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Quand nous rentrons au camp, il fait nuit noire. Mais le feu est tellement énorme au milieu du terrain que l'on voit dans la forêt à cinq cents mètres de rayon autour du camp. Et il ne nous faut pas bien longtemps pour nous placer devant le feu brûlant afin de nous sécher. Avec l'humidité ambiante de la forêt, nous sommes restés trempés toute l'après-midi. Dès notre arrivée, le groupe d'ado se précipite sur Emile qui a six carcasses de lapins autour de la taille et à peine lève-t-il les yeux que les gamins sont déjà en train de dépouiller les cadavres afin de les faire cuire. Je soupire, agacée qu'ils n'aient aucune considération pour ceux qui ont fait l'effort d'aller chasser alors qu'eux glandaient toute la journée.
On s'assoit près du feu, attendant que les autres reviennent car en observant rapidement le camp, je me rends compte que Clarke, Wells et Finn ne sont toujours pas rentrés. Bellamy est encore dehors lui aussi, mais ce n'est pas vraiment ce qui me préoccupe le plus. Mon estomac est au bord du suicide si je ne mange rien rapidement. Trois jours. Trois jours que je n'ai pas mangé quoi que ce soit. J'ai d'ailleurs à peine bu et Emile s'en rend compte quand, quelques minutes après, mon ventre se met à gargouiller.
— Et ben dit donc, c'est un moteur que t'as dans le ventre ou quoi ? plaisante-t-il gauchement, essayant probablement de me faire penser à autre chose qu'à ce pauvre Atom souffrant de ses blessures.
— Je n'ai pas mangé depuis trois jours. J'avoue avoir un peu faim.
— T'as pas mangé hier ? Pourtant y'avait de quoi faire.
— Je sais bien, mais j'avais l'estomac retourné.
Alors il se lève et attrape une brochette de lapin dont la chair a fini par griller. Son aplomb suscite d'ailleurs l'indignation des cent qui attendent pour manger eux aussi et alors que je le pensais trop apprivoisé, il hausse le ton.
— Écoutez, cette fille là-bas, explique-t-il en me montrant, elle n'a pas mangé hier soir parce que vous étiez trop obsédés par la bouffe et trop avares pour penser que certains n'avaient pas pu avoir de leur. Alors contentez-vous d'avoir les miettes pendant qu'elle se fait un repas similaire à ce que vous avez eu hier.
Je hausse les sourcils et souris discrètement. Il est vraiment plein de surprises ce mec. Je n'ai pas cherché à manger hier mais il a l'air de s'en contreficher. J'ai trop faim pour faire la difficile. Il revient tout de suite après et me tend la brochette en se rasseyant. Je le regarde toujours quand je prends la nourriture, réellement impressionnée.
— Quoi ? me demande-t-il innocemment. T'as faim, non ?
Je lâche un petit ricanement puis le remercie avant de mordre dans la viande saignante. Lorsque la chair entre en contact avec ma langue, c'est une explosion de nouvelles saveurs qui m'envahit et je ne peux que frissonner à toute cette nouveauté. Je suis presque trop heureuse de manger, parce que ça donne tort à l'Arche pour la énième fois. À la cantine, lorsqu'au menu il marquait « à base de viande », tous les habitants étaient heureux. C'était de loin la meilleure bouffe du vaisseau et ils nous assuraient que c'était de la vraie viande. Qu'on en mangeait peu afin de l'économiser et avoir des jours exceptionnels où cela remonterait le moral de tout le monde. Mais la vraie viande n'a pas ce vieux goût merdique comme sur l'Arche, j'en ai la preuve maintenant.
— Oh la vache, m'exclamé-je en fermant les yeux. C'est probablement la meilleure chose que j'ai jamais mangé de ma vie.
— Ah, c'est pas bien compliqué non plus de trouver meilleur que sur l'Arche.
Nous rions tous les deux, nous abandonnant à l'insouciance et à un repos bien mérité. Néanmoins, je ne peux pas m'empêcher de penser à Atom. Je ne le connaissais pas mais il semblerait qu'Emile si. Atom était un des moutons de Bellamy et bien que je déteste les moutons, je ne pense pas qu'il méritait de mourir. Nom de dieu, mais qu'est-ce que c'était ce brouillard ? Une question dont personne ne connaît la réponse. Maintenant on sait à quoi s'attendre.
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Cet Espoir ■ Bellamy Blake
FanfictionIl y a 97 ans, un holocauste nucléaire a décimé la population de la Terre, détruisant toute civilisation. Les seuls survivants sont les quatre cents habitants des douze stations spatiales qui étaient en orbite à ce moment-là et qui, après s'être rel...