Louve solitaire (en cours de correction)

Chapitre 30 (corrigé)

Liam se gare devant le portail de la propriété de Ach. Rien n'a vraiment changé depuis la dernière fois que je suis venue. Le quartier est toujours aussi tranquille, inconscient que vit parmi eux un vampire. J'ai pourtant un pincement au cœur. Je ne sais pas trop comment je vais pouvoir lui parler, même si je sais que les mots seront inutiles. Il aura quand même du mal à lire en moi, sachant que moi-même je ne suis pas sûre de ce qu'il y a à l'intérieur.

Je descends de moto et soupire en observant la lourde grille cadenassée. Inutile de sonner, il ne m'ouvrira pas.

- Je crois que je n'ai pas trop le choix, dis-je en mettant le pied sur la barre transversale du portail.

- Ivy, mais qu'est-ce que...

Avant que Liam ait le temps de finir sa phrase, je suis déjà de l'autre côté, à épousseter mes mains.

- Pas la peine de m'attendre. Ach n'est pas du genre très sociable. Il me faudra un moment pour l'amadouer.

- Tu as sûre que ça va aller ? s'inquiète-t-il.

- Tu t'inquiètes pour moi, petit chou ? Je te rappelle que je t'ai déjà mis la raclée, ironisé-je. Même si j'ai à faire à un suceur de sang renfrogné, j'ai de la ressource.

- J'ai vu ça, marmonne-t-il. Fais quand même gaffe à toi.

- Promis, papa, réponds-je, tout en lui tournant le dos avant qu'il essaie de m'arrêter.

Je fais la fière mais en réalité, je n'en mène pas large. Plus j'avance, plus je sens mon estomac se serrer. Je m'arrête un instant devant la porte d'entrée. J'hésite à l'ouvrir. Putain de merde ! Je ne pensais pas que ça allait être aussi difficile ! Je ferme les yeux et des images de nos derniers moments me reviennent. Il y a tellement de choses qui sont restées en suspens. Sa jalousie envers Luc, notre étreinte passionnée, son regard plein de reproches quand je suis partie et le doute qui s'est insinué en moi à cause de Hella. Par quoi commencer ? Va-t-il seulement me laisser parler ? Je suis venue ici pour lui parler des projets de l'autre folle, mais ce n'est qu'un prétexte. Je n'ose pas l'avouer mais il me manque.

Ce vampire arrogant au regard brûlant qui me déshabillait tout le temps, ses remarques à double sens, la provocation permanente de ses gestes, a laissé un vide béant quand je suis partie. Ces longues journées où je me retrouvais seule m'ont fait prendre conscience de certaines choses. Luc et Ach font partie d'un tout. L'un comme l'autre a une partie de mon cœur. L'un parce qu'il est l'homme parfait, celui avec j'aspire vivre une histoire d'amour digne d'un conte de fées. L'autre parce qu'il est la passion, l'amour qui vous brûle les veines, qui incendie votre âme. Et j'ai beau essayé, je suis incapable de choisir.

Je prends une grande inspiration, en me préparant à une confrontation qui s'annonce ardue, et tourne la poignée. A l'intérieur, la maison est silencieuse, excepté un bruit de respiration haletante et de succion. Mon sang se glace en comprenant ce qui se passe. Ach n'est pas seul. Evidemment qu'il n'est pas seul. Même si je sais que ce que je vais voir ne va pas du tout me plaire, je me dirige vers l'origine de ces bruits. La scène sur laquelle je tombe me fait pâlir d'un coup. Ach est assis dans un fauteuil, une femme nue allongée sur lui. Il a son visage caché dans son cou. Ses cheveux noirs ne me permettent pas de voir ce qu'il fait, mais c'est inutile car je sais pertinemment ce qui se passe. Ses mains caressent le corps abandonné à son bon plaisir.

Je suis complètement figée, paralysée par ce spectacle qui m'horrifie. Ses doigts glissent sur sa poitrine, sur sa peau galvanisée par le plaisir que lui procure les crocs du vampire plantés dans son cou. Lentement, la main de Ach se dirige entre les cuisses dénudées de la jeune femme. Quand il l'atteint, cette dernière pousse un gémissement de plaisir. Mon souffle se bloque, ma gorge s'assèche. Un sentiment désagréable tord mon estomac. Je n'ai qu'une envie, attraper cette pouffiasse par les cheveux, l'envoyer valser et prendre sa place.

Les va-et-vient des doigts du vampire produisent rapidement l'effet escompté. La femme se cambre dans un orgasme dévastateur. Alors qu'elle s'apaise, le vampire détache sa bouche de son cou ensanglantée et lève enfin les yeux vers moi. Ses pupilles dilatées me fixent mais ne semblent pas me voir. Pendant de longues secondes, nos regards restent accrochés. J'ai l'impression de m'asphyxier de l'intérieur. Une vague de rage destructrice envahit mon âme.

Je m'attendais à quoi ? qu'il allait m'attendre tranquillement ? Tu es vraiment qu'une pauvre conne, Ivy !

J'ai envie de l'étrangler, en même temps de me jeter sur lui. A cette pensée, Ach repousse sans ménagement la femme posée sur ses genoux. Elle se relève, titubante, récupère ses vêtements et se dirige vers la porte d'entrée, sans même me jeter un coup d'œil. Mon corps refuse de m'obéir. Je veux partir, mais il ne bouge pas. J'enfonce mes ongles dans ma paume profondément pour éviter de me mettre à hurler. Ach se lève et d'un pas lent et assuré, se dirige vers moi. Il s'arrête à quelques centimètres de moi. Son corps frôle le mien. Je sens son souffle glacé caresser mon visage. Je sais ce qu'il essaie de faire, mais je fais tout pour faire en sorte qu'il n'obtient pas ce qu'il veut. Je lutte de toutes mes forces contre mon envie de me jeter sur lui. Sa main se glisse dans mes cheveux. Mon corps se met à trembler sous ce contact, mais, bien vite, je le repousse, consciente qu'il me trouble beaucoup trop.

- Que fais-tu là, Ivy ?

Sa voix semble lasse. Pour la première fois depuis que je suis arrivée, je le regarde vraiment et ce que je vois m'inquiète. Sa peau est encore plus blanche, presque translucide. Ses yeux ont perdu cette malice que je leur connaissais. Ils sont devenus terriblement tristes. Que t'est-il arrivé, Ach ? Sa main retombe le long de son corps et il se détourne de moi. Rompre ce contact m'a comme arraché le cœur. Il me tourne le dos et j'ai envie d'aller m'y coller.

- Tu dois t'en aller. Tu n'as plus rien à faire ici.

Son ton est cinglant et plein de reproches. Il m'en veut. Je ferme les yeux pour tenter de reprendre mes esprits. Quand je les rouvre, il est toujours là. Je ne rêve donc pas.

- Il fallait que je te voie, finis-je par dire.

- Pourquoi ? réplique-t-il, d'un ton tranchant.

Je me racle la gorge. Je sais que ce n'est pas toute la vérité mais pour l'instant, c'est tout ce que je peux lui dire.

- On m'a dit que Hella rassemblait les vampires. Est-ce que tu saurais ce qu'elle prépare ?

Il se met à ricaner, tout en allant se rasseoir.

- Alors la chef de la meute de Clearwaters a peur ? se moque-t-il. Où est-ce que Liam a réussi à te dénicher ?

Son attitude me blesse, mais je la comprends.

- Qu'importe ! Il faut que je sache ce qui se passe. Hella est une cinglée. Je ne voudrais pas qu'elle mette tout le monde en danger avec ses idées farfelues.

- Et que feras-tu si je refuse de répondre ? continue-t-il, froidement. Tu vas me défigurer ?

Ça c'est un coup bas ! Une colère sourde refait surface. Cette colère que j'ai éprouvée pendant plusieurs semaines, le concernant. Il avait préféré défendre cette salope plutôt que moi. J'avais réussi à l'admettre, mais à présent, il me montrait qu'elle n'était toujours pas apaisée.

- Tu t'attendais à quoi exactement en venant ici, Ivy ? que je me jette à tes pieds ? dit-il en ricanant. Evidemment que je suis fidèle à celle qui m'a conçu.

Une rage indescriptible éclate alors dans tout mon être.

- Espèce de connard ! Elle m'a manipulé, elle t'a manipulé. Et je suis sûre qu'elle a fait de même avec Luc. Si elle se présente un jour devant moi, je te jure que je la réduis en charpie et je la donne à bouffer aux chiens errants.

Il nebronche pas, m'écoutant attentivement. Réagis, bon sang ! Dis quelquechose, Ach ! Mais rien, il reste là, les bras croisés contre son torse, lamâchoire contractée. Ce que j'ai envie de lui sauter dessus ! Je baiseraiavec lui et après je vais lui foutre une raclée dont il se souviendra. Dans laseconde qui suit, Ach a une main autour de mon cou, l'autre autour de mataille. Mon cœur fait une embardée et tout mon corps s'enflamme.