Chapitre 25

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  Petit rappel :
Shimy = Richard Astria
Gryf = Jean d'Aulon
Ténébris = Jean D'Alençon
Jadina = Bertrand de Poulengy

Bonne lecture !

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Portant toute l'armure et les armes derrière un paravent, Jeanne commença les essayages. L'entendant s'énerver avec ces équipements, elle semblait assez perdue.
- Et après, annonça Danael le sourire aux lèvres, c'est votre tour !
Les trois plus jeunes d'entre, dont moi, nous nous consultâmes du regard avant d'interroger Dan. Était-il vraiment sérieux ? Nous n'avions jamais porté d'armure ! Comme Jeanne, nous avions appris à nous battre en vêtements d'écuyer. Nous n'avions jamais essayé avec une armure sur nous ! Et malgré la protection que cet objet apportait, il n'en demeurait pas moins lourd. Il nous faudrait du temps pour nous y habituer ! Pourtant, malgré le maigre espoir que nous avions, mon chevalier semblait prêt à nous en vêtir aussi.
Un cri d'exaspération retentit dans l'armurerie suivi d'un grand fracas d'objets en métal. Nous ne pûmes nous remettre de notre surprise que la porte du local s'ouvrit à la volée pour laisser voir une femme au visage courroucé. Extrêmement surpris par ces deux événements brutaux, nous laissâmes échapper un cri de stupeur.
- Je peux savoir ce que vous faites ? interrogea-t-elle en décomposant bien ses mots.
La nouvelle venue replaça ses cheveux blond caramel volant suite à sa potentielle course dans les escaliers. Croisant les bras, son regard gris gelé nous ordonnait de répondre rapidement. Qui était-ce ? Personne ne semblait le savoir. Personne, sauf notre hôte. Honteusement, il s'avança devant la dame, n'osant ne rien dire. Avec une telle atmosphère, plus personne ne trouvait la force pour répondre à la guerrière. Complètement lessivée pour comprendre comment se mettait chaque pièce de son puzzle, Jeanne ne s'était même pas aperçue de la présence de la nouvelle venue. C'était sûrement mieux ainsi : Danael pouvait se détendre en lui expliquant comment se revêtir d'une armure.   
- Colas, le rappela à l'ordre la femme, j'attends une réponse. Que faites-vous ici ?
- Ma mie, balbutia le concerné tout tremblant, nous faisons des essayages à la Pucelle de Lorraine. Elle a besoin d'une armure !
Cette furie, la femme de Montbazon ?? Diantre ! Je n'aurais jamais imaginé une telle situation ! Hormis avec l'élue, Colas semblait tellement sûr de lui ! On ne pouvait pas vraiment lui reprocher ; c'était l'effet qu'elle produisait. Mais qui aurait pensé que c'était sa femme qui tenait les rennes de leur antre ? Elle était intrigante. Ce n'était guère souvent que nous rencontrions une dame avec son propre caractère :
- Et j'imagine que m'envoyer un coursier pour me l'avertir aurait été trop demandé ? répliqua la fameuse mie de Montbazon. J'en ai assez de toutes tes cachotteries ! Déjà que je n'ai découvert qu'ici l'existence de nos hôtes.
Et d'un geste de la main, elle nous désigna à son mari avant de secouer la tête. Outrés, nous nous retournâmes vers Montbazon. Ne pas prévenir de l'arrivée de Jeanne dans l'armurerie était une chose. Il n'était pas obligé de confondre vie professionnelle et vie familiale. Mais ne pas prévenir de notre arrivée à sa femme en était une autre ! D'accord, les dames étaient toujours placées au second plan. Mais tout de même ! Nous allions passer on ne savait combien de temps chez eux et il ne disait rien ?! C'était clairement un manque de politesse, ne serait-ce que pour la cuisine !

   En soupirant, elle entra dans la salle et nous salua en fusillant son mari du regard :
- Legfanenn de Montbazon, épouse de cet imbécile que vous avez juste en face de vous. Enchantée de faire votre rencontre.
Avec un petit sourire, elle secoua sa fine robe verte et me tendit la main que je serrai doucement. Cette fameuse Legfanenn était drôlement audacieuse pour traiter son mari « d'imbécile » ! Sûrement qu'il n'avait pas beaucoup de caractère avec elle. Toutefois, elle paraissait plutôt sympathique.
- Je suis navrée d'être arrivée si brusquement, s'excusa-t-elle après avoir serrée la main de tous mes compagnons. Je reste tout de même heureuse de faire votre connaissance. Accueillir la Pucelle et ses compagnons ici-même, c'est pour moi un immense honneur. J'imagine qu'elle est derrière le paravent.
- En effet ma dame, répondit Razzia pour ne pas laisser s'installer un silence oppressant, la jeune femme se trouve juste derrière.
- Qu'il me tarde de la rencontrer ! Elle fait un bel effet, d'après les rumeurs.
- Tout à fait, approuva Ténébris, elle est réellement impressionnante.
S'ensuit une conversation avec Legfanenn qui ne cessait de nous poser des questions. Si les plus âgés y répondaient mécaniquement, ce fut plus difficile pour les autres que de nous lancer dans cette conversation. Elle était très impressionnante avec son étoffe de commandante. Au tout début, j'observais Dan se morfondre par l'ignorance de Jeanne en matière d'armure. Il ne comprenait comment une si grande guerrière pouvait confondre braconnière et greve. Inadmissible, selon ses dires. Pour notre amie, elle peinait à retenir son calme. C'était la première fois qu'elle s'habillait avec un tel vêtement ! Jamais elle n'avait appris ses différentes parties. Voyant que leur querelle n'allait pas s'arrêter de si tôt, je me mêlai petit à petit à la conversation. Je pus en apprendre d'avantage sur cette étrange personnalité. Legfanenn était une femme née dans une famille plutôt aisée, assez facile de le deviner. Elle aimait se battre depuis sa plus tendre enfance contre les garçons de son âge. Seulement, étant une jeune demoiselle, cela était très mal vu. Une folle comme on la traitait. Pourtant, malgré les réprimantes, elle n'abandonna pas le combat. C'était l'une des raisons pour laquelle elle s'était mariée avec cet armurier : pour pouvoir parfaire ses techniques. Elle nous racontait même qu'elle se battait parfois en combat singulier avec son mari. Et c'était pour cela qu'elle admirait tant Jeanne. Bien qu'elle n'avait démontré aucune pratique de combat publiquement, elle enviait sa détermination et son envie de combattre. Elle était la fierté des femmes, selon ses dires. Une chose que nous ne pourrions pas comprendre, nous les hommes. Téné, Shimy et moi nous retînmes de rire : nous comprenions bien mieux qu'elle ne le pensait.

L'appel de JeanneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant