J'aurais mille fois préféré réviser durant des heures d'affilée avec une migraine plutôt que de me trouver à cette réception idiote. Comme je n'ai pas vraiment le choix, j'essaie de rester maître de moi-même. Pourquoi est-il convié ? Je ne pense pas que ma mère ait des pertes de mémoire. La seule raison plausible c'est qu'elle espère que nos rapports s'améliorent. Il n'y aura aucun retour en arrière envisageable. William a mis un terme à trois ans de relation par message. Très classe, au passage ! Qu'importe, l'eau est censée avoir coulé sous... Nop ! Qu'il meurt d'asphyxie ! Ma mère s'évertue à me mettre dans des situations impossibles comme celle-là et je n'ai aucune idée de ce qu'elle peut bien en retirer réellement. Il est issu d'une famille à la réputation étincelante et c'est donc un parti plus qu'acceptable pour elle, mais elle se fourre profondément le doigt dans l'œil si elle s'imagine un seul instant que je retournerais vers lui les bras grands ouverts... que j'y retournerai tout court même ! Pour elle c'était moi la fautive dans cette histoire, elle n'a jamais pris le temps d'en connaître tous les tenants et aboutissants.
— Juliet ! m'interpelle au loin Duncan.
Je glisse sur mon visage ce sourire faussement guilleret que je maîtrise à la perfection et je me dirige vers Craig et mes frères. En piste !
— Duncan, je le salue.
— Bonsoir Juliet. C'est une joie incommensurable de t'avoir parmi nous ce soir.
— Hum, hum, fais-je en dodelinant de la tête de bas en haut comme une poupée sans vie qu'un enfant secouerait trop fort.
— Théodora m'a demandé de te transmettre ses amitiés par ailleurs.
Théodora ? Je reste impassible tandis que mon cerveau fonctionne à plein régime dans le but de trouver une information qui me mettrait sur la bonne voie. Je n'ai pas la moindre idée de qui il parle, alors je bredouille aussi naturellement que possible :
— Tu lui feras parvenir toutes mes pensées les plus chaleureuses en retour.
— Il est vrai que nous nous languissions de ta présence Juliet, intervient Léonin.
— Joyeux anniversaire Léonin ! je lance avec l'entrain nécessaire sans en faire trop non plus.
— Je te remercie.
Simple, rapide et efficace. Comme mon père aurait pu le faire. C'est enfin à Marcellus de tenter d'amorcer la conversation avec moi. Aucune bise ou accolade fraternelle entre nous. Seulement des mondanités insupportables.
— Bonsoir.
— Bonsoir, Marcellus, je réponds sur le même ton détaché.
— Tu étais aux abonnées absentes ces derniers temps. Est-ce que tout va bien pour toi ?
— Parfaitement bien, merci de t'en inquiéter, j'ironise.
Ses lèvres ne forment plus qu'une ligne mince, mais nous ne sommes pas uniquement en famille, nous sommes en public. Alors pour donner le change, il commence à discourir de façon interminable. Je vois sa bouche se mouvoir, mais je n'entends plus rien. Mes autres frères rient parfois à certaines de ses boutades, mais pour ma part je me contente de continuer à sourire telle une potiche sans oublier de remuer de temps en temps la tête afin de sembler intéressée. La réalité est diaboliquement différente, je n'en ai tout simplement rien à faire ! Un constat aussi clair que de l'eau de roche.
— Je vous l'emprunte ! scande Craig à la surprise générale en me tirant par le bras.
Je calque mon pas sur le sien et ce n'est qu'une fois éloigné d'eux de quelques mètres que la tension qui raidissait mes épaules s'estompe progressivement.
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WHEN JULIET NEEDS ROMEO
RomanceC'est une chose de prendre des risques inconsidérés pour tenter de se sentir plus vivante que jamais et c'en est une tout autre que de se jeter volontairement au cœur d'une tempête indomptable. J'ai beau tourner ça dans tous les sens dans ma tête, j...