• CHAPITRE QUATRE •

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Nous sommes au beau milieu de la semaine qui scellera sans doute une bonne partie de mon avenir. Même si la renommée de cette université connue à travers le monde entier me permettra de sélectionner l'un des meilleurs hôpitaux du pays, je ne peux pas me contenter de prendre la place de quelqu'un d'autre uniquement grâce au prestige de l'endroit où j'ai fait mes études. Je dois obtenir cette place avec des résultats dignes de ce nom et je ne peux laisser quoi que ce soit se mettre en travers de mon chemin. J'ai travaillé bien trop dur pour y arriver. C'est donc le cœur serré que j'avance. J'ai veillé à couper mon téléphone. Je n'ai pas besoin que ma famille vienne y ajouter son grain de sel. Pour eux, il est indéniable que j'ai un certain potentiel malgré mon choix de carrière qui n'a jamais été en adéquation avec les aspirations que mes parents avaient pour moi. Ils ne voient absolument pas l'acharnement que j'y mets au quotidien. Ils ne comprennent pas les sacrifices que j'ai dû faire et les heures interminables de révisions. Je suis terriblement seule, je me suis éloignée de tout et de tout le monde pour me focaliser sur cet ultime but : devenir neurochirurgienne. Un corps de métier qui demande à la fois une dextérité suprême, de la précision, beaucoup de patience et de concentration, mais aussi des capacités physiques et mentales hors du commun pour pouvoir résister à plusieurs heures dans un bloc opératoire. Alors que de nombreuses personnes prennent comme modèles des chanteurs ou des acteurs, pour ma part je ne rêve que de Walter Edward Dandy.

***

— C'est sûr, je le sens, je vais avoir un classement affreusement honteux ! se lamente Jasper.

— Jace, c'est ton esprit qui te joue des tours.

— Mon loukoum d'orient, au cas où je ne te l'aurais pas déjà dit une bonne centaine de fois, j'ai littéralement paniqué sur la dernière épreuve aujourd'hui !

— Si cela peut te rassurer, mes nerfs ont également lâché sur la fin de la semaine.

— Eh bien, comme à ton habitude, l'automate que tu es ne l'a pas vraiment montré ! Si seulement tu savais à quel point c'est compliqué d'être l'ami de la remarquable Juliet Nicholson.

Il fait semblant de bouder et sa moue m'arrache un sourire.

— Remarquable dis-tu ?

— Crétine !

Il rit de bon cœur et je suis contente d'avoir pu alléger son angoisse, ne serait-ce que pour quelques minutes.

— Jace, les dés sont jetés de toute façon. Nous n'y pouvons plus rien.

Je ne peux pas être plus sincère avec lui. Le terme « soutenu » n'est même pas assez puissant pour dépeindre le rythme en faculté de médecine. Nous alternons jours d'examens et nuits de révisions. Ma théorie sur le sujet c'est qu'ils essayaient sans doute chaque année de nous accabler un peu plus afin que l'écrémage se fasse naturellement. Encore plus de cours, plus de travail, plus de tout. La semaine est enfin terminée et je ne suis pas sur les rotules, non, je rampe carrément à même le sol tant je suis harassée. J'ai donné mon maximum, maintenant il ne reste plus qu'à faire le plus dur... attendre. Jasper a un programme bien prédéfini pour nous ces prochains jours. Il tient en trois petits mots : faire la fête ! Je ne sais plus vraiment comment on fait ça, mais je compte volontiers me laisser guider. Je n'arrive d'ailleurs toujours pas à comprendre comment il réussit à jongler entre les deux. Pour ma part, vie universitaire et vie tout court ne sont pas compatibles. J'ai fait un choix que j'espère ne pas regretter plus tard. Après tout, n'a-t-on pas qu'une seule vie ?

***

L'avantage d'avoir un ami comme Jasper c'est que l'on ne se retrouve jamais à court d'idées folles. L'inconvénient cela dit c'est que je ne compte absolument plus les verres. J'ai la tête qui commence à tournoyer un peu, mais j'accueille à bras ouverts cette douce sensation de bien-être qui m'enivre progressivement. Nous sommes samedi soir ou dimanche matin, qu'importe, je... Dimanche matin ? Je trébuche en m'emmêlant les pieds tant je suis choquée. Léonin ! Je suis en état d'ébriété certes, mais pas assez pour éviter une vague de panique qui me terrasse. Je jure si fort que je suis persuadée que le diable en personne en a été indigné. Je me mets en quête de Jasper vers le bar. Il faut à tout prix que je rentre séance tenante me doucher pour cette satanée soirée. Le cadeau ! Je ne lui ai rien acheté encore. Absorbée par ma semaine d'examen, j'ai oublié cette histoire d'anniversaire. Je vais devoir trouver comment faire pour dégriser intégralement en quelques heures afin de me préparer et avoir le courage de faire les magasins pour lui dénicher quelque chose. J'ai cru casser l'ambiance un instant, mais élégamment Jasper m'a commandé un taxi et a attendu que je sois au chaud dedans avant de retourner faire la fête.

WHEN JULIET NEEDS ROMEOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant