XLVI

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Mana

          Isaac referme la porte derrière moi, et je viens me dresser sur la table. Je scrute mes jambes battre dans le vide, mais il en stoppe le mouvement en venant entre, posant ses larges mains sur mes cuisses.

— Tu es anxieuse, devine-t-il. Je le vois bien.

— Tant qu'ils ne seront pas là, je n'arriverai pas à calmer mon stress... confirmai-je. Tu dis qu'ils vont bien, mais rien ne dit qu'entre ce moment et le retour du Prince... il ne se passera rien qui changera la donne.

— Cesse d'être pessimiste, mon ange... que dirais-tu d'avoir bon espoir, pour une fois ?

— Ce n'est pas vraiment mon genre... souriai-je.

— Alors promets-moi que lorsqu'ils rentreront tous les deux sains et saufs, tu essaieras d'être un peu plus de ce genre.

Isaac me rend mon sourire, et vient ensuite encadrer mon visage de ses mains. Il me donne plusieurs tendres baisers, avant de décider d'aller me faire du café. Je le suis jusque dans la cuisine.

— C'est marrant que vous ayez tant de « technologie », aux enfers, dis-je. D'aspect, c'est très moyenâgeux, d'ailleurs tu ne dois pas être dépaysé. Et pourtant, vous avez des maisons et des restaurants avec tout le nécessaire moderne... j'ai même vu un mixeur chez Lilith et Keith !

— Quelle « technologie », ma douce ? Sourit-il en sortant un moulin à café manuel.

— T'es un luddite ? Demandai-je en le regardant faire avec perplexité.

— Comment ? Rit-il.

— Une personne qui refuse la technologie.

— Je ne refuse pas la « technologie », mîme-t-il. Je suis simplement un amoureux du bon café, et ceci !est l'unique manière de faire du bon café.

— Vraiment ?

— Tu verras ma douce, tu verras.

Sa confiance en lui et en sa machine vintage me font sourire, je m'assieds donc sur le comptoir en bois en le regardant faire.
          Tout à fait concentré, il ne se détache de ses magouilles que cinq minutes plus tard pour laisser les deux tasses de café refroidir sur le côté.
          Puis il revient se placer entre mes jambes, déposant un baiser sur ma joue avant d'enfouir son visage dans mon cou. J'entoure celui-ci de mes bras en embrassant ses cheveux.

— Est-ce qu'une vie avec toi c'est avoir droit à du café moulu et un câlin tous les matins ?

— Pas seulement... asure-t-il. Pourquoi, est-ce trop ?

— Bien sûr que non ! Dis-je en chassant ses inquiétudes de la main. Au contraire, c'est l'incarnation d'une vie de couple parfaite à mon sens.

— J'aspire à être le premier et le dernier homme de ton éternelle vie.

— Tu t'en sors très bien pour l'instant, le rassurai-je.

— Cela me rassure, confirme-t-il.

— Et donc, à quoi d'autre aurai-je droit, à part ça ?

— Toujours aussi curieuse, sourit-il. Je vais m'occuper de la prochaine étape, bois ton café, dit-il.

Isaac me le tend en prenant une gorgée du sien, puis s'éclipse un moment. J'hésite à le suivre, mais mon petit doigt me dit qu'il m'empêchera de venir fourrer mon nez partout. Je bois donc une gorgée fumante de café, et m'aperçois qu'il n'avait pas tord du tout : c'est de loin le meilleur que je n'ai jamais bu !
          En me concentrant sur les sons, je comprends qu'Isaac fait couler de l'eau dans la salle de bain, et je crois alors deviner qu'elle est cette prochaine étape.
          Je souris en regardant le liquide brun tourner dans ma tasse... Il me traite comme une princesse, je n'en mérite pas tant... J'ai bien l'impression que notre dispute est déjà loin derrière nous, tel un mauvais souvenir d'une certaine incompréhension entre nous, rien de plus. Il a fait les concessions que je désirais, et j'ai fais les miennes. Alaric a réussi à lui faire entendre raison, il est venu pour m'en parler, et nous avons résolu ce malentendu comme des adultes...
          Désormais, j'essaie de ne plus écouter le petit démon sur mon épaule qui me convainc de milles possibilités et scénarios malheureux. Mes appréhensions, je dois en parler avec lui, pas avec moi-même. Et je sais maintenant que je le peux.
          Il m'a avoué qu'il m'aimait. Alors que nous pensions tous les deux que c'était la fin, ses derniers mots, ce que nous pensions être sa dernière volonté, était de me dire qu'il m'aime. À cela, que pourrait trouver à redire ce petit démon ? Je n'ai qu'à me remémorer les plus jolies paroles que l'on m'ai dites pour effacer la moindre de mes craintes... L'amour, c'est vraiment magique. C'est ridiculement merveilleux.
          Amaymon est intervenu avant que je ne puisse lui répondre, bien heureusement... Mais je me souviens alors que je n'ai toujours pas pu le faire. Nous n'en avons pas reparlé, et je suppose que c'est tellement évident vu ma manière d'agir, le fait que nous soyons désormais en couple, et... prêts à vivre ensemble apparemment, que je n'ai pas pensé à lui dire de vive voix. Voilà qui est à rectifier au plus vite.
          Isaac revient dans la cuisine, et pose sa tasse de café dans l'évier. Je n'ai même pas bu la moitié de la mienne, et sa rapidité m'arrache un léger rire. Il vient reprendre place devant moi en saisissant mes hanches, s'interrogeant sur ce rire.

Cecidit AngelusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant