucoup dormi," murmura-t-il en s'approchant, posant une main délicate sur son épaule.

Théodora le repoussa légèrement, un geste instinctif, comme si ce simple contact venait de faire éclater la digue de toutes ses frustrations. "Je ne peux pas dormir, Jasper," répliqua-t-elle sèchement. "Chaque son est trop fort, chaque lumière trop vive. Je ne suis plus la même. Et je ne sais pas comment leur cacher tout ça." Elle se détourna brusquement, le dos raide, les poings serrés.

❝ 𝐋𝐔𝐌𝐈𝐍𝐄𝐒𝐂𝐄𝐍𝐂𝐄 ❞ ʲᵃˢᵖᵉʳ ʰᵃˡᵉ ( FR )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant