• CHAPITRE UN •

49.2K 2.5K 593
                                    


Je relis pour la cinquième fois la même phrase sans arriver à me concentrer à cause du vacarme qui provient de l'appartement qui jouxte le mien. Qu'est-ce que c'est que tout ce boucan ? Je me lève d'un coup de mon canapé pour aller frapper chez l'illuminé qui s'imagine encore dans un club diurne en plein cœur de son salon. Le poing fermé, je martèle à corps perdu la porte avant qu'il ne daigne m'ouvrir. Je m'apprête à m'époumoner férocement, mais ce n'est pas du tout la personne sur laquelle je pensais tomber. Un individu... enfin un homme... Splendide, mon cerveau bégaie, c'est parfait ! Bref, ce n'est absolument pas Chad l'énergumène hyperactif de voisin qui me rend complètement chèvre depuis des mois qui se tient là. Le regard émeraude qui se braque sur moi me met d'emblée mal à l'aise sans que je comprenne pourquoi.

— Oui ? demande l'inconnu d'une voix gutturale.

Que suis-je venue faire ? Ah oui ! J'ouvre la bouche, mais il est rapidement rejoint par quelqu'un sur le pas de la porte.

— Romeo c'est lourd ! Matt va finir par me faire tomber un meuble sur les pieds ! gronde celui-ci.

Quoi ? Romeo ? Hein... Romeo ? La bonne blague ! Je retiens de justesse le ricanement qui manque de m'échapper face au ridicule de la situation. Tout de même ! Quelle était la probabilité ?

— Comme tu peux le constater, je n'ai pas tout ton temps. En quoi puis-je t'être utile ?

— Bonjour, je m'appelle Juliet, je suis ta...

— Hilarant, me coupe-t-il caustiquement.

Il me claque la porte au nez sans ambages et m'abandonne là, totalement incrédule, la bouche ouverte sur son palier. Bien... C'est excellent même ! Encore un nouveau voisin imbuvable qui emménage à cet étage et qui ne me laissera pas réviser en paix. J'entends un éclat de rire et je suis prête à parier que ce n'est pas le sien. Je jure en mon for intérieur et je tourne les talons pour faire la seule chose sensée : rentrer chez moi. J'enfonce brusquement dans mes oreilles les boules de protection auditive que j'ai achetées quelques jours après l'arrivée de Chad et je tente tant bien que mal de me concentrer de nouveau sur mes notes. 

Moins d'un quart d'heure plus tard, je me résigne à changer de tactique. Il semblerait que c'est une cause perdue de vouloir travailler à mon domicile aujourd'hui. Je mets un maximum de fiches de révision dans mon sac en toile et je sors en trombe de l'appartement. Je fonce manu militari vers les escaliers, mais j'emboutis de plein fouet un corps dans ma précipitation. En un battement de cil, je me retrouve au sol avec le souffle coupé et mes affaires éparpillés un peu partout autour de nous. Outch ! J'essaie de me relever dignement, non sans passer par une position à quatre pattes pas glamour pour un sou. Ce n'est qu'une fois que je suis remise de mes émotions et sur mes pieds que je fais face au regard courroucé de mon voisin.

— Du mal à tenir debout ? demande-t-il avec dédain.

Je l'ignore ostensiblement, car ce petit jeu n'en vaut probablement pas la peine au fond et je me penche pour ramasser mes documents et mes effets personnels. Je dois cacher ma stupéfaction lorsqu'il s'agenouille pour en faire de même. Il attrape de ses longs doigts de pianiste une feuille et la fixe un moment avant de froncer les sourcils.

— Rends-moi ça !

Je lui arrache abruptement des mains et je l'enfouis rapidement dans l'un de mes classeurs.

— Hum... Juliet, fait-il pensivement.

— Oh, il sait donc lire ! je rétorque incisivement.

L'une des commissures de ses lèvres se relève, mais je ne lui laisse aucunement l'occasion de formuler une réponse et je poursuis mon chemin sans un regard dans sa direction.

WHEN JULIET NEEDS ROMEOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant