𝐑𝐎𝐒𝐄 𝐄𝐍 𝐅𝐄𝐔 (TOME 1 & 2 )

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 : 72

"Il n'y a pas d'amour ni d'amitié qui croise le chemin de notre destinée sans laisser de marque pour toujours ."

-Êtes-vous impliqué dans la mort de mon père ? demande-je d'une voix brisée, la tête baissée, mes poings crispés sur mes genoux.

Un silence oppressant s'installe. Il s'étire, s'infiltre dans chaque recoin de la pièce, rendant l'air plus lourd, plus suffocant.

L'absence de réponse fait monter une vague de panique en moi, une peur sourde qui s'ancre dans ma poitrine comme un poison lent.

Ne me dites pas qu'il...

D'un geste hésitant, je relève la tête et croise son regard.

Une lueur de choc traverse ses prunelles claires, un éclat d'incrédulité presque trop sincère pour être feint.

Alors, il n'était pas au courant ?

-Mais... Qui... ? Qui vous a éduqués, les enfants ? bredouille-t-il, la surprise voilant sa voix rauque.

-Nous-mêmes, ricane Yaqub, son ton moqueur teinté d'une colère mal dissimulée.

-Je ne savais pas, non, répond-il enfin, sa voix plus posée, presque lointaine. Je n'ai jamais été impliqué. Je savais que ton père avait élaboré une ruse pour échapper aux Hafiz, mais jamais... jamais je n'aurais cru que...

Il s'arrête, les mots mourant sur ses lèvres.

-Aux Hafiz ? répète-je, ce nom résonnant en moi comme un écho funeste, une promesse de malheur.

Il prend une inspiration tremblante avant de reprendre, sa voix empreinte d'un mépris mal contenu :

-Tu connais la beauté de ta mère... Les Hafiz voulaient sa main, mais cette idiote... Elle aimait ce pauvre policier. Et j'imagine qu'à cause de son amour égoïste, elle a fini par tuer cet homme.

Un silence glacé tombe sur la pièce.

Je sens mon cœur se contracter, mon sang bouillonner dans mes veines.

Je serre les poings, mes ongles s'enfonçant dans ma paume jusqu'à m'en faire mal.

-Votre famille est réputée... Pourquoi ne pas l'avoir protégée ? Pourquoi ne pas avoir défendu votre propre sang ? hurle-je presque, la rage déferlant en moi comme une marée furieuse.

Il baisse les yeux, un soupir lourd s'échappant de ses lèvres.

-J'en étais incapable... commence-t-il dans un souffle.

-Au début, j'ai refusé, mais... quand j'ai vu ma fille heureuse, j'ai cru que je pouvais sacrifier ça pour elle. Les Hafiz ont toujours été nos ennemis. Ça a dégénéré... et j'ai fini par leur donner ma fille.

Ses mots me frappent de plein fouet.

-Vous avez vendu votre fille ! crache-je, la fureur m'étranglant. Vous osez parler de "famille" alors que vous l'avez trahie ?!

Il ouvre la bouche, mais aucun son n'en sort.

-Rayhane, marmonne mon frère.

Sa voix porte une douleur étrange, presque trop humaine pour un homme de son espèce.

Oh...

Je réalise que hurler ne servirait à rien.

Il n'a plus rien à m'apporter.