• CHAPITRE TRENTE-NEUF •

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Mon cœur bat la chamade à un rythme particulièrement délirant, car je peine à réaliser que celui qui hante mes pensées depuis des jours se tient sur le pas de ma porte.

— Juliet Nicholson.

Sa voix m'électrise de la tête aux pieds et comme la première fois que nous nous sommes rencontrés mon cerveau bégaie de façon incroyable. Je n'arrive pas à contenir le flot de sentiments qui s'y bouscule. La cacophonie qui règne dans mon esprit m'empêche de formuler une phrase cohérente pendant un bref instant, mais je me reprends bien vite.

— Que fais-tu là ? je demande.

Fan-ta-stique ! C'est la seule question qui me vient et cela me désole. J'attends cet échange depuis un moment déjà et je ne trouve rien de mieux à lui dire. J'aimerais tant pouvoir disséquer mon propre cerveau afin d'avoir de plus amples informations sur sa façon totalement atypique de fonctionner.

— Je suis venu converser. Je pensais que ma démarche était assez limpide.

— Converser ?

— Oui. À moins que tu préfères que je te dise que je souhaiterais t'emprunter ton téléphone ?

— Où... je commence.

— Non Juliet. Toi et moi nous n'en sommes plus là. Tu as perdu la permission de me poser ce genre de question.

Romeo est donc ici pour en découdre. Je ne peux pas dire que je suis étonnée par le ton qu'il emploie ou encore par le venin qu'il distille dans chacun de ses mots. Après tout, il fallait bien s'y attendre me souffle ma petite voix sans aucune retenue cette fois-ci. Je sais très bien que nous ne nous trouvons plus en zone inoccupée, mais que nous sommes bel et bien de retour sur un champ de bataille. Au bout du compte, il en a toujours été ainsi entre nous. Qu'espérais-je ? Que sa retraite de quelques jours avait fait de lui un nouvel homme ? Qu'il se présenterait avec un grand sourire pour me confier que tout entre nous pourrait s'arranger ? Ma pauvre ! Je dois avouer cela dit que sa visite n'en demeure pas moins une surprise. Si seulement je n'avais été autant persuadé que Jasper revenait sur ses pas, j'aurais pris le temps de chercher l'identité de la personne derrière la porte. La beauté et la sauvagerie de Romeo m'ont heurté de plein fouet comme chaque fois et je suis restée la bouche grande ouverte tel un poisson rouge. Je pensais avoir oublié ses traits et pourtant ils sont aussi parfaitement dessinés que dans mes souvenirs. Il attrape une cigarette dans son paquet et l'allume avec sa nonchalance légendaire en s'adossant contre l'encadrement. Je fixe mon attention sur ses joues qui se creusent et je me retrouve en un rien de temps sous son charme. Sans briser le silence entre nous, il tire dessus en m'observant. Je ne sens presque plus ma main droite à force de maintenir le battant de ma porte avec force. Il saisit vite mon trouble et j'aperçois le début d'un sourire arrogant qui glisse lentement sur son visage.

— Tu sembles ne pas avoir grand-chose à me dire, finit-il par lâcher.

— N'est-ce pas toi qui te présentes à moi dans le but de discuter ? Je dois dire que je suis prise de court pour ma part, mais je suis persuadée que tu es venu avec un sujet bien défini en tête.

— Je pense connaître quelqu'un qui pourrait nous éclairer sur ce point.

Il coince la cigarette entre ses lèvres et ses yeux se plissent automatiquement à cause de la fumée. Lorsqu'il extirpe son téléphone de sa poche, j'avance d'un pas. Traître de corps ! Il tapote brièvement l'écran puis tend l'appareil entre nous. Quand j'entends la voix qui sort du haut-parleur, je me pétrifie sur place tant j'en suis mortifiée. Cette voix n'est autre que la mienne ! Au simple bonsoir que je lance sur son répondeur, je sens que quelque chose n'est pas normal. Cela se confirme lorsque je balaie rapidement mes souvenirs de la veille et que cet appel ne figure dans aucun d'entre eux. Je fais donc la chose la plus sensée, mais la plus puérile du monde : j'arrache son téléphone de ses mains et je coupe immédiatement ce qui s'annonce être la plus belle catastrophe de mon existence. Un sourire sournois qui n'atteint pas ses yeux prend maintenant vie sur son visage. De nouveau, j'ai été bien bête ! Alors que je me faisais du mauvais sang sur notre lien et ce que nous pouvions encore espérer sauver, lui se divertissait à mes dépens.

WHEN JULIET NEEDS ROMEOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant