CHapitre 46

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🏆Kyra Stanley

Je me réveillai très tôt le lendemain matin, enfin vers 8h. Je me levai silencieusement et je me dirigeai vers la cuisine où je savais que se trouvait le père de Richard en train de boire un café et de lire le journal. Je le remerciai pour son hospitalité et m'enfuis rapidement parce que j'entendis des bruits de pas à l'étage et je savais que ce n'était qu'une question de secondes avant que Gigi ne descende.

Je me dirigeai vers Chez Gast avec le bubble wrap sous le bras. Personne n'était censé arriver dans le spot avant longtemps, donc je restai là. Popol me servit un bol de céréales que je mangeai avec appétit.

Je ramassai par la suite mes choses de hockey et textai Anto pour qu'elle vienne me rejoindre à l'aréna dès qu'elle serait prête parce que j'avais une surprise pour elle. Bien sûre, je parlais du bubble wrap, mais je ne lui en dis rien par texte, elle découvrirait la vérité bien assez vite.

«ELLE EST OÙ MA SURPRISE?» entendis-je Anto crier au bout d'une heure.

Je me retournai pour la voir s'avancer sur la patinoire avec ses vielles protections de bubble wrap dont presque toutes les bulles avaient éclaté. Décidément, j'avais bien fait de m'arrêter à ce magasin hier. Elle avait grand besoin de renouvellement de stock.

«Viens sur la glace!» lui dis-je.

Je me plaçai à côté du bubble wrap. Elle tomba encore en essayant d'embarquer sur la glace. Je ne pus réprimer mon fou rire. Après tous ces mois à travailler sur toutes les facettes impossibles et inimaginables de son jeu, elle ne s'améliorait nulle part.

D'ailleurs, j'avais été surprise lorsqu'elle m'avait demandé de recommencer à l'entraîner parce que personnellement, j'avais abandonné l'affaire. J'ignorais pourquoi elle voulait que je recommence parce que je faisais surtout rire d'elle lorsque je le faisais et elle voulait toujours me tuer, mais elle n'arrivait pas à m'attraper.

«Est où ma surprise? me demanda-t-elle lorsqu'elle finit par arriver à se placer devant moi, après avoir passé genre dix minutes à tomber par terre.

- Eh bien, hier soir, la perspective de dormir dans la même chambre que Bourgeois Junior ne m'enchantait guère, alors j'ai fait du pouce de Sorel-Tracy jusqu'ici. Par contre, en chemin, je me suis arrêtée dans un petit magasin un bonhomme qui travaille là-bas s'apprêtait à jeter plusieurs rouleaux de bubble wrap. Je me suis dit que tu apprécierais en avoir du nouveau voyant l'état de celui que tu as en ce moment.

- Tu es la pire. Je pensais que tu m'appréciais enfin à ma juste valeur et que tu m'avais fait un vrai cadeau!

- Bin, si tu tiens tant que ça à avoir un cadeau à ta juste valeur, je peux toujours faire caca dans une boîte et te l'emballer, lui proposai-je.

- Toi, tu vaux moins qu'un tas de marde.

- Comme tu veux, je peux te laisser t'arranger toute seule et m'en aller.

- NON!

- D'accord, essaie donc de me faire plus que trois coups de patin sans tomber.»

Elle me regarda. Je lui fis signe que j'attendais. Elle leva sa main et baissa quatre de ses cinq doigts, laissant son majeur bien droit dans les airs. Nous nous mîmes à rire de bon cœur. À vrai dire, elle m'avait manqué cette petite qui était plus grande que moi.

Nous nous serrâmes dans nos bras et Anto essaya de me faire tomber par terre, mais je restai bien droite sur mes patins. Elle n'apprendrais jamais qu'il ne fallait jamais essayer de me faire tomber parce que je ne tombais pas et que j'allais la faire tomber elle, ce que je fis.

«Qu'est-ce que tu as essayé de faire là? lui demandai-je lorsqu'elle fut rendue sur la glace.

- J'ai essayé de te faire tomber.

- Tu sais que c'est impossible.

- Mais pourquoi!

- Parce que je suis la meilleure joueuse de hockey que le monde ait jamais connu.

- Allô, la Terre appelle Kyra, oui, il faudrait que sa tête désenfle. Elle est à veille de prendre toute la place dans l'aréna.

- Va chier!

- Veux-tu, on va faire quelque chose de drôle, toi, tu m'imites et moi, je t'imite.

- Ça ne marchera pas.

- Pourquoi?

- Parce que je ne suis pas capable de faire exprès pour tomber sur la glace.

- Je ne fais pas exprès pour tomber! protesta-t-elle en se relevant.

- Je n'ai pas dit le contraire. Tout ce que j'ai dit, c'est que si je t'imite, il va falloir que je fasse exprès pour tomber sur la glace sans aucune raison...»

Joignant le geste à la parole, Anto tomba par terre sans aucune raison apparente. Je tombai aussi, mais c'était parce que je riais vraiment trop. Je pleurais tellement je riais et je me roulais à terre en me tenant le ventre. Lorsque je me fus calmer, je me relevai.

«Comme tu le fais si bien.» terminai-je finalement ma phrase.

Je la fis patiner un peu avec son stabilisateur, mais nous nous tannâmes rapidement de cette méthode parce que ça finissait toujours de la même façon: moindrement qu'on lui enlevait son stabilisateur, elle tombait.

Elle alla enlever son équipement dans le vestiaire, mais j'allai enlever le mien dans les estrades où je l'avais mis. Je ne voulais pas souiller le vestiaire des Glorieux avec mon statut de Bears. Je serrai mes patins et me mis à regarder la patinoire.

Je me remémorai le soir où j'avais quitté les Glorieux. Je m'étais rendue sans le vouloir au Centre Bell. Beaulieu m'avait vu et j'avais fondu en larme devant lui. Il m'avait fait entrer et j'avais regardé la patinoire en me remémorant le soir où j'étais venue avec mon père.

Chaque fois que j'étais allée au Centre Bell, j'avais vécu un gros changement dans ma vie: la mort de mon père, puis mon changement d'équipe et la perte de la majorité de mes amis et mon chum. Je me rappelais des paroles que Beaulieu m'avait dites avant que je ne parte: «Kyra, n'oublie pas que parfois, le changement est inévitable et que ce que l'on pensait qui allait durer toute une vie, n'était en réalité que de passage.» J'avais changé. Sans nécessairement le vouloir certes, mais j'avais changé. De façon définitive.

Les GlorieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant