Chapitre 20

83 8 3
                                    

Après deux mois de silence, me revoici en force avec un nouveau chapitre et le rythme de publication va revenir à la normale ! Dedans, il y aura un petit astérix pour une conversion. Elle se trouvera à la fin du chapitre.

______

  Assis devant les juges de Jeanne, nous attendions sagement leur réponse. Cela faisait une journée que nous n'avions pas eu de nouvelle de l'entretien qu'avait eu la Pucelle. C'était ce matin-même, aux aurores, qu'un messager du Dauphin était venu nous livrer un courrier que Razzia avait trouvé sous la porte d'entrée. Nous avions ainsi appris que le futur roi du royaume de France nous avait convoqués à neuf heures devant le château.
   Chaque personne relisait son rapport fait le 27 février, comme pour voir s'ils n'avaient rien oublié. Finalement le confesseur du roi ramassa tous les  papiers des juges et les rassembla en une seule pile. Il joignit ses mains sur le paquet de feuilles avant de prendre la parole de façon très professionnel :
- Bien. Tout d'abord, nous vous remercions d'avoir accepté cet entretien. Suite à celui-ci, une réflexion intense a besoin d'être exécutée. Vous êtes d'une pertinence remarquable Jeanne. Il est rare, même chez les hommes de la voir. Seulement, nous en sommes arrivés à la conclusion que nos informations n'étaient que peu suffisantes. Nous aurions besoin de plus de temps et de questions.
Nous nous observâmes rapidement du regard où je pus lire une certaine incompréhension dans les yeux de tous. Nous ne comprenions pas : pourquoi l'interroger de nouveau ?? Je croyais que cela allait suffire ! Elle avait été très convaincante et honnête. Que voulaient-ils de plus ?? Je posai mon regard sur la jeune guerrière. Parfaitement stoïque, elle hocha simplement la tête et incita les juges à poursuivre :
- Après en avoir délibéré avec le roi, nous avons décidé de vous envoyer à Poitiers pour terminer vos interrogatoires sous cortège royal.
J'ouvris grand les yeux, complètement incrédule. Jeanne, aller à Poitiers, le grand bourg où le parlement français s'était réfugié après la prise de Paris ?? Sous un cortège royal avec le futur roi lui-même ?? Cela allait être des centaines de personnes qui partiraient ; toute la Cour qui se déplacerait avec le Dauphin ! Grandiose ! Tout cela pour Jeanne, pour notre amie ! Comment allait-elle le prendre ? Comme un privilège ? Après tout cela promettait d'être spectaculaire. Moi-même je n'avais jamais rien pu voir de tel. Ou comme un affront ? Elle s'était battue si dur pour avoir enfin l'autorisation d'aller porter secours sur les champs de batailles !
Voyant que la Pucelle ne disait rien face à cette déclaration, le confesseur décida de terminer cet entretien :
- Nous avons fixé la date du départ le 4 mars, soit dans trois jours.
- Et quand les interrogatoires se termineront-ils ? osa finalement demander Jeanne.
- Cela dépendra de certains facteurs. Je suis dans l'incapacité de vous renseigner d'avantage. Vous pouvez disposer.

Derrière nous, nous pouvions entendre les portes du château se refermer lourdement. Jeanne n'avait pas dit un traitre mot depuis notre départ de la salle d'interrogatoire. À quoi pouvait-elle bien penser ? Enfin, comment prenait-elle les nouvelles ?
- Jeanne ? demanda Danael pour briser ce silence oppressant.
- Oui ?
- Tu n'as pas dit un seul mot depuis tout à l'heure ! Est-ce par rapport à la déclaration de tes juges ?
La jeune femme, marchant en tête, se stoppa et se retourna vers nous. Une mine sombre se dévoila à nous. Une mine qui avait très mal pris la nouvelle.
- Que voulez-vous que je dise ? interrogea-t-elle fermement. Vous avez très bien entendu ce qu'il a été décidé ! J'ai trois jours pour faire mes valises et me rendre à Poitiers. Et je vais être de nouveau interrogée pour une durée indéterminée.
Tout ceci, nous le savions ! Nous l'avions très bien entendu. Ses paroles pourraient nous faire penser qu'elle acceptait simplement ce qui avait été décidé. Pourtant, son visage disait tout autre chose. Alors qu'est-ce qu'elle ne nous disait pas ?
- Alors pourquoi cette tête ? questionna Shimy. Pourquoi sembles-tu si sombre ?
La guerrière eut un rire ironique. Troublée, je me tournai vers mes compagnons qui semblaient tout aussi perdus que moi.
- Si ce n'est que cela qui vous inquiète, j'accepte très bien leur décision. Ne vous en faites pas pour cela. Seulement, plus le temps passe, plus la guerre se perd. Les soldats se demandent à quoi rime tous ces combats. Les français perdent espoir et on ne peut rien y faire. Je sais bien que je ne serais sûrement pas celle qui fera gagner cette guerre bien trop longue. Mais je sais que, chaque jour qui passe, des gens tombent au combat. Et j'en ai assez de ne rien pouvoir faire.
Sur ses mots, elle tourna les talons et partit, sans s'occuper de nous. Notre amie avait raison : plus le temps passait, plus la victoire s'éloignait de nous. Elle nous impressionnerait toujours, il n'y avait pas de doute. Derrière ses airs d'élue qu'elle montrait à tout le monde se cachait une femme d'une grande sagesse. La voyant peu à peu s'éloigner, Dan nous fit un geste pour avancer. Il n'était pas question de se perdre à nouveau.

L'appel de JeanneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant