• CHAPITRE TRENTE-DEUX •

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Romeo soupire longuement avant de se décider à aller ouvrir. Je l'entends grogner une réponse et un sourire m'échappe tandis que je retire à la hâte les doigts qui flânaient mélodieusement sur mes lèvres pour éviter qu'il ne me surprenne. C'est une chose de perdre pied, mais cela en est une autre que de le lui montrer. De là où je suis, je vois qu'il ferme les yeux un bref instant avant de s'acharner sur le bouton d'ouverture de la porte de l'immeuble. Il passe plusieurs fois la main dans ses cheveux, comme si ce geste pouvait lui apporter les éclaircissements tant espérés et je le rejoins enfin.

— Nous avons de la visite. Tu veux peut-être... commence-t-il en pointant nonchalamment ma tenue.

— Ah... Oui.

Je me mets pensivement en marche jusqu'à sa chambre. À quoi est-ce que je m'attendais ? Qu'il ne daigne pas répondre afin que nous puissions parler de ce qui vient de se produire entre nous ? Crétine ! Je fais affaire avec Romeo Andrews après tout. Je ne dois pas oublier à quel point le requin qu'il est a les dents aiguisées. Rien n'est jamais à tenir pour acquis dans cette relation tordue que nous avons.

L'eau brûlante qui coule en longs filets réguliers depuis le plafond fait un bien fou aux membres endoloris de mon pauvre petit corps. Je prends conscience de l'ampleur du nouveau combat dans lequel j'ai failli m'engager. Nous ne jouons pas dans la même cour. Étudiante en médecine versus avocat prestigieux. Je ne faisais pas le poids bien avant que la partie ne débute. Il a raison, tout a été orchestré à la perfection et surtout ma défaite. Cette pensée tranchante me glace le sang, mais elle est criante de vérité. J'ai succombé sur toute la ligne et c'est une victoire écrasante pour l'équipe Zuko. Dans ma quête, je n'ai érigé aucune barrière autour de mon cœur. Moi qui me le figurais fait de pierre depuis mon histoire avec William, je réalise que j'ai fait fausse route. Je dois pourtant me rendre à l'évidence : je ne suis pas sa Sandy. Me torturer en me l'imaginant finira par me mener à ma propre perte. Je ne suis là que parce qu'il comptait m'utiliser, rien de plus. Il a conscience qu'il a le pouvoir et qu'il est armé d'une volonté en rien branlante comme la mienne peut l'être parfois. La mise en garde de Nathan me revient amèrement en tête. Il sait pertinemment que son frère détruira tout sur son passage. Même si ce n'est pas ce que me dicte mon cœur, j'ai besoin de prendre mes distances pour réfléchir à tête reposée à tout ceci. Au vu des révélations récentes, je ne peux pas faire le choix de rester aveugle. Il y a beaucoup trop de choses en jeu, beaucoup trop de choses à perdre...

J'enfonce brutalement mes effets dans mon sac de voyage et je m'efforce de réprimer un sanglot. J'ai réuni aussi vite que possible toutes mes affaires, mais une partie se trouve toujours dans son salon. La lâche que je suis n'arrive pas à se résoudre à quitter cette chambre. Bien que j'e n'ai aucune idée de la personne qui nous a interrompus, je lui en suis reconnaissante. C'est peut-être une bonne chose tout bien réfléchi. Il ou elle est tombé à pic en interférant avec l'erreur colossale que nous allions faire. D'ordinaire, la jusqu'au-boutiste que je suis va toujours au fond des choses qu'elles soient bonnes ou mauvaises et c'est même là ma marque de fabrique. Le seul bémol cette fois-ci c'est que je n'ai pas le courage d'affronter les mauvaises. L'aura rouge sang qui entoure Romeo n'augure rien de bon. Me bercer d'illusions et me mentir à moi-même ne démêlera en rien le nœud du problème. Je me lève au moment même où quelques petits coups sont frappés à la porte.

— Juliet ? demande une voix identifiable entre mille.

— Je ne l'ai pas séquestrée ! s'exaspère Romeo. Elle se douchait simplement.

— Je préfère avoir la confirmation de la principale intéressée si tu n'y vois pas d'inconvénient, peste Jasper.

— Fais donc ! capitule Romeo.

WHEN JULIET NEEDS ROMEOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant