• CHAPITRE QUARANTE-CINQ •

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J'observe mon frère avant tant d'animosité qu'il ne peut décemment pas passer à côté du fait que je me retiens de m'emporter pour ne pas perdre mon sang-froid et causer une scène.

— Que fait-il ici ? je chuchote furieusement.

— Souviens-toi Juliet, un gage de sérénité.

— Je n'ai jamais dit que j'acceptais ! je rétorque les dents serrées.

— Tu n'as plus vraiment le luxe de faire ce choix, puisque je l'ai fait pour toi.

J'ouvre et referme la bouche à de nombreuses reprises tel un poisson hors de l'eau. J'ai envie de l'étriper d'être aussi suffisant, mais je n'en fais rien. À la place, j'inspire et j'expire plusieurs fois en tentant de dompter mes émotions. Léonin soutient mon regard alors que je suis prête à parier que mes yeux brillent d'une fureur que je peine de plus en plus à contenir. J'ai les poings enfoncés sur mes cuisses et j'essaie de me concentrer sur tout sauf sur la colère qui gronde en moi. Je n'ai plus qu'à prier pour que son invité surprise ne prenne pas un malin plaisir à jeter de l'huile sur le feu, bien qu'il soit totalement en droit de le faire. Mon frère reste imperturbable et il continue de savourer lentement son café. Mon cerveau tourne à mille à l'heure. Que va-t-il penser de ce rendez-vous ? Croira-t-il que j'étais au courant ? S'imaginera-t-il que je lui ai tendu un piège malsain ? Ou pire encore que je lui aie menti en toute connaissance de cause ? Mes réflexions se bousculent et le stress commence à tout balayer sur son passage. La main qui se pose puissamment sur la mienne et qui emprisonne mes doigts en les empêchant ainsi de pianoter n'est autre que celle de Romeo. Étrangement, son geste m'apaise sur-le-champ et je cesse de m'agiter. Je risque un regard vers lui, mais il n'a d'yeux que pour mon frère. Son expression semble paisible, mais j'ai eu tout le loisir d'observer les cent une facettes de Maître Andrews et je sais à quel point il est habile dans l'art de dissimuler ses émotions. Léonin serait idiot de se laisser berner si commodément. Il relâche délicatement la pression qu'il exerçait sur ma main et s'installe sur la chaise près de la mienne.

— Juliet, Léonin, lâche-t-il sereinement en attrapant ma tasse pour la porter à sa bouche.

— Bonjour Romeo, lui rétorque très posément mon frère.

— Salut !

Mon ton est tellement enjoué qu'ils tournent de concert leurs têtes vers moi. Léonin fronce les sourcils tandis que sur le visage de Romeo se dessine discrètement le début d'un sourire espiègle.

— Que nous vaut ce rassemblement Léonin ?

— Au vu des événements récents, je souhaitais que nous puissions nous entretenir un moment ensemble.

— Hum, tu souhaitais... fait Romeo en buvant avec une lenteur délibérée une gorgée de mon café.

— Oui.

— Te souviens-tu de notre dernier échange ?

Le visage de Léonin ne montre aucune crispation et pourtant je pourrais jurer que son être entier est tendu sur une corde raide.

— Oui.

— Des individus de la famille Nicholson, curieusement tu es celui que je trouvais le plus respectable. Tu es le seul à être venu au chevet de mon petit frère et également le seul à avoir envoyé tes condoléances à l'enterrement de ma mère.

— Oui.

— Qu'est-ce qui a donc bien pu te changer à ce point ?

— La loyauté, rétorque Léonin sans broncher.

— Ah ! L'allégeance envers les tiens. Quel naïf je fais là ! C'est tout à fait louable, mais dis-moi, qu'as-tu fait de ton devoir de probité à l'égard de la vérité ?

WHEN JULIET NEEDS ROMEOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant